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leurs dimensions, qui n'est imposée ni par des considérations techniques ni par des normes .... Exploitation des connaissances techniques ou du savoir-faire.
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CONCURRENCE DELOYALE ET PARASITISME

© Ed. Francis Lefebvre

− la reproduction du format d’étiquettes résultant de la combinaison de leur forme et de leurs dimensions, qui n’est imposée ni par des considérations techniques ni par des normes (Cass. com. 19-5-1992 no 90-14.170 D ; CA Poitiers 4-10-2011 no 10/02787 : RJDA 5/12 no 542) ; − la commercialisation d’un jeu de construction compatible avec celui, composé de briques emboîtables, d’un concurrent célèbre et dont l’aspect extérieur est si semblable que seul un œil exercé peut les distinguer (CA Paris 7-11-1994 : RJDA 6/95 no 793).

3. Imitation de publicité L’imitation des moyens de publicité d’autrui est répréhensible lorsqu’elle est susceptible de créer, dans l’esprit de la clientèle, une confusion avec les produits de l’entreprise concurrente.

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a. Supports publicitaires L’imitation d’un support publicitaire constitue un acte de concurrence déloyale dès lors qu’il existe un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle. Pour des exemples concernant : − des prospectus (T. com. Dunkerque 3-6-1957 : D. 1957 som. p. 138 ; TGI Paris 12-3-1982 : Lettre distrib. octobre 1982 p. 2) ; − une brochure (Cass. com. 19-7-1965 : D. 1965 p. 763 ; Cass. com. 15-6-1983 no 81-15.936 : Bull. civ. IV no 174 ; CA Paris 26-10-1987 : D. 1987 IR p. 229) ; − des graphiques (Cass. com. 27-11-1972 no 71-11.754 : D. 1973 IR p. 2) ; − des documents commerciaux (T. com. Lyon 5-7-1977 : D. 1978 IR p. 78) ; − des étiquettes (Cass. com. 7-10-1980 no 79-10.093 : Bull. civ. IV no 327) ; − la reproduction d’une photographie (CA Paris 25-10-1989 : D. 1989 IR p. 300 ; CA Versailles 26-9-1991 : RJDA 7/92 no 771) ; − un film publicitaire reprenant une situation mise en scène dans une photographie publiée dans la presse écrite (CA Paris 24-3-1999 : RJDA 11/99 no 1271).

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b. Slogans publicitaires L’imitation servile ou quasi servile d’un slogan publicitaire constitue un acte de concurrence déloyale dès lors qu’il existe un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle. Il en est ainsi : − du slogan utilisé pour la promotion de fromages portant la marque « La vache sérieuse » « Le rire est le propre de l’homme... le sérieux celui de la vache » reprenant le slogan « Le rire est le propre de l’homme... c’est aussi celui de La vache qui rit » utilisé pour la promotion des fromages de marque « La vache qui rit » (CA Paris 4-3-1959 : D. 1960 p. 26 note H. Desbois) ; − du slogan « Les 25 jours Super But. Les jours les moins chers de France chez But » alors qu’un distributeur, qui était concurrent de l’annonceur pour nombre des produits concernés par l’opération mise en œuvre, utilisait depuis plusieurs années le slogan « Les 25 jours Auchan. Les jours les moins chers de France » pour son opération promotionnelle annuelle (TGI Meaux 16-9-1995 : Contrats, conc., consom. 1995 comm. no 184 note L. Vogel). En revanche, l’utilisation du slogan « seul Lava lave aussi blanc sans bouillir » n’est pas une imitation déloyale du slogan « Persil lave plus blanc » dès lors que le premier n’a ni la brièveté, ni l’euphonie, ni l’impact du second (CA Paris 22-4-1969 : D. 1970 p. 214 note J.-M. Mousseron). Un slogan publicitaire déposé comme marque peut faire conjointement l’objet d’une action en contrefaçon de la marque déposée et d’une action en concurrence déloyale si le comportement de l’imitateur est frauduleux. Sur les conditions de mise en œuvre parallèle des deux actions, voir no 7655.

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c. Idées publicitaires Une idée publicitaire est non protégeable, quand bien même elle serait originale, et elle ne peut pas faire l’objet d’une appropriation (CA Versailles 24-11-1994 : RJDA 3/95 no 386). En revanche, une campagne publicitaire fondée sur un procédé déjà exploité précédemment par autrui peut être constitutive d’un acte de concurrence déloyale si l’utilisation de

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ce procédé s’accompagne de faits ou de manœuvres susceptibles de créer une confusion de nature à détourner la clientèle d’un concurrent (CA Versailles 24-11-1994, précité). En l’espèce, il a été jugé que tel n’était pas le cas de l’utilisation par une agence de publicité du principe consistant à demander aux consommateurs de téléphoner au cours d’une période déterminée de la journée afin d’être éventuellement tirés au sort pour recevoir un lot.

d. Termes utilisés

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L’existence dans une publicité de termes identiques ou similaires à ceux employés dans une autre n’est pas toujours répréhensible. En effet, l’emploi de mots d’usage courant ou de termes techniques nécessaires pour l’information du public ne constitue pas un acte de concurrence déloyale. Ainsi, les mots « massage » et « électricité statique » employés à propos de sous-vêtements sont des mots du langage courant dont l’emploi ne constitue pas un usage déloyal de formules semblables (Cass. com. 13-5-1970 no 69-10.908 : Bull. civ. IV no 160) ; il en va de même pour l’utilisation des mots d’usage courant « on est tous », « nous sommes tous » (T. com. Paris 28-5-1990 : Lettre distrib. juillet-août 1990 p. 4).

Il en est de même de l’utilisation dans une publicité de termes qui sont nécessaires pour définir les produits ou leur mode d’utilisation. Par exemple, le slogan « Seul Lava lave aussi blanc sans bouillir » n’est pas une imitation déloyale du slogan « Persil lave plus blanc » dès lors que l’emploi des deux mots « lave » et « blanc » est nécessaire et descriptif pour exprimer l’action du produit et le résultat qu’on en attend (CA Paris 22-4-1969 : D. 1970 p. 214 note J.-M. Mousseron). De même, l’utilisation du slogan « l’anti-virus absolu » à propos d’un logiciel est licite (CA Paris 24-5-1995 no 93-17935, 4e ch. A).

C. Désorganisation de l’entreprise concurrente 1. Exploitation des connaissances techniques ou du savoir-faire

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L’exploitation des connaissances techniques ou du savoir-faire commercial sans l’autorisation de leur titulaire constitue une faute ouvrant droit à réparation. Il en est ainsi, par exemple : − d’une entreprise industrielle qui, en embauchant un employé d’une société concurrente, acquiert toutes précisions sur les techniques de fabrication et les résultats des recherches effectuées par celle-ci (Cass. com. 18-12-1957 no 1223 : Bull. civ. III no 305) ; − d’une société qui se procure l’ensemble de la documentation technique et commerciale d’un concurrent grâce à sa filiale qui avait eu, pour un temps, l’exploitation du fonds de commerce de celui-ci en location-gérance (Cass. com. 29-4-1975 no 73-14.098 : Bull. civ. IV no 117) ; − d’une entreprise de construction qui, à l’occasion de pourparlers avec un concurrent, s’empare des procédés techniques utilisés par celui-ci et les met en œuvre sur l’un de ses chantiers (Cass. com. 3-10-1978 no 77-10.915 : D. 1980 p. 55 note J. Schmidt-Szalewski). Remarque : la révélation d’un secret de fabrique par le directeur ou le salarié d’une entreprise à des tiers étant sanctionnée pénalement (CPI art. L 621-1), le titulaire des connaissances frauduleusement divulguées peut aussi obtenir réparation de son dommage en se constituant partie civile à l’encontre de l’auteur de ce délit (pour une application, voir Cass. crim. 7-11-1974 no 72-93.034 : Bull. crim. p. 825).

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Bien entendu, l’exploitation de connaissances techniques ou commerciales n’est fautive que si ces dernières sont originales et secrètes. Ainsi, ne sont pas déloyales : − l’utilisation, par l’ancien salarié d’une entreprise, de la seule expérience acquise auprès de celle-ci (CA Paris 23-3-1982 : D. 1982 IR p. 369) ; Encore faut-il que l’intéressé n’agisse pas en violation d’une clause de non-concurrence (no 8220). − l’exploitation par une entreprise industrielle, à l’instigation de l’ancien directeur technique d’une société concurrente, d’un procédé de moulage de fonte largement connu (Cass. com. 22-3-1971 no 69-12.975 : Bull. civ. IV no 84) ; − l’utilisation par l’ancien salarié d’un salon de coiffure d’une technique de coupe dite « sur cheveux secs » dès lors que celle-ci ne constitue pas une œuvre originale (Cass. soc. 18-12-1978 no 77-41.502 : Bull. civ. V no 877).

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De même a-t-il été jugé que n’était pas fautive la diffusion par une société d’un désinfectant des voies respiratoires à base d’essences aromatiques naturelles, après l’échec de pourparlers avec une autre société en vue de distribuer un produit similaire fabriqué par celle-ci, compte tenu des éléments suivants : l’inhalation d’essences aromatiques pour la prévention des infections respiratoires est un procédé ancien qui relève du domaine public ; la présentation sous forme de vaporisateur est banale en pharmacie ; il est aisé pour un professionnel de ce secteur de réaliser un tel produit et la société plaignante avait elle-même reconnu que son concurrent en avait la capacité technique ; cette société n’était pas en mesure de produire les documents confidentiels qu’elle prétendait avoir communiqués au cours des pourparlers et le projet de contrat de distribution qui avait fait l’objet de négociations ne faisait aucune allusion à la protection d’un quelconque savoir-faire ; il ne pouvait pas être reproché à la seconde société d’avoir repris une idée commerciale qui ne faisait l’objet d’aucun droit exclusif ; enfin, aucune confusion ne pouvait résulter du conditionnement et des présentoirs des produits dont les couleurs et les inscriptions étaient différentes (Cass. com. 21-11-2000 no 98-17.783 : RJDA 2/01 no 252).

2. Embauche fautive de personnel La simple embauche, dans des conditions régulières, d’anciens salariés d’une entreprise concurrente n’est pas en elle-même fautive (Cass. com. 5-2-1991 no 88-16.214 : RJDA 4/91 no 361). Ainsi, le fait de recruter du personnel d’un concurrent à la suite de petites annonces parues dans la presse locale ou de candidatures spontanées n’est pas en soi constitutif de concurrence déloyale (Cass. com. 13-5-1975 no 74-12.007 : Bull. civ. IV no 132). En revanche, l’embauche devient déloyale si elle est intervenue dans des circonstances particulières caractérisant la faute du nouvel employeur et causant un préjudice à l’employeur précédent.

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Des dommages-intérêts peuvent aussi être obtenus en application de l’article L 1237-3 du Code du travail (ex-art. L 122-15) selon lequel, en cas de débauchage d’un salarié qui a rompu abusivement son contrat de travail, le nouvel employeur est solidairement responsable du dommage causé à l’employeur précédent lorsqu’il est intervenu dans la rupture ou lorsqu’il a eu connaissance du contrat de travail qui liait le salarié à son ancien employeur. Par ailleurs, l’employeur peut être condamné, sous astreinte, à rompre le contrat de travail qu’il a conclu avec le salarié qu’il a embauché dans des conditions fautives (Cass. soc. 25-10-1990 no 88-18.624 : RJS 12/90 no 965 ; Cass. com. 26-10-1993 no 91-21.044 : RJDA 2/94 no 240).

a. Salarié libre de tout engagement de non-concurrence Constitue une manœuvre déloyale la désorganisation de l’entreprise d’un concurrent par l’embauche massive de salariés démissionnant de manière concertée. Par exemple, ont été jugés fautifs les recrutements effectués dans les conditions suivantes : − sur les seize salariés que comptait une société, trois l’avaient quittée pour entrer au service d’une autre entreprise et deux autres avaient donné leur démission à la suite d’offres d’engagement qui leur avaient été faites par cette dernière ; cela avait provoqué une désorganisation de la société qui avait ainsi perdu une équipe de travail complète représentant le tiers de son personnel (Cass. com. 5-11-1991 no 89-13.506 : RJDA 2/92 no 214) ; − onze des vingt-deux salariés d’une société l’avaient quittée en un temps réduit pour une autre société en bénéficiant d’augmentations de traitement non négligeables, ces salariés étaient qualifiés et constituaient des équipes en charge de dossiers importants générant l’essentiel du chiffre d’affaires de leur ancienne société ; ces départs avaient contribué à désorganiser gravement celle-ci, ce que leur nouvel employeur ne pouvait pas ignorer (Cass. com. 24-10-2000 no 97-12.330 : RJDA 2/01 no 251) ; − les quatre salariés du même bureau d’un centre de gestion ainsi que deux salariés sur cinq d’un autre bureau avaient démissionné en même temps, étaient tous entrés au service d’un autre centre de gestion, lequel avait ouvert dans les semaines suivantes un bureau dans la commune où était situé celui du concurrent dont tous les salariés avaient démissionné et s’était doté d’un logiciel informatique compatible avec celui du concurrent, permettant d’en exploiter les données ; dès le lendemain de cette démission, ce dernier avait constaté la disparition matérielle d’un grand nombre de dossiers et de supports de travaux en cours, ce qui avait généré une désorganisation de ses services (Cass. com. 18-12-2001 no 9917.553 : RJDA 5/02 no 578) ;

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− embauche simultanée de la moitié du personnel d’une autre société, ce qui conduisait nécessairement à la désorganisation de celle-ci (CA Rouen 24-6-1993 : RJDA 8-9/93 no 765) ; − embauche simultanée par un nouveau concurrent de la totalité des salariés composant l’équipe commerciale d’une société à des salaires égaux ou équivalents à ceux dont ces salariés, tous d’une grande ancienneté, bénéficiaient chez leur employeur précédent, alors que leur nouvelle mission comportait des tâches plus limitées et que leur départ n’était ni prévisible ni justifié par des modifications dans leurs conditions de travail. Ce débauchage massif avait entraîné une grave désorganisation de la société en la privant de ses chances de résister à l’offensive du nouvel arrivant puisqu’elle s’était trouvée empêchée de prospecter efficacement sa clientèle traditionnelle pour tenter de la fidéliser et d’en développer une nouvelle (Cass. com. 3-6-2008 no 07-12.437 : RJDA 12/08 no 1326) ; − tous les salariés d’une entreprise, spécialisée dans les transports exceptionnels, qui disposaient d’un savoir faire spécialisé et d’une expérience dans le transport de catamarans avaient démissionné en même temps et avaient été immédiatement embauchés par une société qui entendait développer cette activité dans la même commune ; pour faire face à ces défections, l’entreprise avait dû recruter du personnel et surtout le former en urgence ; ces défections s’étaient accompagnées d’une perte de clientèle, le leader mondial des constructeurs de catamarans dont les transports étaient assurés par l’entreprise depuis 24 ans étant devenu client de la société concurrente ; cette désorganisation de l’activité de transport de catamarans de l’entreprise s’était accompagnée d’une captation de clientèle et avait exposé l’entreprise à une perte de chiffre d’affaires et à des coûts de recrutement et de formation (Cass. com. 29-11-2011 no 10-25.027 : RJDA 3/12 no 356).

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Le débauchage de main-d’œuvre, qui suppose que le nouvel employeur se soit livré à des manœuvres déloyales pour embaucher des salariés du concurrent, constitue également un acte de concurrence déloyale s’il en résulte une désorganisation de l’entreprise qui en est victime (Cass. com. 9-3-1999 no 97-12.009 : RJDA 5/99 no 620 ; Cass. com. 16-12-2008 no 07-19.848 : RJDA 4/09 no 395). Le fait d’embaucher trois salariés d’une même entreprise à des conditions de rémunération particulièrement élevées ne saurait donc à lui seul entrer dans ce cas de figure (Cass. com. 21-10-1997 no 95-17.926 : RJDA 2/98 no 238 ; rapp. Cass. com. 30-6-1992 no 90-18.662 : RJDA 12/92 no 1189). En revanche, le débauchage d’un seul salarié peut suffire à désorganiser une entreprise (CA Versailles 25-6-2009 no 08-3959 : RJDA 1/10 no 94). Est ainsi fautif le fait pour une société, nouvellement créée par deux anciens courtiers d’une entreprise, d’embaucher le dernier salarié du service Matif de cette entreprise, dès lors que l’intéressé était seul à même de conserver et transmettre le savoir-faire de l’entreprise dans ce domaine et que la déstabilisation opérée constituait un avantage décisif pour la nouvelle société qui pouvait démarcher la clientèle avec une facilité accrue car cette déstabilisation aboutissait à priver l’ancien employeur de tous ses courtiers sur le Matif alors que de tels professionnels sont rares sur le marché de l’emploi du fait de la spécificité du métier de courtier en céréales (CA Versailles 25-6-2009 précité).

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Est également constitutive de concurrence déloyale l’embauche en vue de détourner la clientèle d’une entreprise en exploitant les connaissances acquises par le salarié dans son emploi précédent (Cass. com. 7-5-1980 no 78-14.831 : JCP G 1980 IV no 267 ; Cass. com. 26-2-1985 no 83-12.466 : JCP éd. G 1985 IV no 169 ; Cass. com. 6-11-1990 no 91-16.548 D ; Cass. com. 4-5-1993 no 91-16.548 D).

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En revanche, il n’y a pas concurrence déloyale lorsque les faits litigieux ne présentent, ni en eux-mêmes ni dans leurs conséquences (désorganisation de l’entreprise), de caractère illicite ou déloyal (pour des exemples, voir Cass. com. 17-10-1995 no 93-21.470 : RJDA 2/96 no 300 ; Cass. com. 21-1-1997 no 94-17.800 : RJDA 5/97 no 738 ; Cass. com. 26-9-2006 no 05-14.410 : RJDA 2/07 no 207 ; CA Paris 21-1-1993 : RJDA 6/94 no 754). En particulier, n’entraîne pas réparation une simple perturbation du fonctionnement de la société (Cass. com. 21-10-1997 no 95-17.926 : RJDA 2/98 no 238 ; Cass. com. 31-10-2006 no 05-12.064 : RJDA 3/07 no 303).

L’embauche massive de personnel n’est également pas fautive lorsque l’ancien employeur est à l’origine du départ des salariés et donc indirectement de la désorganisation de l’entreprise. Tel est le cas lorsque le départ massif de salariés est intervenu à la suite d’une restructuration du réseau de vente de l’ancien employeur, laquelle était défavorable aux salariés démissionnaires (Cass. com. 2-7-2002 no 00-14.886 : RJDA 11/02 no 1210) ou encore lorsque ce départ en grand nombre est lié à la dégradation de la situation de la société (Cass. com. 22-5-2007 no 0613.421 : RJDA 10/07 no 1028 ; Cass. com. 29-3-2011 no 10-17.647 : RJDA 6/11 no 589). 206

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b. Salarié soumis à une clause de non-concurrence L’embauche d’un salarié est répréhensible lorsque l’employeur sait que celui-ci est lié par un contrat de travail à un autre employeur ou par une clause de non-concurrence (Cass. com. 5-2-1991 no 88-18.400 : RJDA 6/91 no 552 ; Cass. com. 22-2-2000 no 97-18.728 : RJDA 9-10/00 no 929).

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Un salarié est en revanche libre de quitter son employeur pour mettre à profit les connaissances qu’il a acquises lorsque aucune clause de non-concurrence ne figure à son contrat de travail (CA Paris 28-6-1982 : D. 1983 IR p. 53 obs. Y. Serra ; Cass. com. 6-3-1990 : Gaz. Pal. 1990 pan. p. 196 ; Cass. com. 18-5-1993 no 91-17.976).

C’est à celui qui demande réparation du dommage que lui a causé l’embauche d’un salarié lié par une clause de non-concurrence de rapporter la preuve que le nouvel employeur connaissait l’existence de cette clause (Cass. com. 19-10-1999 no 97-15.795 : RJDA 12/99 no 1407 ; Cass. com. 18-12-2001 no 00-10.978 : RJDA 5/02 no 577). Cette preuve est rapportée lorsque la clause de non-concurrence figure sur le certificat de travail du salarié (CA Paris 22-9-1982 : D. 1983 IR p. 421 obs. Y. Serra) ou, bien entendu, lorsque l’employeur précédent a averti le nouvel employeur par écrit (Cass. com. 19-10-1983 no 82-12.841 : Bull. civ. IV no 192). Jugé que le nouvel employeur ne peut prétendre ignorer l’existence de la clause du seul fait que celle-ci ne figure pas sur le certificat de travail du salarié (CA Paris 20-2-1984 : D. 1984 IR p. 444 obs. Y. Serra).

Dans certains cas, le nouvel employeur a l’obligation de prendre l’initiative de vérifier si le salarié n’était pas lié par une clause de non-concurrence et son abstention constitue une faute à l’égard de l’ancien employeur. Il en va ainsi lorsqu’il engage un salarié d’une entreprise concurrente doté d’une expérience professionnelle confirmée (Cass. com. 11-7-2000 no 9521.888 : RJDA 2/01 no 250). Il en va de même dans les secteurs où une clause de non-concurrence est habituelle (pour une application à propos de l’embauche d’animateurs de télévision, voir Cass. com. 7-2-1995 no 9314.569 : RJDA 6/95 no 789 ; dans le même sens, à propos de la faute commise par l’employeur de représentants de commerce qui s’était abstenu de vérifier si ceux-ci avaient informé leurs autres employeurs de leur acceptation d’une nouvelle carte, voir Cass. com. 27-1-1982 no 80-14.175 : Bull. civ. IV no 35).

La faute de l’employeur est établie même si la validité de la clause est litigieuse (Cass. soc. 10-5-1983 no 81-41.844 : D. 1984 IR p. 140 obs. Y. Serra ; CA Paris 20-2-1984 : D. 1984 IR p. 444 obs. Y. Serra). A l’inverse, sa responsabilité ne peut être engagée lorsque la clause est nulle (Cass. com. 29-1-2008 no 06-18.654 : RJDA 6/08 no 605).

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En revanche, la nullité de la clause de non-concurrence ne fait pas obstacle à l’action en responsabilité engagée par l’employeur contre son ancien salarié, dès lors que l’employeur démontre que ce dernier s’est livré à des actes de concurrence déloyale à son égard (Cass. soc. 28-1-2005 no 02-47.527 : RJDA 5/05 no 635 ; Cass. soc. 14-12-2005 no 04-40.561 : RJDA 5/06 no 502). Sur les conditions de validité des clauses de non-concurrence, voir Mémento Social 2012 nos 18700 s.

3. Création d’une entreprise concurrente par d’anciens salariés Pendant la durée de son contrat de travail, le salarié est de plein droit tenu d’une obligation de non-concurrence à l’égard de son employeur. Il en est ainsi même en l’absence de clause expresse le précisant (Cass. soc. 5-5-1971 no 70-40.021 : Bull. civ. V no 327). Cette obligation n’interdit pas au salarié de préparer une future activité concurrente de celle de son employeur, à condition que cette concurrence ne devienne effective qu’après la rupture du contrat de travail. Le salarié peut ainsi participer à la création d’une société concurrente de l’entreprise de son employeur si cette société n’a eu aucun commencement d’activité au jour de la cessation du contrat de travail (Cass. soc. 5-12-1973 no 72-40.381 : Bull. civ. V no 624 ; Cass. com. 13-3-2001 no 99-11.178 : RJDA 7/01 no 824 ; Cass. soc. 5-5- 2009 no 07-45.331 : RJDA 10/09 no 909).

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Par exemple, le salarié peut effectuer des actes juridiques et des démarches administratives en vue de la constitution de la future société (CA Versailles 25-6-2009 no 08-3959 : RJDA 1/10 no 94).

Cette obligation n’interdit pas non plus au dirigeant salarié d’une société de créer et diriger une société qui a une activité complémentaire, et non pas concurrente, de celle de la première (Cass. soc. 19-11-2008 no 07-41.487 : RJDA 3/09 no 282). Le dirigeant social révoqué de ses fonctions mais conservant une participation importante dans le capital social reste tenu d’une obligation de loyauté à l’égard de la société en tant qu’associé (Cass. com. 17-1-2006 no 04-14.108 : RJDA 7/06 no 774). Ne manque pas à cette obligation le dirigeant qui crée une société concurrente, dès lors que ce comportement est dicté par le besoin de retrouver une activité professionnelle (même arrêt). 207

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Réciproquement, le seul fait d’être associé d’une société concurrente ne constitue pas un acte commercialement répréhensible (Cass. soc. 27-9-2011 no 09-71.473 : RJDA 2/12 no 220, dans un cas où le salarié détenait seulement 5 % du capital d’une société concurrente) ; en effet, sauf rôle actif de l’associé dans l’activité commerciale de la société, la détention de parts ou d’actions constitue un placement patrimonial n’ayant pour cause que l’espoir du gain inhérent à l’investissement ou un simple soutien moral à l’entreprise (CA Versailles 22-3-2001 : BRDA 9/01 inf. 12).

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En revanche, constitue une concurrence illicite le fait pour les employés d’une entreprise de créer une société concurrente qui exerce une activité alors que leurs contrats de travail ne sont pas encore expirés (Cass. com. 4-6-1973 no 72-11.737 : Bull. civ. IV no 192 ; Cass. com. 23-2-1999 no 96-20.075 : RJDA 5/99 no 619 ; Cass. com. 2-5-2007 no 05-16.626 : RJDA 10/07 no 1029), cette activité débuterait-elle seulement pendant l’exécution du préavis (Cass. com. 2-3-1982 : D. 1983 IR p. 53 obs. Y. Serra ; Cass. com. 9-11-1987 no 86-10.543 : BRDA 24/87 p. 22 ; dans le même sens pour un dirigeant démissionnaire, Cass. com. 12-2-2002 no 00-11.602 : RJDA 6/02 no 708).

Il a été jugé que le client d’une société créée dans ces circonstances pouvait lui-même être condamné pour concurrence déloyale à l’égard de l’ancien employeur dès lors qu’il savait que les salariés démissionnaires avaient commencé leur activité concurrente avant la date d’expiration de leur préavis (Cass. com. 26-3-2002 no 00-10.528 : RJDA 8-9/02 no 961).

De même, engage sa responsabilité délictuelle une société nouvelle constituée notamment par des salariés ayant signé une clause de non-concurrence à l’égard de leur ancien employeur dès lors qu’elle utilise les services de ces personnes en qualité de cogérants (Cass. com. 5-2-1991 no 88-18.400 : RJDA 4/91 no 300).

8250

La création d’une entreprise concurrente est également répréhensible, lorsque l’ancien salarié se livre à l’un des actes déloyaux décrits précédemment ou ci-après, notamment l’exploitation du savoir-faire de son ancien employeur (nos 8150 s.), le démarchage de la clientèle (no 8275), l’embauche fautive de personnel (nos 8180 s.) ou l’utilisation de signes distinctifs (nos 7900 s.). Ont ainsi été condamnés à verser des dommages-intérêts à leur ancien employeur : − les créateurs de mode qui avaient quitté celui-ci et tenu une conférence de presse en annonçant la fondation de leur propre maison le lendemain de la présentation de la collection de leur employeur, dont le succès leur avait été largement attribué (CA Paris 26-9-1994 : RJDA 6/95 no 792) ; − l’ancien salarié d’une société de spectacles qui avait quitté son employeur en emportant avec lui le répertoire des artistes et les agendas des rendez-vous des clients, ce qui lui avait permis de démarcher la clientèle de son ancien employeur en proposant, en connaissance de cause, des prix inférieurs à ceux pratiqués par ce dernier (Cass. com. 21-2-1995 no 93-10.754 : RJDA 7/95 no 924) ; − l’ancien salarié qui, après s’être procuré au cours de l’exécution de son contrat de travail, par des moyens frauduleux, le fichier des fournisseurs de son employeur avait quitté ce dernier et créé une société concurrente utilisatrice de ce fichier (Cass. soc. 22-5-1995 no 91-45.675 : RJDA 8-9/95 no 1066) ; − l’ancien salarié d’un restaurant qui avait ouvert, à proximité, un fonds de commerce similaire sous l’enseigne utilisée antérieurement par l’exploitant du restaurant (Cass. com. 21-61994 no 91-21.425 : RJDA 1/95 no 84). En revanche, une société créée par d’anciens salariés d’une société concurrente quelques semaines après leur départ de cette dernière ne peut pas être déclarée coupable de débauchage de personnel dès lors qu’au moment du départ des salariés elle n’avait pas encore d’existence légale (Cass. com. 10-1-1978 no 76-11.405 : Bull. civ. IV no 18 ; Cass. com. 7-3-1995 no 93-12.265 : RJDA 5/95 no 578).

4. Détournement de la clientèle a. Démarchage

Démarchage licite

8270

208

Une entreprise commerciale ne peut se prévaloir d’aucun droit privatif sur ses clients. Le démarchage de la clientèle d’un concurrent est donc licite dès lors qu’il n’est pas accompagné de procédés déloyaux (Cass. com. 24-10-2000 no 98-19.774 : RJDA 1/01 no 97 ; Cass. com. 24-11-2009 no 0820.578 : RJDA 2/10 no 185 ; Cass. com. 26-10-2010 no 09-71.313 : RJDA 2/11 no 193).