LES mixoLogiStES - Crystal Lounge

Flamber la branche au chalumeau ou au briquet à défaut. Placer la branche de romarin dans le verre. Cocktail préparé directement dans un tumbler sur glace.
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LES mixoLogistes Serge guillou

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Raphaël Trémérie

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Ben belmans

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LES mixologistes Par Michel verlinden | PHOTOS KRIS VLEGELS

Serge Guillou, le professionnel

Fort d’une expérience en béton, Serge Guillou est bien plus qu’un simple mixologiste. L’homme est de ceux qui élaborent les concepts qui électrisent les foules.

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46 ans, le moins que l’on puisse dire c’est que Serge Guillou est une valeur sûre du monde de la mixologie. Une force tranquille dont le savoir-faire et le calme rassurent. Ce n’est pas pour rien que de nombreux entrepreneurs font appel à ses services au moment d’ouvrir un nouvel établissement. C’est que Guillou est une sorte de « flying barman », de bartender sans attache, qui travaille pour son propre compte. Depuis huit ans, il a mis sur pied, barpartners, une société de consultance qui remplit diverses missions. Celle-ci s’appuie sur la très grande expérience que l’expert a glanée à travers le monde. Sorti de l’école hôtelière de Dinard, en France, il a mis les pieds dans l’univers des cocktails en accomplissant en 1986 un brevet complémentaire de barman. A cette époque, les amateurs sont peu nombreux,

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l’homme fait figure de pionnier. Par la suite, il roule sa bosse aux quatre coins de France. Très vite, il se spécialise dans les palaces, passant de la Savoie à la Côte d’Azur. Cet univers doré sur tranche lui plaît, il aime le goût de l’excellence qui y est cultivé. En 1993, il monte en Belgique pour ouvrir un bar au Conrad, à Bruxelles. Sa mission accomplie, il redescend dans le sud de la France, avant d’être rappelé au Méridien, toujours dans la capitale, puis à nouveau au Conrad où, pendant dix ans, il gèrera les deux bars et le restaurant. Autant dire qu’il blinde son curriculum. Sa réputation le précède désormais. On a fait appel à lui quand il s’est agi d’ouvrir le premier casino de Bruxelles, rue Duquesnoy, ainsi que le fameux hôtel Dolce La Hulpe. Dans un univers trop souvent flottant qui compte peu de véritables spécialistes, Serge Guillou incarne un professionnalisme hors-pair.

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La société qu’il imagine en 2006 est le résultat de son parcours qui lui a permis d’appréhender les lacunes dans son secteur. Plurielle, la structure de Guillou remplit un certain nombre de missions. Celles-ci vont de la conception d’une carte… jusqu’à l’agencement du lieu en lui-même. Cette mission implique la réalisation des plans en collaboration avec un architecte ou un décorateur, le choix des équipements et du matériel de travail, ainsi que la prise en compte des aspects fonctionnels et ergonomiques. Mieux, barpartners, se penche également sur l’aspect ressources humaines de l’ouverture d’un tel endroit. Il est alors question de transmettre le savoir : formation au métier, service des boissons (du choix de la verrerie à la parfaite méthode de travail), connaissance des produits (spiritueux, softs), création de cocktails (la mixologie proprement dite) et organisation d’une équipe. »

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Gingereater/Breakfast

at Tiffany’s

1,5 cl de jus de citron vert frais, 1 cl de sirop de sucre de canne Giffard, 2 cuillères de bar de marmelade d’orange, 2 cl d’essence de gingembre Marie Brizard, 3 cl de gin Beefeater 24, 7 cl Perrier, un zeste de lime et une tranche de gingembre frais

Envie de prendre la mesure de la Guillou’s touch ? Direction le SmoodS, à Bruxelles, au cœur de l’hôtel Bloom. L’endroit se présente comme un espace à l’intérieur duquel on peut « habiter » différentes atmosphères. L’agencement consiste en sept îlots à la décoration différente. On passe ainsi de l’ambiance Safari, hommage à l’Afrique, à l’atmosphère Spring qui fait la part belle à la fraîcheur du monde végétal. Les cocktails ? Redoutables et effectués dans les règles de l’art, depuis les grands classiques – excellent Cosmopolitan – aux créations emblématiques comme celle qui panache cava, vodka, citron vert et cerise marasquin. D’autres lieux belges sont à mettre au crédit de Serge Guillou, De Oude Vismijn ou Pakhuis, tous deux à Gand, ou encore feu le projet bruxellois Via Lamanna.

Le mixologiste possède encore d’autres cordes à son arc : il organise des évènements cocktails et des bars éphémères pour des entreprises et des particuliers, il met sur pied des ateliers… Sans oublier, une fonction de « bar supply » consistant à revendre du matériel professionnel – matériel et machines, accessoires, verrerie… Comme si cela ne suffisait pas, il ajoute encore la casquette de président de l’Union of Belgium’s bartenders (UBB), un poste clé, assumé depuis neuf ans, qui lui permet de défendre les couleurs nationales dans le domaine ainsi que jeter un regard éclairé sur les tendances du moment. A la question « quid après le gin » ? Il n’hésite pas une seconde à répondre : « les vermouths artisanaux ». Le challenge pour demain ? « Que les mixologistes bénéficient de la

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même visibilité que les chefs, un pari pas évident dans la mesure où leur savoir-faire n’épouse pas les rythmes et les formats du petit écran », analyse-t-il. Côté style, Serge Guillou s’interdit de coller à l’air du temps. Il préfère lui laisser faire ses maladies de jeunesse et garder une certaine distance en revisitant des classiques dans le sens d’une modernité intemporelle. Une tâche facilitée, selon lui, par la gastronomie qui contribue largement à faire voyager les matières premières intéressantes, du yuzu à l’essence de romarin.

www.barpartners.com

Remplir la grande timbale de votre shaker au deux-tiers de glaçons. Remplir le verre de glaçons. Verser les ingrédients, à l’exception du Perrier, dans la petite timbale de shaker. Egoutter les glaçons de la grande timbale et du verre. Shaker pendant une dizaine de secondes. En filtrant avec la passoire à cocktail, verser le tout dans le verre. Rincer la grande timbale au Perrier et en allonger votre cocktail. Agrémenter d’un zeste de citron vert, flambé si vous le souhaitez, et d’une tranche gingembre frais. Ce cocktail doit être préparé au shaker et servi dans un tumbler sur glace.

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Lime Forever 1,5 cl de sirop de sucre de canne Giffard, 1,5 cl d’essence de romarin Marie Brizard, 2 cl de lime cordial Vedrenne, 4 cl de gin Beefeater 24, 7 cl de Perrier, branche de romarin, angostura bitter orange (à utiliser en vaporisateur)

Dans un tumbler, sur glace, verser les ingrédients dans l’ordre de la recette, du moins alcoolisé au plus alcoolisé. Remuer avec la cuillère à mélange. Parfumer la branche de romarin avec l’Angostura bitter orange. Flamber la branche au chalumeau ou au briquet à défaut. Placer la branche de romarin dans le verre. Cocktail préparé directement dans un tumbler sur glace.

Vodka Sorbet 4 cl de vodka, 2 cl de sirop de pamplemousse rose ou d’orange sanguine, Perrier, un bigarreau au marasquin, glace carbonique

Dans une timbale de shaker, mélanger la vodka et le sirop d’agrumes. Verser dans le verre à cocktail. Saupoudrer de glace carbonique, préalablement écrasée en poudre très fine, la surface du cocktail. Mélanger en incorporant la glace au cocktail avec la cuillère de bar jusqu’à l’obtention d’une pâte onctueuse. Ajouter un bigarreau au marasquin. Allonger au Perrier Cocktail original dans sa préparation, nous utilisons de la glace carbonique pour élaborer un sorbet d’agrumes directement dans le verre de service. Il faut patienter pour le déguster !

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Pillier des chefs

LES mixologistes Par MICHEL VERLINDEN | PHOTOS KRIS VLEGELS

Raphaël Trémérie, gentleman du cocktail

A 29 ans, Raphaël Trémérie s’impose comme l’un des mixologistes les plus doués de sa génération. Ses armes ? Une technique infaillible et une créativité à toute épreuve.

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aphaël Trémérie, c’est avant tout un physique. Et pas des moindres. Avec son mètre quatre-vingt-sept et sa carrure de footballeur américain, l’homme en impose. Tiré à quatre épingles dans son costume bleu marine, on l’imagine dans un épisode de Mad Men à la façon d’un barman recevant les confidences alcoolisées de Don Draper. Cette stature avantageuse est prolongée par un visage harmonieux sur lequel se greffe un sourire ravageur. Get the picture ? Raphaël Trémérie, c’est aussi une gestuelle. A l’aise dans son corps, il possède un toucher incroyable. Regardez-le poser un verre sur le plan de travail et vous aurez l’impression de le voir accomplir un rituel aux contours sacrés. Il se meut comme

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un poisson dans l’espace étroit qui lui est imparti entre les bouteilles et les clients. Sa tête passe au ras des verres, ses mains caressent les citrons pour en extraire le jus, il flambe avec une dextérité peu banale. Raphaël Trémérie, c’est également un parcours. Sorti de l’école hôtelière du Cardinal Mercier, en Brabant wallon, il a roulé sa bosse dans plusieurs établissements prestigieux avant de rencontrer Serge Guillou (lire par ailleurs) au Conrad, à Bruxelles, et d’avoir la révélation du bar. Pour lui, « c’est un endroit magique, une sorte de compromis entre la salle et la cuisine, un endroit où l’on est en contact avec les gens mais où l’on doit également effectuer des gestes techniques et mobiliser sa créativité ». Raphaël Trémérie, c’est à n’en pas douter

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un lieu. Il est en symbiose avec le Crystal Lounge, au Sofitel Brussels Le Louise – où il a d’abord œuvré aux côtés d’Olivier Pichon qui s’est fait connaître pour avoir signé des « edible cocktails », des « cocktails à manger ». Avec son équipe, Raphaël Trémérie a réussi à en faire l’un de ces bars d’hôtels à l’anglosaxonne. On le sait, à Londres et à New York, ces lieux sont intensément fréquentés par la faune locale. En Belgique, ce n’est pas le cas, ils sont en général laissés aux voyageurs et aux businessmans de passage. C’est un tour de force que le mixologiste a accompli là : les jeudis, vendredis et samedis soirs, l’ambiance bat son plein. Les visiteurs viennent à 70 % de l’extérieur, du jamais vu chez nous. Pour ce faire, l’athlétique bartender peut s’appuyer sur une grammaire formelle qui en jette. »

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Le décor de l’établissement a été confié à Antoine Pinto qui sait y faire en matière de goût du jour. Dès l’entrée, le concepteur a frappé fort avec un majestueux lustre en cristal de 3,5 mètres sur 2. Cette pièce du XVIIIe siècle a été spécialement rééditée pour ce projet. Une touche exclusive qui inscrit cet aménagement dans la lignée d’autres basés sur les jeux de transparence – notamment l’hôtel Murano ou le fameux Cristal Room Baccarat, à Paris. Au Crystal Lounge, l’impression de fastes est renforcée par un imposant mur de dentelle à l’entrée. D’une surface de 130 m2, il a été taillé dans le Corian et se veut un hommage à l’artisanat médiéval bruxellois. Le lounge tourne, quant à lui, autour d’une pièce centrale : un bar en albâtre pur de 12 mètres de longueur rétroéclairé, ce qui rappelle l’idée de transparence. Ce mobilier s’impose

avec force au cœur de cet espace, véritable trône pour celui qui y officie. Mais Raphaël Trémérie, c’est avant tout une signature. Régulièrement récompensé par des médailles dans différents concours à travers le monde, il a une haute opinion de son métier. « Mon objectif, c’est de diffuser la passion que j’éprouve pour les cocktails. A l’heure où tout le monde se rue sur le gin tonic, mon plaisir est de travailler cet alcool autrement, emmener les clients vers d’autres saveurs. » L’une des chances de ce grand technicien du cocktail, c’est d’officier au sein d’un établissement qui lui laisse une grande latitude. « Pour notre nouvelle carte, celle d’hiver, car nous suivons selon les saisons, on a imaginé des mélanges à base de truffe et de foie gras. Avec le chef du restaurant, on a accès à des matières premières de choix, c’est un luxe de pouvoir m’en servir », explique

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Raphaël Trémérie. Autre caractéristique de l’esprit cultivé au Crystal Lounge : un certain sens du décalage, de la farce surréaliste. « On aime surprendre, être là où l’on ne nous attend pas, dans les associations, dans les ingrédients de base, jusque dans les contenants… », confie-t-il. Modeste, il rappelle aussi combien le fait d’avoir derrière lui une équipe – cinq barmans dont l’excellente Lucie Bonilli, meilleur apprenti de France Régional – est un avantage quand on a l’excellence en ligne de mire.

Crystal Lounge, 40, avenue de la Toison d’Or, à 1050 Bruxelles. Tél. : 02 549 61 44. www.crystallounge.be

Be 4 Belgium 3 cl de gin infusé à la cardamome, 1 cl de sirop litchi, 2 cl de crème de pêche, 3 cl de jus de cranberry

Elaboration : shaker Verre : long drink rempli de glaçons Allonger au Perrier Remarque : pour infuser du gin à la cardamome, laisser mariner plus ou moins longtemps (selon votre goût) du gin avec de la cardamome.

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The best is yet to come 1 cl de sirop de violette, 2 cl de purée de fraise, 2 cl Martini blanc

Elaboration : shaker Verre : long drink rempli de glaçons Allonger au Perrier

Pegasus 5 cl de cognac infusé aux pignons de pin, 1 trait d’angostura bitter, 1 zeste d’orange, 1 cl de liqueur de banane, 4 cl de canada dry, allonger au Perrier

Elaboration : directe Verre : long drink rempli de glaçons Remarque : pour infuser le cognac aux pignons, laisser mariner plus ou moins longtemps (selon votre goût) du cognac avec des pignons.

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LES mixologistes Par pieter van doveren | PHOTOS KRIS VLEGELS

Ben Belmans, en quête de perfection

Il fut le premier Belge à décrocher le prestigieux Professional Spirits Certificate au Wine & Spirit Education Trust (WSET), à Londres, en 2007. Aujourd’hui, de nombreux organisateurs d’événements font appel aux services de Ben Belmans, qui ouvrira bientôt une enseigne à Anvers.

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’il est un point sur lequel Ben Belmans ne tergiverse pas, c’est bien sur la définition du terme mixologiste : « Il figurait dans un livre de 1884. Avec le retour des cocktails dans les années 80 et la volonté du secteur de retrouver ses racines, le mot est réapparu. Il désigne une personne qui connaît les alcools forts et les préparations. Il existe des formations mais pas de diplôme car le titre n’est pas protégé. » A ne pas confondre avec le barman donc, « qui surveille le bar et n’a pas nécessairement besoin d’avoir des connaissances spécifiques ». Et de préciser toutefois qu’outre-Atlantique, les choses sont différentes puisque les barmans de grands hôtels jouissent souvent d’une position prestigieuse et que le « saloon keeper » était le personnage le plus important du village, au XIXe siècle. Dans sa jeunesse, Ben Belmans a suivi la filière latin-grec. Il espérait intégrer l’école flamande de formation théâtrale, le Studio Herman Teirlinck, mais sa famille s’y est opposée. Il s’est donc orienté vers des études de droit. C’est en tant que jobiste qu’il commence à travailler dans l’horeca, aussi bien en Belgique qu’à l’étranger, dans de petits bistrots comme dans de grandes brasseries, sur la plage ou dans de grands restaurants. Peu à peu, son intérêt pour les vins et le café grandit jusqu’à ce qu’en 2002, il entre « par

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hasard », pour la première fois, dans un véritable bar à cocktails. « L’atmosphère unique, les centaines de bouteilles... Tout cela m’a troublé, se souvient-il. J’ai senti que j’étais dans mon élément. » L’homme est autodidacte. Un peu par obligation d’ailleurs puisque, à l’époque de son apprentissage, il n’existait quasiment pas de formations – à moins de se rendre à Londres ou à New York et d’acquérir un savoir-faire en observant les pros. « La seule solution était donc de tracer soimême son chemin, rappelle le spécialiste. L’émergence des médias sociaux a depuis changé un peu la donne. Facebook notamment rassemble une communauté internationale de professionnels qui échangent des informations, avertissent les initiés quand il y a des dégustations… » Les salons permettent aussi de rencontrer des fabricants et de suivre des ateliers donnés par des experts. Londres est réputée pour ce type d’événements mais la manifestation la plus emblématique du secteur, le Tales of The Cocktail, se tient à la Nouvelle Orléans. Là-bas, des prix sont remis par un jury dont Ben Belmans est le seul membre originaire du Benelux. En 2007, le mixologiste décide de suivre un cursus au WSET, à Londres. Des sommités telles que Desmond Payne, « master distiller » du gin Beefeater et fin connaisseur en whisky, ou l’auteur et critique Dave Broom,

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y dispensent des sessions sur l’histoire, les méthodes de distillation… « Cette école donne le seul cours renommé en matière de spiritueux et de cocktails. Si vous prévoyez de postuler à Londres, vous êtes quasiment obligé d’avoir ce diplôme. J’ai été le premier en Belgique à l’obtenir. Aujourd’hui, une trentaine de compatriotes ont suivi la même voie, ce qui est déjà une belle avancée. » Ben Belmans déplore cependant le fait que sa profession soit typiquement masculine… même si cela change peu à peu comme en témoigne Hannah Van Ongevalle de The Pharmacy, à Knokke, qui a attiré l’attention sur notre nation lors du plus prestigieux concours de la discipline au monde, le Diageo World Class. Pour Ben Belmans, son job est avant tout une passion : « Je fais ce métier pour voir le sourire des clients qui dégustent mes créations. C’est un cliché de penser que nos mélanges contiennent beaucoup d’alcool. Comme en pâtisserie, chaque millilitre compte, tout est question d’équilibre, à l’instar d’un grand vin. » Le spécialiste cultive par ailleurs « l’amour » des ingrédients et le respect des saisons, son objectif étant clairement de se distinguer sur le plan créatif. Il constate toutefois un retour aux racines de son art, avec le come-back de recettes classiques, à la différence près que la qualité du spiritueux moyen en 2014 est nettement supérieure à celle de 1880. »

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Kentucky paloma Ingrédients : 40 ml de Bulleit Bourbon, 10 ml de Lustau Amontillado « Los Arcos », 30 ml de jus de pamplemousse rose, 10 ml de jus de citron vert, 15 ml de sirop de grenade, 45 ml de Perrier Pour la garniture : zeste de pamplemousse rose

Remplir le verre de glaçons, verser dessus tous les ingrédients en terminant par le Perrier, bien mélanger et décorer. Vaporiser l’essence du zeste en pinçant celui-ci à 10 cm du verre. Frotter le bord du verre avec le zeste. Verre : verre highball

« La tendance est à la simplification : nous partons de la force et de la complexité du produit de base pour mieux exprimer ses qualités, analyse-t-il. C’est ce que fait d’ailleurs Jamie Oliver en gastronomie aussi : « Cut the crap », retirer tout ce qui est superflu. Autrefois, les cartes de boissons étaient très variées et tendaient à démontrer l’étendue du savoir de leurs auteurs. Ils utilisaient beaucoup de gadgets et travaillaient un peu à la manière des adeptes de la cuisine moléculaire tels que Ferran Adrià. Tous ces falbalas prennent beaucoup de temps. Il est plus judicieux de se consacrer davantage aux gens. » Très apprécié en tant que consultant en Belgique et dans le reste de l’Europe, Ben Belmans (41 ans) ouvrira bientôt, avec son associé Dieter Van Roy, Bijou Balls & Booze, un bar 2.0 situé à Anvers. Le duo y

proposera des cocktails simples d’apparence mais préparés avec les meilleurs spiritueux. « Ne vous y trompez pas : c’est précisément dans cette simplicité que réside le défi », lance le mixologiste. En effet, lorsqu’il y a moins d’ingrédients, les détails prennent toute leur importance. L’endroit mettra l’accent sur les apéros, très tendance actuellement, avec une sélection de cocktails « highball », servis sur des glaçons en forme de billes et non de cubes pour un contrôle optimal de la température, et des classiques de type Manhattan et Dry Martini. Toutes ces préparations seront vendues dans des verres un peu plus petits que d’habitude, ce qui permettra de réduire le prix et d’offrir à la clientèle « une expérience analogue à celle de la dégustation de tapas ». Le troisième atout de la nouvelle institution sera sans conteste la sélection de spiritueux

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exclusifs servis au centilitre. « Ce concept, qui est unique pour le moment au niveau mondial, permet d’avoir un contrôle absolu sur la qualité de la boisson mais aussi de se consacrer plus aux visiteurs, affirme le propriétaire des lieux. Et c’est finalement de cela qu’il s’agit : la star du bar, c’est n’est pas le barman mais le client ! »

Bijou Balls & Booze, 20, Graaf van Egmontstraat, à 2000 Anvers. www.bensbar.be

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Milano-torino Ingrédients : 30 ml de Cocchi Storico Vermouth, 30 ml de Rabarbaro Zucca, 90 ml de Perrier Pour la garniture : zeste de citron

Remplir le verre de glaçons, verser dessus tous les ingrédients en terminant par le Perrier, bien mélanger et décorer. Vaporiser l’essence du zeste en pinçant celui-ci à 10 cm du verre. Frotter le bord du verre avec le zeste. Verre : verre highball

Perrier Saint-Tropez Ingrédients : 80 ml de Château Saint-Maur L’Excellence rosé, 10 ml de sirop de pastèque, 60 ml de Perrier Pour la garniture : zeste de pamplemousse rose, tranche d’orange

Remplir le verre de glaçons, verser dessus tous les ingrédients en terminant par le Perrier, bien mélanger et décorer. Vaporiser l’essence du zeste en pinçant celui-ci à 10 cm du verre. Frotter le bord du verre avec le zeste. Servir avec la tranche d’orange. Verre : copa (= verre à Bourgogne) ou verre highball

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LES mixologistes Par pieter van doveren | PHOTOS KRIS VLEGELS

Kristof Burm, le barman philosophe

Animé par la passion de son métier, Kristof Burm aime expérimenter. Et proposer des alternatives aux grands classiques, toujours en questionnant le client sur ses goûts personnels. « Un défi qui me plaît particulièrement », détaille le jeune homme.

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onnu pour ses prestations de barman au Cafe Theatre, à Gand, et au Josephine’s, à Anvers, Kristof Burm a également parcouru le Sri Lanka pour Bols Genever et Dilmah Tea, et y a tout appris sur le thé et les cocktails à base de genièvre. Il a par ailleurs séjourné à Londres pour Bombay Gin et en Ecosse pour Hendrick’s Gin mais travaille désormais pour Rodenbach Rosso, utilisant cette bière fruitée dans des mélanges qu’il fait découvrir au grand public via des événements, des ateliers et des soirées. « J’ai étudié les langues dans une école de secrétariat mais mon intérêt pour la mixologie a vite pris le pas, explique le trentenaire. J’ai donc suivi des ateliers en Belgique et à l’étranger – le choix est vaste en matière d’enseignements courts dispensés par des barmans de renom. Une autre alternative consiste à améliorer ses connaissances en consultant des collègues, en lisant la littérature spécialisée ou encore en effectuant des recherches sur le Web. Mais tout est une question de passion, de volonté de faire toujours mieux en proposant des choses innovantes. Dans mon domaine, ma réputation repose sur le temps que je consacre à découvrir ce que désirent mes clients. Je les questionne

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sur leurs préférences, puis je leur compose une boisson sur mesure. S’ils réagissent avec enthousiasme, genre : « Waouh, c’est exactement ce que je recherchais ! », mon objectif est atteint. Si malgré tout le résultat ne plaît pas, je propose quelque chose d’autre. Mais généralement, en posant les bonnes questions, il y a peu de risques que ça arrive.» Kristof Burm s’autoqualifie de barman, trouvant prétentieux le terme de mixologiste souvent utilisé dans la presse. « Ça évoque pour moi un docteur en médecine ayant étudié huit ans à l’université ! Pour ma part, cela fait une douzaine d’années que j’apprends mon métier… en le pratiquant. J’ai démarré au Cafe Theater, à Gand. Vraiment un bel endroit, qui m’a procuré une riche expérience. En fait, ces années étaient géniales. » Kristof Burm insiste sur la motivation qui doit animer tout barman en devenir. Selon lui, les candidats à la profession doivent avoir l’esprit ouvert, être avides d’emmagasiner de nouvelles connaissances et prêts à participer à des ateliers. Quand on lui demande quel cocktail il a le plus servi dans sa carrière, il répond sans hésitation : « Le mojito, j’ai bien dû le préparer un millier de fois. Le plus difficile est de ne pas se laisser gagner par la monotonie, c’est pourquoi j’aime proposer

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des alternatives, toujours en discutant brièvement avec le client et en me lançant le défi d’imaginer ce qui lui plaira peut-être plus que la version classique. Actuellement, je travaille avec une équipe pour créer six mélanges différents à base de bières, boissons qui se marient plutôt bien avec de nombreux autres ingrédients. Chacune d’entre elles a ses particularités : il faut goûter jusqu’à trouver la bonne combinaison. Pour commencer, vous devez partir de ce que vous connaissez le mieux : votre expérience. Puis vous développez mentalement une recette avant de la tester pour vérifier si le mélange fonctionne dans la réalité. Reste ensuite l’ultime mise au point. » Il a fallu ainsi une demi-journée au jeune homme et à ses collègues pour finaliser les recettes au Perrier proposées dans ces pages. Quand on lui parle de tendances actuelles, notre expert a une vision plutôt terre à terre de ce qui anime sa profession. « Tout change constamment, dit-il. De manière générale, on constate plutôt une revalorisation du passé, qui se traduit par un retour aux grands classiques, comme l’evergreen qui a été remis au goût du jour et est souvent présenté de manière contemporaine. Les barmans le préparent toutefois dans le respect de la tradition car un cocktail aussi célèbre n’est pas devenu incontournable sans raison. »

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Perrier mint julep Ingrédients : 4 cl Bourbon, 1 cl de sirop de sucre de canne, 8 branches de menthe, Perrier

Verser le bourbon avec le sirop de sucre de canne dans un silver julep cup (tasse argentée traditionnelle), ajouter la menthe et bien mélanger avec une cuillère de bar. Ajouter de la glace pilée et mélanger à nouveau. Compléter avec du Perrier. Finir avec une branche de menthe en décoration.

Beaucoup de versions de ce mélange datent de l’époque de la prohibition américaine, lorsque les bars n’étaient plus autorisés à vendre d’alcool et que les barmans ont commencé à bosser chez eux ou dans des speakeasies, des bars clandestins. Mais aujourd’hui tout va plus vite, tout est devenu éphémère : les combinaisons créées de nos jours n’existeront vraisemblablement plus dans cinq ans. » Kristof Burm n’hésite pas à mettre en parallèle l’évolution de son domaine d’activité et celle de la gastronomie, où les chefs reviennent aux bases et choisissent des produits régionaux ou de saison. « En tant que barman branché, vous pouvez très bien puiser votre inspiration dans les fruits ou même dans les légumes oubliés, préciset-il. L’imagination n’a quasi aucune limite.

Mais je pense que l’engouement pour le gin tonic n’est pas près de s’essouffler, bien qu’il y ait certainement quelqu’un quelque part qui travaille déjà à concevoir de nouvelles tendances. » Parmi celles qu’on pointe aujourd’hui, retenons le vermouth rouge, les indémodables mescal et tequila, ainsi que le genièvre qui fait son come-back dans les bars. Kristof Burn a récemment imaginé une recette à base de ce distillat, qu’il trouve intéressant à plusieurs points de vue. « Même un genièvre tonic est appréciable. Il y a trois ans, on m’en a servi un, à base d’alcool de première qualité dans lequel le parfum des baies était très marqué. C’était délicieux, je l’ai d’ailleurs confondu avec un gin tonic », se rappelle le spécialiste qui constate également une propension à servir désormais des boissons moins sucrées, le

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côté sirupeux et artificiellement coloré des préparations s’estompant. « Il y a aussi les clivages liés au sexe, ajoute-t-il. Les femmes préfèrent bien souvent des mélanges un peu plus doux et moins alcoolisés, même s’il ne faut pas généraliser car les breuvages amers se commandent désormais à tout va – sans doute une conséquence de plus de ce retour en force du gin tonic. L’introduction d’herbes et de fruits frais par les barmans de renom est aussi une source d’inspiration, mais cela demande plus de temps. » Un dernier conseil de pro pour tout qui désire préparer ses propres cocktails ? « Choisissez un verre adapté, utilisez de gros cubes de glace compacts et pas de petits glaçons qui fondent trop vite, expérimentez autant que vous le souhaitez, revisitez les classiques et… goutez beaucoup. »

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Perrier delight Ingrédients: 10 fraises des bois, 4,5 cl de Bombay Sapphire, 3 cl de jus de citron, 2 cl de sirop de sucre de canne, 4,5 cl de Rodenbach Rosso, 4,5 cl Perrier

Ecraser 10 fraises des bois dans un shaker. Ajouter 4,5 cl de Bombay Sapphire, 3 cl de jus de citron frais et 2 cl de sirop de sucre de canne et mélanger. Verser sur des glaçons dans un verre à long drink et achever avec 4,5 cl de Rodenbach Rosso et 4,5 cl de Perrier. Mélanger avec une cuillère de bar.

Perrier fusion Ingrédients : 4,5 cl Tequila Añejo, 9 cl de réduction de satsuma (sorte de mandarine), 9 cl Perrier Pour la réduction de satsuma : ¼ l de jus de satsuma fraîchement pressé, 0,7 l de vin blanc doux, 0,4 l de sirop de sucre de canne, 4 bâtons de cannelle

Mélanger tous les ingrédients de la réduction de satsuma et réduire à feu doux jusqu’à obtenir 0,8 l. Mettre le cocktail en place dans un verre à long drink avec des glaçons : verser 4,5 cl de Tequila Añejo et 9 cl de réduction de satsuma, puis ajouter 9 cl de Perrier.

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