centre commercial du Prado : un fiasco

P. 7. L'éclipse débutera à 19h14 avant d'atteindre son sommet à 22h21. Interview de Richard. Hamou, médiateur scientifique au planétarium de Marseille. P. 9.
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bouches-du-rhône et var

Où en sont les travaux du bus à haut niveau de service ?

Dans le massif de la Sainte-Baume, la mini commune varoise vit recluse, sans réseau mobile. Pas de quoi troubler pour autant le bonheur de ses 42 âmes. P. 12

Les travaux pour la réalisation de l'Aixpress, un bus à haut niveau de service qui traverse la cité du Roi René, ont débuté en janvier dernier. Six mois plus tard, la Rotonde fait peau neuve. P. 7

photo association andromède

Riboux, une parenthèse verte déconnectée

1,30 €

éclipse

Ce soir vous avez rendez-vous avec la Lune ! L'éclipse débutera à 19h14 avant d'atteindre son sommet à 22h21. Interview de Richard Hamou, médiateur scientifique au planétarium de Marseille. P. 9

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aix-en-provence

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un jour, un lieu

Vendredi 27 juillet 2018 - n°22458

Le journa l le plus chanté de France

Scandale benalla

à Marseille des enseignes jettent l'éponge

culture

Les monochromes d'Olivier Mosset au Corbusier photo : we are contents

photo : M.R.

Quatre mois après son ouverture, le centre commercial du Prado voit plusieurs enseignes plier bagage. Le signe d’une saturation de l’offre commerciale et de l’échec de la stratégie de la ville. P. 2 et 3

Le syndicaliste policier dénonce une « République des passe-droits » et une dérive vers une garde présidentielle privée. P. 21

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Centre commercial du Prado : un fiasco ?

Entretien avec Alexandre Langlois de Vigi-CGT

Le centre d’art du Marseille Modulor abrite trois œuvres du plasticien suisse jusqu’au 30 septembre et c'est gratuit. P. 14

Le Français Arnaud Démare s’impose sur un sprint à Pau

photo DR

27926 - 727 - 1,30 E



tour de france

Placé aux avantpostes dans les derniers kilomètres, le Picard a profité de l’excellent travail des coureurs de l’équipe FDJ. P. 25

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La Marseillaise / vendredi 27 juillet 2018

notre dossier

Marseille saturée de centres commerciaux Économie

Marseille », avance la gérante du magasin de vêtements pour expliquer le manque de clients.

Le centre commercial du Prado, ouvert en mars dernier, voit plusieurs enseignes plier bagage malgré la présence de grandes marques. Le signe d’une saturation de l’offre commerciale et de l’échec de la stratégie de la ville ?

Saturation de commerces

Q

uatre petits mois et puis s’en va. C’est le temps qu’il a fallu à cette responsable d’un magasin de vêtements éco-responsables pour se décider à s’installer ailleurs. « Il n’y a pas assez de passage ici et ce ne sont pas les supporters qui vont acheter des fringues... », assène-t-elle. Elle devait y rester un an au moins mais les recettes ne sont pas à la hauteur. Comme elle, quatre enseignes plient bagage. Pas assez de clients, loyer trop élevé et contraintes trop nombreuses. « Je n’ai même pas le droit d’afficher une annonce pour chercher un vendeur sur ma vitrine ! », s’étrangle t-elle. Autre enseigne, autre complainte. « Pour moi, c’est un fiasco ce centre », confie amère une autre responsable d’un magasin qui tient à rester anonyme. Elle n’a pas encore déménagé, mais se pose sérieusement la question. « Ni les gens du quartier ni les touristes ne viennent », déplore-telle. Ouvert le 28 mars dernier, le Centre Commercial flambant neuf du Prado fait fuir les petites enseignes malgré l’arrivée de grosses marques telles que Zara, les Galeries Lafayette ou Auchan Gourmand. Certains commerçants y trouvent tout de même leur

Inauguré le 28 mars dernier, le centre commercial du Pharo accueille une trentaine de commerces

compte. « On est très satisfait. Le cadre est splendide et les clients sont là. », positivent Deborah et Julien, responsable de Gris Perle, un magasin de meubles.

Tout neuf mais tout vide

« On s’attendait peut-être à un peu plus de monde mais il faut que ça se mette en place doucement », tempère Margaux, co-responsable du magasin Jacadi. « Beaucoup de clients s’attendent à trouver un autre Terrasses du Port mais on est plus sur un centre commercial de quartier », lance t-elle pour explication. Les Terrasses du Port compte 171 commerces, le

centre du Prado une trentaine. Tous les commerçants s’accordent en tout cas sur un point : la réussite architecturale du lieu. Avec sa canopée, son mur végétal et son rooftop qui ouvre ce soir, le centre a fière allure. « Reste qu’il n’y a pas un seul banc », relève malicieusement une cliente. Du côté de la direction du centre, on se réjouit de l’arrivée d’Auchan Gourmand et de l’ouverture du Rooftop. En tout cas, clients ou pas, la foncière Klépierre, propriétaire du centre commercial ne connaît pas la crise. Dans un communiqué publié il y a deux jours,

LE PRADO SHOPPING, ILS EN PENSENT QUOI ?

Photo MR

l’entreprise, qui possède une centaine de centres en Europe, a relevé ses prévisions annuelles. Avec un chiffre d’affaires global de 669 millions d’euros, largement tiré des loyers des magasins, le groupe voit son chiffre augmenter de 2,2% par rapport au premier semestre 2017. L’occasion de s’auto congratuler du « succès immédiat » du centre commercial du Prado. Un succès tout relatif au vu des réactions et des départs évoqués. « Je pense que la direction a surestimé ses prévisions et je pense qu’il y a tout simplement trop de centres commerciaux à

Après Plan-de-Campagne, la Valentine, Bonneveine, les Terrasses du Port, le Dock Village ou la rénovation du Centre Bourse, Marseille avait-elle vraiment besoin d’un nouveau centre commercial ? « C’était déjà difficile pour les commerces du coin, c’est sûr que ça n’aide pas », soupire Tony Sessine, président de l’association Terre de Commerces qui réunit des commerçants dans tout le département. « Certains pensent que la deuxième ville de France ne peut pas avoir plus de deux centres commerciaux, moi j’y crois », défend Yves Moraine, maire LR du 6e et 8e arrondissements. Quoi qu’en dise la mairie, ce sont les commerces du centre-ville qui souffrent. La rue de Rome (voir ci-contre), la rue St Ferréol ou la rue de la République ne comptent plus le nombre de rideaux tirés. D’autant que le conseil municipal a annoncé au mois de février, sa volonté d’étendre la zone touristique au Prado et à son centre-commercial. A la clef pour les commerçants : la possibilité d’ouvrir boutique le dimanche. Même du côté du patronat, cette annonce interpelle. « On n’est pas contre, mais c’est trop tôt. Commençons par re dynamiser le Centre-Ville avant de déployer l’offre commerciale », recommande Johan Bencivenga, président de l’Upe 13-Medef. Et Tony Sessine de conclure : « Il faut que la Ville comprenne que le gâteau n’est pas extensible à l’infini ». Marius Rivière

Propos recueillis par bénédicte bottin

Monique, 56 ans, Fribourg (Suisse)

Aurore, 27 ans Marseille

Jimmy, 25 ans Marseille

Hervé, 39 ans, Mons (Belgique)

Laurine, 23 ans, Marseille

« Je suis en vacances à Bandol et j’étais venue visiter le stade Vélodrome, car je suis fan, lorsque j’ai découvert ce centre commercial qui se trouve à proximité. Ça fait plusieurs fois que je viens car j’apprécie l’architecture du lieu, je trouve ça très joli. Et les boutiques sont sympa, il y en a plein que je n’ai pas chez moi en Suisse et en plus on est très bien reçu ! Alors aujourd’hui je le fais découvrir à mes amis ! »

« C’est la deuxième fois que je viens dans ce centre commercial et je n’en suis pas du tout contente. La seule boutique que j’affectionne ici, c’est Zara. Le reste c’est pas assez jeune et pas assez abordable. Le centre n’est pas très loin de chez moi, mais je préfère me déplacer dans d'autres centres commerciaux tels que les Terrasses du Port ou Grand Littoral, et avoir du choix, des magasins qui me plaisent. »

« J’étais à la base venu uniquement pour visiter et faire découvrir à des amis qui ne sont pas de Marseille, mais j’en ai bien sûr profité pour jeter un coup d’œil et je suis clairement déçu. Je trouve ça trop grand, pour pas assez de magasins, qui en plus ne sont pas top. Le seul que j’aime bien, c’est la boutique de décoration, mais c’est éphémère. En plus j’habite pas à côté donc je ne me redéplacerai sûrement pas ! »

« Je me suis retrouvé ici par hasard ! J’étais venu visiter le nouveau stade Vélodrome, et le Prado Shopping est juste à côté. Et je trouve ce centre très beau, c’est très grand ! J’adore particulièrement, le mur végétal que j’ai pris en photo. Et puis c'est très ouvert et étendu comme centre commercial, c’est agréable, il y a énormément de choses ! Pour ce qui est des magasins, j’ai vu Zara, un magasin qui m'intéresse ! »

« Je viens régulièrement dans ce centre. J’apprécie de venir y passer un moment avec des amis, me balader et pourquoi pas faire les magasins. Avant j’allais aux Terrasses du Port, mais c’est trop enfermé, trop aseptisé. Ici c’est tout le contraire et c’est ça que j’apprécie, c’est pour ça que je ne viens plus qu’ici. Je l’ai fait découvrir à mon ami d’Avignon qui a lui aussi tout de suite adoré ! »

vendredi 27 juillet 2018 / La Marseillaise

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notre dossier

Un centre-ville à l’abandon ou en mutation ? 15,1%

Marie-Françoise Palloix : « Le centre-ville crève la bouche ouverte »

Le taux de vacance de locaux commerciaux dans le centreville, soit 676 commerces vides en 2013, selon un rapport du cabinet Cibles et Stratégies commandé par la ville de Marseille. Tapis Vert/Gambetta et Noailles sont les quartiers les plus touchés avec près d’un commerce sur trois vacant.

-12,8% La baisse démographique dans le centre-ville entre 2008 et 2013, selon l’Insee. Un risque de fragilité majeur pour les commerces de proximité.

150 000 mètres carrés de surfaces commerciales ont été créés par la ville entre 2001 et 2013.

17 272 euros par an, c’est le revenu médian des Marseillais en 2015, selon l’Insee. Un résultat moins haut (-14,55 %) que le niveau de vie médian de la France (19 785 euros).

Pour Marie-Françoise Palloix, conseillère (PCF) des 6e et 8e arrondissements, la mairie de Marseille laisse le centre-ville se mourir au profit de centre commerciaux en périphérie.

« Les petits commerces doivent rester des lieux de socialisation où les gens se rencontrent » Marie-Françoise Palloix, conseillère (PCF) des 6e et 8e arrondissements de Marseille

ous n’avons jamais été d’accord pour la création d’un énième centre commercial à proxiN mité des commerces de St Giniez et St Anne, déjà en difficulté. Avec l’opposition, nous étions frileux pour le projet des Terrasses du Port et on le voit les enseignes tournent. Au Prado, c’est la même chose ! J’y suis passée, l’impression que j’ai eue c’est que les gens y venaient pour se balader et visiter les lieux mais pas pour acheter. D’autant que ce projet semble s’inscrire dans un cadre plus vaste avec la cession possible du parc Chanot et du Palais des Congrès au privé. Et pendant ce temps là, les commerçants du

centre-ville crèvent la bouche ouverte ! Rue de Rome, rue du Rouet, rue de la République, rue St Férréol, ça fait mal au coeur de voir autant de rideaux fermés. Il faut repartir à la conquête de ces petits commerces. Ce sont des lieux de socialisation où les gens se rencontrent, pas uniquement des lieux de dépense. Avec l’arrivée de centre commerciaux, ce sont les noyaux villageois qui se meurent : plus personne ne se connaît, les gens se croisent pour aller consommer. La Mairie nous assure qu’elle va se servir de son droit de préemption, mais à quelle fin ? Yves Morraine, maire du 4e secteur, lui même l’a dit : « ce ne sera pas pour installer des kebabs ». Ça a le mérite d’être clair… J’ai du mal à comprendre la stratégie de la ville. D’un côté, elle refuse de préempter des sites historiques menacés de destruction comme la carrière antique du boulevard de la Corderie et de l’autre elle le peut pour éliminer les kebabs. » Propos recueillis par M.R.

Solange Biaggi : « On est 860 000, on peut absorber trois centres commerciaux » Solange Biaggi, adjointe (LR) au maire de Marseille chargée du commerce et vice-présidente du conseil départemental, défend la politique menée par la ville et assure qu’elle donnera des résultats. e centre commercial du Prado commence doucement à démarrer. Je pense qu’il est L encore trop tôt pour faire un premier bilan dé-

finitif. Ne cédons pas au « Marseille Bashing » avant même de connaître les résultats économiques. L’ouverture de ce centre s’inscrit dans la politique que nous menons avec Jean-Claude Gaudin depuis 2001, à savoir : faire revenir les grandes enseignes dans Marseille et non en dehors. On rattrape notre retard. A l’époque, une étude que nous avions commandée indiquait que Marseille manquait de 200 000 mètres carrés

de surfaces commerciales. On en a fait 150 000. On a 860 000 habitants, je suis persuadée que l’on peut absorber trois centres commerciaux. Et depuis 2014, on mène une politique de re dynamisation du centre-ville. Il n’y a qu’à voir le projet de réaménagement des Galeries Lafayette rue St Férréol, le succès de la Maison Empereur sur le Cours Saint-Louis ou de l’Épicerie Idéale rue d’Aubagne. Alors, c’est vrai que les commerçants de la rue de Rome ont beaucoup souffert à cause des travaux beaucoup trop longs du tram. Les comportements d’achat ont changé, ce n’est pas évident pour les commerçants, il faut se battre tous les jours. On est dans une période de redéploiement du commerce à Marseille. Mais à terme, je suis persuadé que notre politique va porter ses fruits. Je reçois tous les jours des personnes qui cherchent des locaux commerciaux. On va créer une nouvelle dynamique. »

« Je reçois tous les jours des personnes qui cherchent des locaux commerciaux. » Solange Biaggi, adjointe (LR) au maire de Marseille chargée du commerce

Propos recueillis par M.R.

Rue de Rome : « Le tram passe, les commerces trépassent » Trois ans après la fin des travaux de la ligne 3 du tramway, les commerçants de la rue de Rome ne parviennent toujours pas à relever la barre. l’agonie ». A la question de savoir comment se porte la rue de Rome, A la réponse fuse de la part d’un gérant

d’un magasin de vêtements en haut de la rue. Cela a le mérite d’être clair. Un coup d’oeil suffit pour s’en convaincre. Les rideaux fermés ou ornés de panneaux « local à louer » ne manquent pas tout au long de la rue. Certains commerces historiques ont dû fermer leurs portes. Kenzi, vendeur de vêtements importés d’Italie installé depuis 20 ans

En 2015, 65 commerces ont déposé le bilan. photo MR

: fermé. Hero, magasin de jeux-vidéo là depuis 20 ans : fermé. Premier responsable : le tramway dont les travaux de construction ont duré trois ans. « Là où le tram passe, les commerces trépassent », s’amuse Nabil Guelzim. S’il est d’humeur blagueuse, il n’en décolère pas pour autant. « Quand vous ouvrez un centre commercial tous les 100 mètres dans une ville qui n’en a pas besoin c’est sûr que ça n’aide pas », pointe-t-il. Le nouveau centre commercial du Prado est à moins de 2 km, pour autant d’arrêts de métro. Tout le monde subit une baisse d’activité. « On était quatre vendeurs il y a quelques années, aujourd’hui je suis seul », détaille Meziane Lassouane, gérant de Paris Mode. « Avant, les clients attendaient le matin devant le rideau.

Aujourd’hui, c’est moi qui les attends », ironise t-il. « L’âme d’une ville, ce sont ses commerçants non ? », interroge Sarah, responsable de Sara-Jane, un magasin de prêt-à-porter. « On reste optimiste malgré tout, on veut croire à un renouveau », ajoute t-elle. Du côté de la mairie, on ne fait pas le même constat. « La rue de Rome va mieux aujourd’hui qu’hier, j’y mets ma main à couper... Et même les deux », ose Yves Moraine, maire (LR) du 4 ème secteur. « Le centre-ville ne se meurt pas, il est en train de muer », défend-t-il. Ici on attend de voir ce que va donner le projet de rénovation de la place Castellane. En attendant, Nabil Guelzim observe le tram passer : « les gens ont définitivement perdu l’habitude de marcher ici ». M.R.