Lettre d'information de la veille scientifique et ... - Laure Endrizzi

9 févr. 2010 - Chargée d'études et de recherche à la Veille scientifique et technologique ...... scientifiques, informatiques et médicales (12,5%), les sciences sociales (12%) et ... L'enquête du LEST (Laboratoire d'économie et de sociologie du travail) montre que les motivations varient égale- ...... BROWN Lorraine (2009).
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INSTITUT NATIONAL DE RECHERCHE PÉDAGOGIQUE Veille scientifique et technologique

Dossier d’actualité n° 51 – février 2010 vous abonner consulter le dossier en ligne

L’intégrale

La mobilité étudiante, entre mythe et réalité Par Laure Endrizzi Chargée d’études et de recherche à la Veille scientifique et technologique Bien que la mobilité soit une tradition académique déjà ancienne, sa nature a profondément changé depuis une vingtaine d’années. On est passé d’une mobilité largement dépendante des relations géopolitiques et culturelles entre les pays, motivée par la création d’élites internationales, à une mobilité perçue comme un levier de développement économique par les gouvernements et comme un avantage concurrentiel par les établissements. La capacité à attirer les étudiants étrangers s’inscrit ainsi non seulement dans des logiques économiques, mais devient également un facteur de rayonnement culturel et scientifique. Ce changement de perspective s’est concrétisé d’une part par le déploiement de nouvelles stratégies, tant au niveau des pays et des régions qu’à celui des établissements, et d’autre part par l’émergence de nouveaux discours sur les bienfaits individuels de la mobilité pour les étudiants. Dans ce paysage, l’Europe occupe une position singulière en ce qu’elle représente l’espace régional le plus avancé dans la formalisation de dispositifs en faveur d’une mobilité intra-régionale. Cet espace se construit progressivement, à la fois sur les initiatives de l’Union européenne et sur les lignes d’action développées dans le cadre du Processus de Bologne. Les 20 ans d’Erasmus en 2007 ont permis d’opérer un nouveau tournant vers des formes de mobilité plus diversifiées. Alors que la mobilité en Europe ne touche guère plus de 1% de la population étudiante dans son ensemble, une diversification de la mobilité et un élargissement de ses publics cibles apparaissent en effet de plus en plus nécessaires. L’étude réalisée par le Centre d’analyse stratégique (CAS) à l’occasion de la présidence française de l’Union européenne en 2008 (Bertoncini, 2008) ainsi que le livre vert Promouvoir la mobilité des jeunes à des fins d’apprentissage publié récemment par la Commission européenne (2009) se font l’écho de telles préoccupations nouvelles. Les 10 ans du Processus de Bologne en 2009 ont permis de dresser un bilan des progrès réalisés en vue de la construction d’un espace européen de l’enseignement supérieur (EEES), en particulier sur la généralisation de la structure en trois cycles LMD (licencemaster-doctorat) et sur celle du système d’accumulation et de transfert de crédits ECTS. Les ministres des 46 pays signataires ont franchi récemment une étape supplémentaire en fixant un objectif de 20% de diplômés devant bénéficier d’une période d’étude ou de formation à l’étranger d’ici à 2020 (Communiqué de Louvain publié en 2009). Malgré cette mobilisation, la construction d’une vision commune semble plus que jamais d’actualité, et la progression vers un EEES inclusif et dynamique génère de nombreuses tensions (BFUG, 2009). Comment articuler les lignes d’actions de l’Union européenne et celles des signataires de Bologne ? Comment promouvoir la coopération académique en évitant l’écueil d’une politique de compensation des financements publics par des droits de scolarité élevés ? Quelles populations étudiantes faut-il cibler en priorité, alors que la mobilité encadrée par des programmes d’échanges tels qu’Erasmus reste marginale par rapport à une mobilité dite spontanée, relevant de la seule initiative de l’étudiant ? Quels dispositifs d’accompagnement et de suivi convientil de mettre en œuvre pour les étudiants en mobilité d’études (sans enjeu de diplôme) et pour ceux dont la mobilité vise l’obtention d’un diplôme étranger ? Dossier d’actualité de la VST, n° 51 – février 2010 – Version intégrale 1

À ces interrogations sur le rôle des acteurs, s’en ajoutent d’autres sur les bénéfices réels ou imaginés de telles expériences. Le mythe semble en effet tenace : la mobilité contribuerait à l’accomplissement individuel, améliorerait les compétences en langue étrangère et la compréhension des autres cultures, permettrait d’enrichir le capital scolaire et favoriserait l’employabilité dans un marché du travail de plus en plus mondialisé. S’agissant plus spécialement de la mobilité européenne, elle aiderait de surcroît à promouvoir une certaine identité citoyenne et serait un élément moteur pour la construction de l’espace européen de l’enseignement supérieur. Devant à la fois l’actualité et l’ampleur de ces questionnements, il nous est apparu opportun d’examiner les apports de la recherche à la compréhension de la mobilité étudiante, dans la continuité des précédentes synthèses réalisées par la Veille scientifique et technologique sur les universités dans la globalisation (Rey, 2007) et sur le marché mondial de l’éducation (Cavet, 2009). La mobilité étudiante reste cependant un champ d’études relativement récent et peu institutionnalisé dans le sens où elle relève davantage d’un questionnement pluridisciplinaire qu’elle ne s’inscrit dans un champ disciplinaire aux contours bien dessinés. De fait, les références citées dans ce dossier offrent une variété d’analyses, à la croisée de la sociologie, de l’économie, des sciences politiques, des sciences de l’éducation et de la géographie, qui se nourrissent les unes des autres. Après une première partie qui permet de définir les enjeux et les formes endossées par la mobilité étudiante, l’examen des flux entrants et sortants nous fournit des éléments de contexte pour mieux cerner le paysage migratoire mondial. Dans un troisième temps, nous concentrons notre analyse sur les politiques de la mobilité dans l’espace régional européen, avant de nous rapprocher, dans les deux dernières parties, des points de vue des étudiants. La réflexion nous porte d’abord sur le chemin qui conduit du projet de mobilité à l’expérience – ou plus exactement des projets aux expériences – pour ensuite interroger les perspectives offertes à court et moyen termes par la mobilité, en matière de capital scolaire et d’opportunités professionnelles. 1. Mobilités et internationalisation | 2. Migrations estudiantines : un paysage marqué par des polarités | 3. Regards croisés sur les politiques de la mobilité en Europe | 4. Du projet de mobilité à l’expérience des étudiants | 5. La mobilité étudiante ouvret-elle des perspectives ? | 6. Bibliographie | 7. Compléments bibliographiques. Remerciements à Fred Dervin, Valérie Erlich et Stéphan Vincent-Lancrin pour leurs conseils avisés.

1. Mobilités et internationalisation La mobilité étudiante cristallise de nombreux enjeux et prend des formes de plus en plus diversifiées. Cette première partie cherche à préciser les contours de ces évolutions à l’œuvre, et s’intéresse plus globalement à l’internationalisation de l’enseignement supérieur, dont la mobilité n’est qu’une facette.

1.1 De quoi parle-t-on ? 1.1.1 Des enjeux renouvelés, des changements d’une ampleur inédite L’enseignement supérieur connaît depuis une cinquantaine d’années de profonds bouleversements qui, dans une conjoncture mondialisée, ne peuvent être imputables à la seule volonté des établissements d’enseignement supérieur (EES). La progression de l’anglais comme langue de la communication scientifique est sans précédent depuis la domination du latin à l’époque médiévale. De même, le développement des TIC et de l’Internet opère une véritable révolution dans les modes de production et de diffusion des connaissances. Enfin, l’internationalisation croissante des entreprises plaide pour davantage de « compétences internationales », pesant ainsi sur les relations formation-emploi. Dans un monde globalisé où la croissance économique est devenue étroitement dépendante du « capital humain », les enjeux de compétitivité attachés à la production et à la distribution des connaissances ne peuvent laisser indifférents les EES, confrontés également aux défis de la massification. La population étudiante mondiale a connu une augmentation de plus de 50% depuis 2000, atteignant plus de 150 millions d’étudiants en 2007. La croissance rapide des effectifs depuis 25 ans dans les pays de l’OCDE et depuis 10 ans dans les pays émergents, a ainsi conduit les EES à augmenter leurs recettes propres, en remettant en cause le modèle jusqu’alors dominant d’un enseignement supérieur gratuit ou largement subventionné (ISU, 2009). Dossier d’actualité de la VST, n° 51 – février 2010 – Version intégrale 2

Tendus vers la recherche de l’excellence et engagés dans une course aux bénéfices, parfois au détriment des valeurs qui fondent leurs actions depuis des siècles, les EES connaissent ainsi des évolutions profondes, marquées par l’émergence de nouveaux modes de pilotage et par une internationalisation croissante de la formation et de la recherche. Acceptée, choisie ou subie, la mondialisation s’affirme aujourd’hui comme une tendance lourde, qui fait de l’enseignement supérieur une activité éminemment concurrentielle, obligeant à de nouveaux arbitrages pour préserver sa dimension essentielle de bien public (Rey, 2007). Dans ce paysage mouvant, la mobilité étudiante cherche sa place. C’est un vecteur d’échange de connaissances et d’enrichissement des individus nécessaire à l’excellence scientifique, et un levier pour la compétitivité internationale des EES. C’est également, pour le pays d’accueil, un indicateur de l’image et de l’attractivité de son système d’enseignement supérieur et de recherche à l’étranger (Harfi et al., 2005).

1.1.2 Des mobilités étudiantes de plus en plus diversifiées Si un programme d’échanges tel qu’Erasmus contribue à dynamiser la mobilité étudiante en Europe, il ne saurait être représentatif des mouvements migratoires estudiantins, ni en termes d’effectifs, ni en termes de format. Différents critères peuvent intervenir dans leur qualification : –

selon le profil des étudiants : critère de nationalité versus critère de résidence (temporaire ou non) ou d’études antérieures (ailleurs ou non) ;



selon l’objectif poursuivi : mobilité de diplôme, mobilité d’étude, mobilité de stage, mobilité d’apprentissage par les pairs ;



selon qu’il s’agit d’une mobilité encadrée ou institutionnalisée (dans le cadre d’un programme d’échanges ou d’accords bilatéraux) ou d’une mobilité spontanée à la seule initiative de l’étudiant ;



selon qu’il s’agit d’une mobilité libre (encadrée ou spontanée), d’une mobilité imposée dans le cadre d’un diplôme donné ou d’une mobilité de contournement pour échapper aux restrictions d’accès en vigueur dans le pays de résidence ;



selon le moment auquel elle intervient dans le parcours des étudiants : mobilité horizontale (à l’intérieur d’un même cycle d’études) ou mobilité verticale inter-cycles ;



selon la durée du séjour : une année ou un semestre universitaires, quelques semaines ou quelques jours.

Si ces éléments donnent un aperçu de la complexité conceptuelle à laquelle se heurtent les études sur la mobilité étudiante, il convient à ce stade de se focaliser sur les deux critères qui sous-tendront principalement les réflexions de ce dossier : la distinction fondamentale entre mobilité d’étude (Erasmus) et mobilité de diplôme d’une part, et celle entre mobilité encadrée et mobilité spontanée d’autre part, qui l’une et l’autre donnent lieu à des expériences nécessairement différentes, même si les données empiriques créditant cette hypothèse sont insuffisantes. La définition retenue par l’Institut de statistique de l’Unesco (ISU) dans le dernier Recueil des données mondiales sur l’éducation (2009) et par l’OCDE dans l’édition 2009 des Regards sur l’éducation (2009) combine essentiellement trois éléments. Les étudiants en mobilité internationale sont définis comme « des personnes étudiant dans un pays étranger dont ils ne sont pas des résidents permanents ». Les deux principaux critères qualifiant la mobilité sont la « résidence permanente » et l’« enseignement antérieur ». La qualité de résident permanent ou habituel dépend de la législation du pays qui fournit les données en matière d’immigration et est pertinente lorsque l’entrée sur le territoire à des fins d’études est conditionnée par l’obtention d’un visa. Le critère de l’enseignement antérieur (quand le deuxième cycle de l’enseignement secondaire a été achevé dans un autre pays) est plus facilement utilisable quand il s’agit de traiter les étudiants mobiles à l’intérieur d’une zone de libre circulation telle que l’Union européenne. La « non-citoyenneté » est également utilisée mais ne constitue plus une condition suffisante. La croissance accélérée avec laquelle la mobilité étudiante s’est développée en l’espace d’une dizaine d’années, passant de 1,9 million en 2000 à plus de 3 millions en 2007, est inédite ; les projections pour 2020 avoisinent les 7 millions d’individus (OCDE, 2009 ; Vincent-Lancrin, 2009). Ces changements d’échelle se sont traduits par un glissement sémantique qui n’aura pas échappé aux spécialistes : les étudiants étrangers (foreign students) ont peu à peu laissé la place aux étudiants internationaux (international students) dans les écrits de l’OCDE et de l’Unesco. L’ouvrage de S. Slama en 1999, a été parmi les premiers à pointer la possible dérive, liée à l’avènement d’une nouvelle « élite migratoire », sous-tendue par cette évolution du vocabulaire (Slama, 1999). Cette croissance inédite a également mis en lumière les insuffisances des protocoles de collecte statistiques.

1.1.3 Des instruments de mesure en voie d’homogénéisation Les biais liés aux outils de collecte sont en effet nombreux et rendent, de l’avis de l’ensemble des experts, la comparabilité des statistiques internationales problématique, tant en termes d’instantané que de progression. Ils sont globalement de trois ordres : l’assimilation fréquente des étudiants étrangers aux étudiants mobiles et la non prise en compte des mobilités d’une durée inférieure à une année universitaire, l’une et l’autre générant des effets de sur-estimation et de sous-estimation des effectifs ; le troisième point concerne l’absence de données sur la mobilité spontanée, hors programme dédié. L’étude Eurodata publiée par l’ACA (Academic Cooperation Association) en 2006 offre une analyse argumentée de ces biais statistiques. Parmi les 32 pays pris en compte, seuls 10 présentent réellement des statistiques sur la mobilité étudiante. Dans les autres cas, et en particulier dans les pays où les taux de naturalisation sont faiDossier d’actualité de la VST, n° 51 – février 2010 – Version intégrale 3

bles, les données sont le plus souvent sur-évaluées du fait du critère de nationalité. Le différentiel peut atteindre les 40%, avec la présence d’étudiants déjà résidents avant de commencer leurs études supérieures ou ayant obtenu leur certificat de fin d’études secondaires dans le pays d’accueil. Le fait que les mobilités courtes, inférieures ou égales à une année universitaire, ne soient pas collectées est particulièrement préjudiciable dans le cas de l’Europe où les bénéficiaires Erasmus sont écartés. Cela semble d’autant moins cohérent que toutes les recommandations convergent en direction d’une intensification des mobilités courtes (Kelo et al., 2006). Tous les programmes de collecte statistique au niveau international, qu’il s’agisse des données UOE (Unesco, OCDE, Eurostat) ou de celles collectées dans les pays IEM (Programme des indicateurs de l’éducation dans le monde) prennent en compte ces difficultés, et œuvrent pour une sensibilisation des pouvoirs publics au caractère multiforme de la mobilité étudiante. En 2005, les méthodes de collecte utilisées par les organismes internationaux ont ainsi été révisées pour substituer à la notion d’« étudiants étrangers » celle d’« étudiants internationaux » basée sur le critère de « résidence permanente ou habituelle ». Très récemment, l’OCDE a franchi une étape supplémentaire en commençant à reconstruire ses séries sur la base des étudiants étrangers inscrits pour l’équivalent d’un semestre à temps plein (Vincent-Lancrin, 2009). Le protocole de collecte mis en œuvre par l’Institut international d’éducation (IIE) aux États-Unis tient également compte des mobilités courtes, comme en attestent les rapports annuels « Open doors » produits depuis 1949 (IIE, 2009).

1.2 Essor de l’enseignement supérieur transnational Bien que se développant à un rythme élevé, cette mobilité étudiante touche, somme toute, des publics limités : à peine 2% de la population étudiante dans le monde. Parallèlement, les stratégies des établissements pour attirer les étudiants étrangers se sont très nettement diversifiées depuis dix ans et la coopération transnationale s’est intensifiée. Ainsi, au-delà de la mobilité des personnes, les programmes d’études s’internationalisent, via des partenariats académiques et l’usage de l’anglais comme langue d’enseignement ; et les établissements eux-mêmes délocalisent une partie de leurs activités, via la signature de contrats de franchise ou l’ouverture de campus délocalisés, dans le but de gagner de nouveaux publics. Ces nouvelles formes de coopération, marquées par des logiques d’import-export, sont regroupées par l’OCDE sous le terme d’« enseignement supérieur transnational » (cross-border education) (CERI, 2008). Entendu comme « le déplacement des acteurs, des programmes, des fournisseurs, des cursus, des projets, et des activités de recherche et des services liés à l’enseignement supérieur, au-delà des frontières juridictionnelles d’un pays », cet enseignement supérieur transnational combine une internationalisation de l’offre, réelle ou virtuelle, et une mobilité géographique des étudiants, et s’incarne dans des stratégies nationales et institutionnelles variées (OCDE, 2009).

1.2.1 Quelles stratégies pour l’internationalisation ? Certains pays développés rivalisent pour attirer un plus grand nombre d’étudiants ou pour accroître leur présence institutionnelle à l’étranger, en négligeant parfois de soutenir la mobilité de leurs propres étudiants et de favoriser l’accueil de programmes d’études étrangers. D’autres pays, essentiellement d’Afrique, misent traditionnellement sur la mobilité sortante, et comptent plus de 30% de leurs effectifs nationaux partis étudier à l’étranger. D’autres encore investissent massivement dans des politiques d’incitation pour attirer des établissements étrangers prestigieux sur leur territoire national : c’est le cas de certains pays d’Asie ou du Moyen Orient. D’autres enfin développent une offre de formation en anglais pour séduire une clientèle plus internationale : c’est le cas dans une majorité des pays d’Europe du Nord (Altbach et al., 2009 ; CERI, 2008). L’analyse de S. Vincent-Lancrin, dans le World Migration Report de 2008, permet d’identifier plusieurs styles de stratégie d’internationalisation, qui ne sont pas exclusives les unes des autres, mais au contraire se combinent de façon complexe : un style plutôt traditionnel, basé sur la compréhension mutuelle (mutual understanding), et trois styles plus récents, qui ont émergé dans les années 1990 et sont largement dictés par des considérations économiques : migration qualifiée (skilled migration), production de revenus (income generation) et renforcement de capacité (capacity building) (Vincent-Lancrin, 2008). Les mobilités dans le cadre d’Erasmus sont typiques d’une approche de type « compréhension mutuelle », en ce que le retour dans le pays d’origine est au cœur même du concept. Des pays européens tels que l’Allemagne, la France et le Royaume-Uni ont tous adopté une approche de type « migration qualifiée », en promouvant activement leur enseignement supérieur à l’étranger et en adaptant leur législation en matière d’immigration pour mieux filtrer les candidats. Des pays tels que l’Australie et la Nouvelle-Zélande, ainsi que certaines provinces du Canada appliquent une stratégie de type « production de revenus », le plus souvent caractérisée par un financement intégral de la scolarité par les étudiants ; cette stratégie fonctionne également dans certains pays d’Europe (Danemark, Pays-Bas, Royaume-Uni) pour les non-ressortissants de l’Union européenne. Enfin, la stratégie basée sur le « renforcement des capacités » encourage activement l’importation de services d’enseignement supérieur pour former sur place cadres et main d’œuvre qualifiée ; elle s’est particulièrement développée en Asie du Sud-Est et en Asie Centrale (Vincent-Lancrin, 2008). Peu de données sont toutefois disponibles pour soutenir l’hypothèse que ces diverses stratégies constituent un véritable levier à la fois pour le développement politique et économique du pays et pour le renforcement de l’enseignement supérieur, en particulier dans les pays où les ressources nationales sont insuffisantes. Si l’expérience de la Malaisie semble concluante, l’impact d’une offre étrangère s’est avéré plus problématique, en Afrique du Sud par exemple, où la majorité des agréments n’ont pas été renouvelés et les accords de franchise ont été interdits. Si la fuite des cerveaux vers les pays en développement constitue par Dossier d’actualité de la VST, n° 51 – février 2010 – Version intégrale 4

ailleurs un risque bien réel, elle reste tout autant difficile à mesurer que les bénéfices potentiels d’une émigration qualifiée (CERI, 2008). Ces phénomènes d’internationalisation s’accompagnent partout dans le monde d’une progression importante de l’offre privée qui va de pair avec la « privatisation » des valeurs évoquée précédemment. Si elle est susceptible d’élargir l’accès à l’enseignement supérieur, cette offre peut également favoriser la prolifération de programmes de moindre qualité et l’essor d’activités lucratives peu scrupuleuses, voire frauduleuses (Hallak et al., 2009). Aujourd’hui, 30% des étudiants sont inscrits dans le privé. Cette proportion peut dépasser les 70% dans certains pays d’Asie où l’enseignement supérieur privé constitue traditionnellement le modèle dominant (Indonésie, Japon, Philippines, Corée du Sud) (Altbach et al., 2009). De même, l’adoption explicite d’une approche visant à mobiliser des recettes pose question : en Australie, les exportations de services d’enseignement ont connu un essor tel depuis les années 1990, qu’elles constituent aujourd’hui le deuxième poste d’exportation dans le domaine des services, alors que dans le même temps l’aide publique à l’enseignement supérieur a drastiquement diminué (CERI, 2008).

1.2.2 Quelle assurance qualité pour l’internationalisation ? Malgré ces questionnements, l’essor de l’enseignement supérieur transnational a attiré l’attention des pouvoirs publics et des organismes internationaux sur l’importance de l’assurance qualité et de la réglementation de l’offre privée. Il s’agit à la fois de protéger les consommateurs de prestations d’éducation médiocres et d’encourager les EES à développer l’excellence. Un cadre réglementaire possible réside dans les accords commerciaux internationaux négociés par l’OMC. L’Accord général sur le commerce des services (AGCS, en anglais GATS, General Agreement on Trade in Services) offre en effet un cadre juridique exploitable en matière de libéralisation des services d’éducation, susceptible d’améliorer le climat d’investissement. Malgré des incertitudes, l’AGCS aide à réglementer plusieurs types de coopération relevant d’un enseignement transnational, tout en offrant suffisamment de souplesse pour être adapté aux spécificités des contextes nationaux (CERI, 2005). Mais cette approche n’est pas unique. D’autres instruments existent, basés sur une conception plus qualitative de l’enseignement supérieur transnational, même si leurs usages restent largement méconnus. G. Haug, dans un exercice de prospective sur l’avenir d’Erasmus, rappelle les jalons posés par le programme IQR (Internationalisation Quality Review Programme) développé conjointement par l’OCDE et l’ACA (Academic Cooperation Association) à la fin des années 1990. Il signale également les travaux du CHE (Centrum für Hochschulentwicklung) en Allemagne, dont une liste d’indicateurs publiée en 2007 (Haug, 2009). Les phénomènes d’internationalisation rendent en effet plus urgente l’adoption de normes internationalement reconnues, en particulier en matière d’harmonisation des formations et de reconnaissance des diplômes. Car une approche basée sur des accords commerciaux présente potentiellement nombre de contradictions avec l’action publique en général, voire rend illégaux certains mécanismes d’assurance qualité, comme l’ont souligné les experts du Mobility Coordination Group de Bologne dans leur rapport 2009 (BFUG, 2009). Dans cette perspective, des Lignes directrices OCDE / Unesco pour des prestations de qualité dans l’enseignement supérieur transfrontalier (2005) ont été définies pour fournir un cadre de réflexion dédié et soutenir les pouvoirs publics dans la mise en œuvre d’une démarche qualité (CERI, 2008). Ces Lignes directrices font consensus auprès du Groupe de coordination de la mobilité de Bologne, qui en reconnaît la complémentarité par rapport aux instruments déjà mis en place à l’échelle européenne : la Convention de reconnaissance de Lisbonne (1997), centrée sur la question de l’accessibilité, et les Standards and Guidelines for Quality Assurance in the European Higher Education Area (ESGs), adoptés par les ministres de Bologne lors de la Conférence de Bergen en 2005 (BFUG, 2009). Les conclusions du séminaire de Bologne organisé par l’ENQA (European Network for Quality Assurance in Higher Education) à Londres en décembre 2008, vont dans le même sens, reconnaissant que les Lignes directrices de l’OCDE et de l’Unesco offrent de solides fondations pour développer une culture de l’assurance qualité aux niveaux national et institutionnel en matière d’internationalisation (ENQA, 2010).

2. Migrations estudiantines : un paysage marqué par des polarités Les efforts récents en vue d’homogénéiser et d’affiner les indicateurs de la mobilité vont dans le sens d’une meilleure comparabilité, mais la répercussion sur les données primaires est loin d’être généralisée. Malgré ce manque d’homogénéité, l’analyse des flux migratoires est indispensable à une appréhension de la mobilité étudiante. Deux sources seront ici essentiellement utilisées : – la dernière édition du Recueil de données mondiales sur l’éducation de l’Unesco (ISU, 2009) ; – l’édition 2009 des Regards sur l’éducation : Les indicateurs de l’OCDE (OCDE, 2009). Ces deux publications s’appuient sur un même corpus statistique, provenant de l’exercice UOE de collecte réalisé par l’OCDE en 2008 avec pour référence l’année académique 2006-07, et compilant des données primaires non homogènes (cf. annexe 3, indicateur C2 pour plus de détails). L’ISU pour sa part exploite, en plus des statistiques UOE, des données en provenance de 153 pays dans le monde, incluant les pays hors de la zone OCDE, partenaires ou non. Les analyses tendancielles 1999-2007 sont basées sur le nombre d’étudiants étrangers car les séries chronologiques pour les étudiants en mobilité ne sont pas disponibles. Dossier d’actualité de la VST, n° 51 – février 2010 – Version intégrale 5

2.1 Les principales tendances migratoires Avec des effectifs qui ont été multipliés par plus de trois en trente ans, on pourrait croire à un phénomène de masse. Pourtant, la mobilité étudiante ne touche en réalité que 2% de l’ensemble des étudiants dans le monde en 2007. Les mouvements migratoires pointent en grande majorité vers les pays les plus développés : plus de 80% des flux sont à destination d’un pays (membres ou partenaires) de la zone OCDE. Mais les polarités s’agissant des régions d’origine sont fortes : les flux partent globalement d’Asie à 50%, d’Europe à 25% et d’Afrique à 10%. Les analyses récentes dévoilent trois grandes tendances : –

tout d’abord l’essor de la mobilité intra-régionale, caractérisée par le fait que les étudiants en mobilité ont davantage tendance à rester au sein de leur région d’origine : l’Europe est à ce titre particulièrement exemplaire avec 80% d’étudiants sortants qui choisissent un autre pays d’Europe, représentant 40% de l’ensemble des étudiants mobiles dans cette région ;



ensuite, l’émergence de nouvelles destinations qui viennent concurrencer les « poids lourds » et favoriser une plus forte dispersion des étudiants dans l’espace mondialisé de l’enseignement supérieur ;



enfin, l’émergence de zones d’attraction par domaines d’études, permettant donc d’identifier des pratiques de mobilité différentes selon les destinations, en particulier selon que le pays d’accueil est ou non anglophone (ISU, 2009 ; OCDE, 2009).

2.2 Évolution des effectifs d’étudiants étrangers et principaux pays d’accueil Si spectaculaire soit-elle en valeur absolue, la progression de la mobilité reste proportionnellement stable depuis 1999, de l’ordre de 2% de la population étudiante globale, et conforme à l’augmentation globale du nombre d’étudiants, à laquelle tous les pays se sont trouvés confrontés ; ce sont toutefois les changements intervenus en Asie qui ont le plus pesé dans l’évolution statistique récente au niveau mondial. L’analyse de la mobilité étudiante par pays confirme la convergence des flux vers les pays développés : ÉtatsUnis (20%), Royaume-Uni (12%), Allemagne (9%), France (8%) attirent à eux quatre la moitié des étudiants en mobilité dans le monde. Les chiffres dévoilent toutefois une diminution de parts de marché du côté des États-Unis, du Royaume-Uni et du Canada, avec en parallèle une progression importante de l’Australie (7%) puis de la Nouvelle-Zélande (2%) en tant que pays d’accueil. On assiste donc depuis une dizaine d’années à une diversification des destinations choisies par les étudiants expatriés. Le fléchissement le plus sensible est observé aux États-Unis, dont les parts de marché sont passées de 25% à 20% sur cette même période. Autrement dit, si un étudiant en mobilité sur quatre choisissait les États-Unis en 1999, un sur cinq opte en 2007 pour cette destination. Cette baisse relative peut être corrélée au renforcement des conditions d’entrée à la suite des attentats du 11 septembre 2001 et aux opérations marketing de plus en plus efficaces des établissements de la région Asie Pacifique. Inversement, certains pays d’accueil traditionnels tels que l’Australie, la France, l’Italie, le Japon et l’Afrique du Sud ont vu leur part d’étudiants entrants progresser, alors que d’autres destinations populaires tendent à émerger (Chine, Corée du Sud et Nouvelle-Zélande). Proportionnellement, ce sont les petits pays qui accueillent davantage d’étudiants étrangers : les étudiants internationaux aux États-Unis représentent au final moins de 4% de l’ensemble des étudiants inscrits dans les EES américains, contre près de 20% en Australie, 15% au Royaume-Uni, 14% en Nouvelle-Zélande et en Suisse, 11% en Allemagne et en France. Enfin, des variations fortes peuvent être observées d’un pays d’origine à un autre, selon la plus ou moins forte dispersion des étudiants sortants. Ceux originaires du Japon se concentrent sur un nombre restreint de destinations ; à l’inverse, les étudiants américains et de plus en plus ceux en provenance d’Inde, tendent nettement à se disperser dans un nombre plus important de pays.

2.3 Circulation des flux entre régions d’origine et régions de destination Alors que six pays concentrent plus de 60% de la mobilité entrante, une dizaine de pays d’origine comptent pour près de 40% de la mobilité sortante. D’après l’Unesco, les plus gros pourvoyeurs d’étudiants mobiles dans le monde sont en valeur absolue : la Chine (421 100), l’Inde (153 000), la Corée du Sud (105 300), l’Allemagne (77 500), le Japon (54 500), la France (54 000), les États-Unis (50 300), la Malaisie (46 500), le Canada (43 900) et la Fédération de Russie (42 900). L’analyse par régions montre que ce sont les étudiants originaires d’Asie (50%), puis d’Europe (25%) qui constituent le gros des effectifs d’étudiants en mobilité. Les étudiants en provenance d’Afrique comptent pour 10% de l’ensemble des étudiants mobiles, alors que ceux d’Amérique du Sud et d’Amérique du Nord représentent respectivement 5,4% et 3,8% des effectifs. Dans l’ensemble, plus de 30% des étudiants en mobilité dans un pays membre de l’OCDE sont ressortissants d’un autre pays membre de l’OCDE. Les évolutions récentes révèlent une forme de régionalisation des mobilités, particulièrement remarquable en Amérique latine et Caraïbes, où elle a augmenté de 12 points de pourcentage entre 1999 et 2007. Les étudiants européens en mobilité restent pour leur part à près de 80% dans leur région d’origine : autrement dit, plus de quatre étudiants européens sur cinq choisissent une mobilité intra-européenne. Si cette tendance reste relativement stable depuis 1999, le pourcentage est extrêmement fort si l’on considère qu’après l’Europe, les deuxième et troisième régions du monde à bénéficier d’une mobilité intérieure importante sont Dossier d’actualité de la VST, n° 51 – février 2010 – Version intégrale 6

l’Asie de l’Est et du Pacifique (dont Chine), d’une part, et l’Amérique du Nord, d’autre part, avec respectivement 42% et 39% d’étudiants. La tendance est en revanche totalement inversée en Asie du Sud et de l’Ouest (dont Inde), où la mobilité intra-régionale concerne moins de 2% des étudiants mobiles. Ainsi, si l’Europe et l’Amérique du Nord continuent globalement à être des destinations privilégiées pour des étudiants en provenance de toutes les régions du monde, les considérations linguistiques, la proximité géographique ou historique et la similitude des systèmes d’éducation sont autant de facteurs qui génèrent des concentrations de flux. Les étudiants allemands se concentrent en Autriche, les étudiants français en Belgique, les étudiants canadiens aux États-Unis, les étudiants chinois au Japon. Les réseaux migratoires influent également, comme l’atteste la concentration des étudiants portugais en France, des étudiants turcs en Allemagne et des étudiants mexicains aux États-Unis. Enfin, les aires d’influence du Commonwealth et de la Francophonie favorisent la mobilité en direction du Royaume-Uni et de la France (ISU, 2009).

2.4 Profils des étudiants en mobilité par niveau et domaine d’études À ces polarités en matière de flux entrants et sortants s’ajoutent des déséquilibres internes tout aussi significatifs : la ventilation des étudiants mobiles par niveau et par domaine d’études, basée sur la classification internationale de l’Unesco (CITE 97), offre un angle de vue essentiel si l’on se place dans une approche régulative. Ainsi 44% des étudiants en mobilité obtiennent un diplôme de premier cycle de type licence (CITE 5A) et 40% un diplôme de deuxième cycle de type master (CITE 5A avancé). La mobilité estudiantine au niveau doctoral est importante, avec 7% des étudiants mobiles qui achèvent un programme de type CITE 6. Elle reste en revanche peu développée dans le cas d’études supérieures courtes de type professionnel (CITE 5B), avec seulement 9% des effectifs d’étudiants mobiles diplômés. L’internationalisation s’avère donc moins marquée dans des formations supérieures professionnalisantes de type 5B que dans des formations académiques plus traditionnelles, où les équivalences de diplômes peuvent s’obtenir plus facilement. Dans ce schéma général, des pays tels que la Belgique, le Chili, l’Espagne et la Grèce font figure d’exception, avec au moins 30% des étudiants internationaux accueillis inscrits dans des formations supérieures de type 5B ; la proportion est également forte (supérieure à 20%) en Nouvelle-Zélande, en Corée du Sud et au Japon. Dans d’autres pays, les étudiants se répartissent dans des proportions relativement équivalentes entre des formations de type CITE 5A et de type CITE 6, ce qui semble aussi suggérer que la poursuite d’études entre le cycle M et le cycle D est importante : c’est le cas par exemple en Australie, en Autriche, au Danemark, en République slovaque, en République tchèque et en Suède. Enfin certaines destinations, telles l’Espagne et la Suisse, attirent un nombre élevé de doctorants, supérieur à 22% de l’ensemble des étudiants en mobilité. Ce phénomène s’observe également dans des pays tels que le Canada, les États-Unis, la Finlande, la France, le Japon, le Portugal, et le Royaume-Uni, où les effectifs d’étudiants inscrits dans des formations doctorales dépassent les 10%. Ces données peuvent s’expliquer selon les configurations nationales, par l’attrait des programmes de recherche proposés, et/ou par la volonté politique de recruter des étudiants à un stade avancé de leur parcours, dans le cadre plus large d’une politique d’immigration qualifiée. Selon les analyses de l’ISU, presque un étudiant en mobilité sur quatre (23%) était en 2007 inscrit dans une formation commerciale ou administrative. Les sciences constituent le deuxième domaine le plus populaire, attirant en moyenne 15% des étudiants mobiles. Elles sont suivies par ingénierie, production et construction, par lettres et arts et par sciences sociales et droit, domaines dont l’attractivité oscille entre 12% et 15%. Certaines variations sont sensibles selon le pays d’accueil, révélant de façon plus ou moins implicite quelques pôles d’attraction. Si elles arrivent effectivement le plus souvent en deuxième position après les formations commerciales et administratives, les formations en sciences, dispensées majoritairement en anglais, attirent plus d’un étudiant international sur six dans des pays tels que les États-Unis, le Canada, la NouvelleZélande, l’Islande, l’Allemagne, et la Suisse, mais moins d’un étudiant sur cinquante au Japon. Les sciences humaines et les lettres et arts semblent en revanche plus populaires dans les pays non anglophones. Ces deux domaines sont en effet choisis par plus de 20% des étudiants en mobilité dans les pays suivants : Allemagne, Autriche, France, Islande, Japon et Slovénie. Les étudiants inscrits dans des cursus commerciaux et administratifs, bien que présents partout, tendent à se concentrer sur quelques destinations privilégiées où ils représentent près de la moitié des étudiants mobiles (entre 45% et 57%) : Australie, Estonie, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas et Portugal. Les formations les plus demandées en Europe dans le domaine social et médical sont celles proposées dans des pays où les barrières d’accès sont moindres : en Belgique, en République slovaque, en Hongrie et en Pologne, les étudiants suivants ces formations représentent plus de 28% des étudiants en mobilité. Ces chiffres s’expliquent en grande partie par les politiques de quotas mises en place dans de nombreux pays européens, alors qu’une directive européenne prévoit la reconnaissance automatique des diplômes médicaux dans l’Union européenne. Les préférences exprimées par les étudiants varient également en fonction de leur région d’origine, dévoilant des besoins de formation ou des représentations contrastés, comme le montrent ces exemples de mobilité vers les États-Unis. Ainsi, les étudiants originaires d’Asie du Sud et de l’Ouest (dont Inde) ont choisi en 2007 à plus de Dossier d’actualité de la VST, n° 51 – février 2010 – Version intégrale 7

50% des programmes d’ingénierie, production et construction. Ceux provenant d’Amérique latine et des Caraïbes ont préféré à 30% les programmes de commerce et administration. Les domaines privilégiés par les étudiants d’Afrique subsaharienne étaient commerce et administration (26%) et santé et protection sociale (14%).

2.5 Quelles perspectives à moyen terme ? Dans une étude de 2007, l’OBHE (Observatory on Borderless Higher Education) distingue quatre groupes de pays (Verbik et al., 2007) : – les acteurs principaux, de langue anglaise, dominant largement le marché (États-Unis, Royaume-Uni et Australie) ; – les acteurs intermédiaires, recrutant dans un grand nombre de pays, avec une offre financièrement attractive (Allemagne et France) ; – les destinations susceptibles de gagner des parts de marché, mais recrutant dans un nombre restreint de pays (Japon, Canada et Nouvelle-Zélande) ; – les concurrents en émergence, dont les potentialités sont importantes (Malaisie, Singapour et Chine). La Chine, par exemple, dispose d’un potentiel largement inexploité, bien que son taux de recrutement d’étudiants étrangers ait progressé de plus de 200% depuis 2001, avec une large majorité d’étudiants en provenance de Corée du Sud et du Japon. Dans un contexte de concurrence accrue, les pays d’accueil seront de plus en plus amenés, à court et moyen termes, à faire preuve d’innovation pour développer leur attractivité. Les experts de l’OBHE estiment en effet que les pays qui faciliteront l’arrivée et l’intégration d’étudiants étrangers, par des initiatives liées à l’emploi et à l’immigration, seront plus compétitifs que les autres. Ceux qui prendront en compte les conditions de vie des étudiants sur place et s’attacheront à réguler les coûts associés à la mobilité, incluant les droits d’inscription et le logement, verront également leur compétitivité croître. Autrement dit, les axes de développement qui feront la différence pour les étudiants sont au nombre de trois : les procédures liées à l’immigration et au visa ; les coûts liés à la mobilité et l’installation dans un pays étranger ; la satisfaction des étudiants États-Unis égard à leur expérience sur place. La dimension « régionale » de ces recompositions n’est pas à négliger. Le zoom opéré sur les pays du Maghreb dans l’ouvrage dirigé par S. Mazzella est éclairant à cet égard. L’enquête du laboratoire méditerranéen de sociologie (LAMES) montre comment les pays du Maghreb s’adaptent face au Processus de Bologne et développent de nouvelles stratégies pour internationaliser leur enseignement supérieur. Si la création d’un espace universitaire euro-africain semble un horizon encore lointain, les renégociations à l’œuvre dessinent un espace de proximité à l’offre de plus en plus diversifiée et un espace d’accueil naissant pour des étudiants privilégiés d’Afrique subsaharienne (Mazzella, 2009). Si les incertitudes liées à la crise économique et financière peuvent renforcer ces dynamiques régionales, rien ne permet de croire que d’autres formes d’internationalisation (mobilité des programmes notamment) puissent constituer à court terme une alternative numériquement viable à la mobilité des étudiants. Dans le deuxième volume de la série « L’enseignement supérieur à l’horizon 2030 », S. Vincent-Lancrin propose trois scénarios d’évolution pour l’enseignement supérieur transnational : un premier scénario basé sur le renforcement des stratégies actuelles (et donc une logique de la différenciation) ; un scénario caractérisé par une convergence vers un modèle libéral commun ; et un troisième scénario qui verrait les économies dites émergentes triompher (Vincent-Lancrin, 2009).

3. Regards croisés sur les politiques de la mobilité en Europe Cette partie traite plus précisément des lignes d’action du Processus de Bologne et des contributions de l’UE-27 à la construction d’un espace européen de l’enseignement supérieur. Elle offre un panorama des différents dispositifs de soutien à la coopération existants et des principales tendances migratoires dans l’espace de Bologne et au sein du programme d’échanges Erasmus.

3.1 Processus de Bologne et contributions de l’UE-27 3.1.1 Le cadre d’actions de Bologne et ses outils L’engagement international en matière d’éducation et de formation se nourrit en Europe de la Stratégie de Lisbonne et surtout du Processus de Bologne lancé en 1999 qui fédère aujourd’hui 46 pays autour d’un projet commun : la création d’un Espace européen de l’enseignement supérieur (EEES). Les principaux instruments déployés, dans la perspective d’une dynamisation des mobilités académiques, sont la structure en trois cycles licence, master et doctorat (LMD) et la reconnaissance des périodes d’études avec le système européen de transfert et d’accumulation de crédits ECTS (European Credit Transfert System). Bien que sous-tendant toutes les réflexions depuis 1999, c’est à l’issue de la Conférence ministérielle des pays signataires de Londres en 2007 que la mobilité des étudiants et des personnels est intégrée explicitement aux objectifs mêmes du Processus de Bologne (Communiqué de Londres, 2007). Avec le récent Communiqué de Louvain, l’accent est mis sur le caractère exclusif de la mobilité offerte dans le cadre de l’EEES, et les ministres introduisent un objectif à atteindre dans les dix ans à venir : « In 2020, at least 20% of those graduating in the European Higher Education Area should have had a study or training period abroad » (Communiqué de Louvain, 2009). Dossier d’actualité de la VST, n° 51 – février 2010 – Version intégrale 8

Ce changement d’échelle s’enracine dans les conclusions du groupe de coordination sur la mobilité (Mobility Coordination Group, MCG), mis en place à l’issue de la Conférence ministérielle de 2007. Les experts plaident effectivement pour une démocratisation plus forte des pratiques (mainstreaming mobility), via une diversification des types de mobilité : il s’agirait d’offrir davantage d’opportunités de mobilité (courtes) intégrées aux programmes d’études (mobility windows) et de mieux réguler les mobilités dites de contournement (bypass mobility). Ils pointent cependant le déficit global d’engagement de la part de l’ensemble des acteurs, ministériels, territoriaux et institutionnels, et l’absence de cadre d’actions multi-stratégique, susceptible de soutenir une mobilité plus équilibrée, moins inégalitaire, basée sur une meilleure réciprocité des flux entre les pays de l’EEES (BFUG, 2009). Les avancées des pays signataires dans la mise en œuvre du Processus de Bologne sont très inégales d’un pays à l’autre, d’une mesure à l’autre, et ne gomment ni les cultures nationales, ni les cultures d’établissement. Les travaux de suivi du Bologna Follow-up Group (BFUG) et de l’Association européenne des universités (European University Association, EUA) notamment, montrent bien la diversité des interprétations, aux niveaux des États et des institutions. Concrètement aujourd’hui, la structure en trois cycles est en voie de généralisation dans une quarantaine de pays, avec un modèle dominant de 180 + 120 crédits ECTS (3 + 2 ans) (Eurydice, 2009). La dernière édition des rapports de tendance de l’EUA confirme l’engagement croissant des établissements dans la construction de l’EEES, indépendamment du cadre politique, impulsé ou non par les pouvoirs publics. Mais les interprétations du dispositif, en particulier s’agissant de la phase d’admission des étudiants en premier cycle, des articulations entre cycles et des différents types de qualifications offerts (académiques vs professionnelles), requièrent une vigilance particulière, si l’on veut préserver la compatibilité des systèmes (Crosier et al., 2007). Les progrès accomplis depuis 2007 semblent toutefois peu importants, au regard de la mobilisation forte des deux années précédentes, et les conclusions du rapport d’étape d’Eurydice sont mitigées. En l’état actuel des connaissances disponibles, l’impact de l’évolution des politiques nationales, à la fois sur la construction d’un Espace européen de l’enseignement supérieur et sur la dynamisation de la mobilité étudiante, reste très difficile à évaluer (Eurydice, 2009). À l’inverse, le rôle de catalyseur joué par Erasmus dans l’évolution des politiques d’internationalisation de l’enseignement supérieur a pu être mis en évidence (Vossensteyn, 2008).

3.1.2 Les dispositifs de soutien à la coopération et à la mobilité en Europe Les dispositifs de soutien à la coopération et à la mobilité sont multiples et il n’est pas dans l’objet de ce dossier de les recenser. On peut toutefois distinguer les dispositifs plurilatéraux intervenant à l’intérieur d’une même aire géographique, linguistique ou culturelle, visant à intensifier les échanges entre les pays participants, des dispositifs bilatéraux qui réglementent les échanges entre deux pôles ou entre un centre et une périphérie. Les dispositifs à vocation « plurilatérale » s’appliquent à l’échelle d’une aire géographique ou culturelle donnée : les pays de l’UE-27 + ceux de l’AELE dans le cas d’Erasmus ; les pays du nord de l’Europe avec le programme Nordplus : créé en 1988, il compte aujourd’hui plus de 10 000 bénéficiaires chaque année ; les pays d’Europe centrale et orientale avec le programme CEEPUS (Central European Exchange Program for University Studies), dont l’originalité réside dans ses modalités de financement : chaque pays signataire s’engage à offrir un minimum de cent « bourses mensuelles », sorte de monnaie commune indexée sur le coût de la vie et couvrant largement les frais à engager. Les dispositifs bilatéraux interviennent communément entre deux pays : les coopérations universitaires francobritanniques, par exemple, prennent des formes variées, comme l’atteste un récent rapport d’ambassade (Lane et al., 2009), et font l’objet d’échanges réguliers (séminaire 2010). Parfois ce sont deux aires géographiques qui sont concernées : l’Europe et les pays ACP (Edulink), l’Europe et l’Amérique latine (Alfa). C’est aussi le cas du programme Erasmus Mundus, qui favorise depuis 2004 la coopération entre l’UE et les pays tiers, en soutenant la mobilité extra-européenne et le développement de cursus intégrés de master et de doctorat. Dans d’autres configurations, la relation s’établit entre un pays et un ensemble de pays formant une unité géographique, culturelle etc. : entrent dans cette catégorie les programmes bilatéraux entre l’Europe et certains pays développés, et notamment le programme Atlantis EU-US avec les États-Unis : un rapport publié récemment par l’IIE rend compte des stratégies, de part et d’autre de l’Atlantique, en matière de Joint degree programs (deux ou plusieurs établissements délivrent un même diplôme) et de Double degree programs (deux ou plusieurs établissements délivrent deux ou plusieurs diplômes) (Kuder et al., 2009). Dans une certaine mesure, les coopérations développées dans le cadre de la Francophonie ou du Commonwealth correspondent aussi à ce schéma bilatéral. Certains dispositifs ciblent préférentiellement des étudiants d’un niveau donné, généralement avancé, ou inscrits dans un domaine d’études particulier. C’est, par exemple, le cas du programme de bourse d’excellence EIFFEL en France ou bien du programme franco-québécois Frontenac qui soutient la co-tutelle de thèses. Le programme européen Erasmus Mundus, qui propose 116 masters et 13 doctorats labellisés pour l’année 201011, est appelé à renforcer ses actions en matière doctorale. L’IASTE (International Association for the Exchange of Students for Technical Experience), pour sa part, propose à des étudiants inscrits dans un cursus en sciences, en technologie ou en architecture, d’effectuer des stages à l’étranger dans des entreprises prestigieuses. La mobilité post-doctorale fait également l’objet d’une attention particulière, avec notamment les actions MarieCurie et les initiatives prises dans le cadre du réseau Euraxess en soutien à la construction d’un espace euroDossier d’actualité de la VST, n° 51 – février 2010 – Version intégrale 9

péen de la recherche (EER). D’autres mesures interviennent dans un cadre plus général : c’est par exemple le cas du programme européen Tempus qui soutient la mobilité des personnels dans la perspective d’une modernisation des EES et d’une sensibilisation au Processus de Bologne. Certains dispositifs enfin ciblent spécifiquement d’autres institutions de formation initiale et/ou continue. C’est le cas des programmes de mobilité européens développés par Comenius dans le cadre de l’enseignement scolaire (40 000 élèves en 2006), par Leonardo da Vinci dans celui de l’enseignement et la formation professionnels (40 000 personnes en formation initiale et aussi 14 000 étudiants en 2006), et par Grundtvig dans celui de la formation des adultes, tous rassemblés avec Erasmus sous le Programme cadre Éducation et formation tout au long de la vie (Lifelong Learning Programme, LLLP) de la Direction générale de l’éducation et de la culture (DGEAC) de la Commission européenne (Commission européenne, 2009).

3.2 Les tendances migratoires dans l’espace de Bologne Le projet européen ADMIT (Higher Education Admissions and Student Mobility in the EU, 1998-2000) a constitué l’une des premières recherches transnationales visant à analyser la mobilité étudiante en Europe. Il a permis d’identifier des styles d’engagement divergents de la part des pays participants : Allemagne, France, Grèce, Royaume-Uni, Suède (Vaniscotte et al., 2003 ; West et al., 2002). Ces déséquilibres se sont-ils amenuisés dans l’Europe de Bologne ? Rien n’est moins évident. Depuis dix ans, des logiques d’import-export se mettent en place, offrant un paysage assez net de la circulation des flux. Malgré le sentiment général que la mobilité augmente, l’impact des mesures prises dans le cadre de Bologne semble encore limité, en comparaison des politiques d’incitation nationales et des caractéristiques socioéconomiques des étudiants (Crosier et al., 2007). Dénoncer le déficit de données disponibles sur la mobilité étudiante en Europe pourrait s’apparenter à un exercice de style, tellement le nombre d’études déplorant la faible sensibilisation des États à la construction d’indicateurs est important (BFUG, 2009 ; Eurydice, 2009). Corollairement, ce déficit s’avère bien évidemment préjudiciable à toute stratégie politique un peu ambitieuse, offrant un éclairage très partiel sur les facteurs susceptibles d’influencer les flux et sur l’efficacité des dispositifs d’incitation (Communiqué de Londres, 2007). Schématiquement, les études disponibles, aussi incomplètes soient-elles, font état d’une mobilité étudiante relativement réduite, et d’une mobilité intra-européenne forte malgré des différences très significatives d’un pays à l’autre. Dans cette configuration, les pays peuvent être répartis en cinq catégories : –

trois pays – l’Allemagne, la France et le Royaume-Uni – avec une forte mobilité entrante et une faible mobilité sortante ;



à l’inverse quelques pays, essentiellement d’Europe Centrale et Orientale, avec une faible mobilité entrante et une forte mobilité sortante (Macédoine, Croatie, Géorgie, Moldavie et Slovaquie, etc.) ;



quelques pays avec une très faible mobilité entrante et sortante, inférieure à 1% (Pologne, Russie, Turquie et Ukraine, etc.) ;



quatre petits pays – Andorre, Chypre, Islande et Liechtenstein – combinant de hauts niveaux de mobilité entrante et sortante ;



une majorité de pays présentant un certain équilibre en termes de mobilité entrante et sortante, mais avec des taux qui demeurent relativement bas (Eurydice, 2009).

Ce sont les données collectées au niveau international par l’OCDE et l’Unesco qui permettent de se forger une représentation plus précise de la mobilité européenne, entrante et sortante. Les tendances observées sont au nombre de trois (Commission européenne, 2009) : –

l’Europe occidentale représente une destination majeure à la fois pour les étudiants originaires de cette région (près de quatre étudiants mobiles sur cinq), et pour ceux d’autres régions (un étudiant mobile sur deux à l’échelle mondiale), accueillant 1,7 million d’étudiants en 2007 ;



les effectifs d’étudiants européens mobiles ont connu une hausse d’environ 50% depuis le début des années 2000, pour dépasser 500 000 étudiants en 2007 ; proportionnellement toutefois, le taux européen de mobilité vers l’étranger tend à diminuer, passant de 3,3% de la population étudiante en 1999 à 2,7% en 2007 ;



plus de 2 millions d’étudiants ont pris part au programme d’échange Erasmus depuis sa création en 1987 ; mais là encore, la proportion d’étudiants européens bénéficiant de ce programme tend à diminuer.

Avec trois fois plus d’entrants que de sortants, l’Europe confirme sa position dominante de région d’accueil, attirant au total près de la moitié des étudiants mobiles dans le monde (43%), soit en moyenne 7% de la population étudiante globale. Cette proportion dépasse les 11% en Autriche, Allemagne, Belgique, France, Royaume-Uni et Suisse. Ce sont les étudiants en provenance d’Inde et de Chine qui ont connu la plus forte progression, avec des effectifs qui ont été multipliés par six entre 2000 et 2007. Dans certains pays tels que la France et le Portugal, les étudiants provenant de pays extérieurs à l’Union européenne représentent plus de 80% des effectifs : une attractivité qui n’est pas sans relation avec le passé colonial de ces deux pays.

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Si trois étudiants européens sur quatre s’inscrivent dans un autre pays de l’UE-27, le Royaume-Uni fait très clairement exception, avec une mobilité sortante plutôt faible et plutôt tournée vers les États-Unis. La République tchèque et la Suède ont également plus de 20% de leurs étudiants mobiles qui choisissent les États-Unis (Commission européenne, 2009). La dernière étude publiée par Eurostudent a mis en lumière l’influence exercée par la proximité linguistique, culturelle ou géographique dans les décisions de mobilité : 94% des étudiants irlandais se rendent en effet au Royaume-Uni et 75% des albanais choisissent l’Italie (Eurostudent, 2009). Cette étude a également montré que 10% de l’ensemble des diplômés de l’UE-27 en moyenne n’avaient pas la nationalité du pays d’obtention de leur diplôme en 2006. À titre de comparaison, ce même taux est évalué à un tiers des diplômés en Australie et en Nouvelle-Zélande. Le plus fort taux en Europe est enregistré par le Royaume-Uni, où ces mêmes diplômés étrangers représentent 22% de l’ensemble (Eurostudent, 2009). La proportion d’étudiants sortants diffère fortement selon les pays. C’est Chypre qui domine très largement les flux sortants, avec 57% de sa population étudiante en mobilité. Le cas du Luxembourg, avec ses 80% d’étudiants mobiles est à considérer dans sa singularité : la mobilité y est en effet obligatoire pour tous les étudiants souhaitant obtenir un master. L’Islande, l’Irlande, la Norvège et la Suisse présentent également un taux élevé, supérieur à la moyenne européenne. Inversement, moins de 2% des étudiants originaires de Finlande, d’Italie, des Pays Bas, d’Espagne et du Royaume-Uni étudient à l’étranger (ISU, 2009). Cette mobilité imposée, évoquée avec le Luxembourg, existe également dans d’autres pays, sous d’autres formes. Dans les instituts polytechniques en Autriche par exemple, les étudiants sont tenus d’effectuer un semestre à l’étranger au cours de leurs études. Dans certains pays, la mobilité est requise pour celles et ceux qui font des études de langues vivantes. Les sciences politiques et le commerce international sont également des disciplines où la mobilité peut être imposée. Dans les cursus d’ingénieur en France, les étudiants sont très fortement encouragés à entreprendre une telle expérience, pour avoir le niveau d’anglais requis pour la diplômation.

3.3 Le cas du programme Erasmus Depuis son lancement en 1987, Erasmus s’est imposé comme le premier programme européen en faveur de la mobilité, avec des effectifs cumulés qui excèdent les 2 millions d’étudiants. Ses actions concernent à la fois la mobilité des étudiants (périodes d’études ou de stage), des enseignants (mission d’enseignement), et de l’ensemble des personnels des établissements d’enseignement supérieur (périodes de formation). Dépendant depuis 2007 du Lifelong Learning Programme (LLLP), successeur du Programme cadre Socrates, Erasmus a vu son champ d’actions s’élargir, pour soutenir davantage la coopération entre établissements. Les projets de développement curriculaire, Erasmus Curriculum Development Projects et les projets de coopération université-entreprise, Erasmus University-Enterprise Cooperation Projects, sont parmi les innovations majeures récemment introduites. Erasmus s’appuie également sur des dizaines de réseaux, académiques ou structurels, qui fonctionnent comme autant de think tanks pour faire évoluer l’offre de formation selon des standards plus internationaux. S’il est encore trop tôt pour évaluer la pertinence de ces activités innovantes, le programme Erasmus a collecté systématiquement depuis 1987 toutes les données relatives aux étudiants mobiles, offrant ainsi une base solide à l’analyse. Pour l’année de référence 2007-08, on compte plus de 162 000 étudiants mobiles via Erasmus, dont 155 000 en provenance de l’UE-27. Viennent s’ajouter à cette mobilité d’études, une mobilité de stages (20 000 étudiants), une mobilité d’enseignement (25 000 enseignants) et une mobilité de formation de formateurs (4 300 formateurs) (Commission européenne, 2009). Erasmus se caractérise donc par des effectifs relativement bas, moins de 1% des étudiants inscrits en premier cycle dans les pays de l’UE-27, pour un séjour d’une durée moyenne de 6 à 7 mois. Il recrute davantage parmi la population féminine : 60% des effectifs Erasmus en moyenne sont des filles. La destination privilégiée est l’Espagne, qui accueille 18% des étudiants Erasmus ; 14% vont en France, 11% en Allemagne, 10% au Royaume-Uni et 9% en Italie (Eurostudent, 2009). Bien que les données fournies par la Commission européenne et par l’agence Europe-éducation-formation France (2e2f) diffèrent légèrement, le palmarès des principaux pays d’accueil reste le même, et la ventilation dans les autres pays démontre une très forte dispersion : aucun n’accueille en effet plus de 5% des étudiants Erasmus. À cette faiblesse des effectifs, s’ajoute une croissance en voie de ralentissement. D’après le dernier rapport de la Commission européenne sur les objectifs de Lisbonne, les effectifs d’étudiants Erasmus augmentent désormais moins rapidement : + 2% en 2007-08 contre + 5% en moyenne les années précédentes. Malgré le nombre toujours croissant d’établissements participants, l’analyse statistique traduit certains déséquilibres qui fragilisent la philosophie globale du programme, basée sur la réciprocité et l’échange. Certains pays se distinguent par une mobilité Erasmus entrante particulièrement élevée (supérieure à 18% de leur population étudiante) ; c’est le cas pour l’essentiel des pays nordiques et de l’Irlande. D’autres pays en revanche, plutôt d’Europe Centrale et Orientale, ont un taux d’étudiants sortants au moins deux fois plus élevé que celui des étudiants entrants, et une mobilité entrante qui ne dépasse pas les 3% dans une majorité de cas. Enfin, des pays comme l’Autriche, la Belgique, la France et le Portugal présentent une configuration équilibrée, avec des taux d’entrants et de sortants comparables (Commission européenne, 2009).

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Si la ventilation par domaines d’études s’appuie sur une typologie propre, pas directement comparable à celle des données UOE, ce sont les études commerciales et celles de langues vivantes qui dominent nettement la mobilité Erasmus, avec respectivement 20% et 15% des étudiants mobiles. Viennent ensuite les disciplines scientifiques, informatiques et médicales (12,5%), les sciences sociales (12%) et les sciences de l’ingénieur et technologie (11%) (Erasmus statistics). En France, les effectifs sortants s’élèvent à près de 22 500 étudiants en mobilité d’études et 3 400 en mobilité de stage pour l’année 2007-08. L’Espagne et le Royaume-Uni sont nettement privilégiées, avec respectivement plus de 5 000 et plus de 4 000 étudiants français. La Suède occupe la cinquième position, avec près de 1 400 étudiants Erasmus français. Ces étudiants proviennent en priorité d’Île-de-France, de Rhône-Alpes, de NordPas-de-Calais et des Pays-de-la-Loire ; ils sont 30% à être inscrits en gestion d’entreprise, 16% en langues et philologie, 15% en ingénierie et technologie et 9% en sciences sociales (Agence 2e2f, 2009).

4. Du projet de mobilité à l’expérience des étudiants Les étudiants mobiles ne sauraient se caractériser uniquement par les flux dans lesquels ils sont comptabilisés. Dans la perspective d’une démocratisation de la mobilité, les études qui permettent de comprendre pourquoi certains étudiants sont mobiles et d’autres pas, en particulier en Europe où le choix relève dans une grande majorité des cas d’une décision individuelle, sont essentielles. Dans cette partie, sont abordés en parallèle les motivations qui composent les projets de mobilité et les freins d’une part, le vécu de cette expérience au regard des attentes et représentations construites et les mesures d’accompagnement et de suivi d’autre part.

4.1 Des projets aux motivations multiples L’enquête de l’OVE (Observatoire de la vie étudiante) sur les étudiants étrangers en France offre une vue contrastée des « projets de mobilité », nourris des origines sociales, culturelles et économiques des candidats. La figure de l’étudiant étranger émerge, « entre ceux qui héritent de leur participation à la globalisation par le haut, en raison de la position socio-économique et des prédispositions culturelles de leur famille, et ceux qui s’activent internationalement par le bas, grâce à des réseaux économiques et sociaux communautaires et solidaires ». Deux catégories de projets sont grossièrement distinguées : les projets qui s’inscrivent dans une logique de formation et/ou de recherche, et ceux, minoritaires, qui sont dans une perspective de découverte culturelle (Ennafaa et al., 2008a). En écho aux travaux de l’OVE. E. Terrier montre que les motivations, multiples, dépendent fortement de l’origine des flux : nord-nord ou sud-nord. Dans le premier cas, la mobilité est plutôt le fait d’actions institutionnelles, dans le second, elle s’explique davantage par une augmentation de la demande d’enseignement supérieur de la part des pays du sud et des pays émergents. Dans l’un, la mobilité se justifie par l’apprentissage de la langue et la découverte d’un autre environnement culturel ; dans l’autre, les projets privilégient la dimension professionnelle. Dans l’un enfin, les bénéfices touchent plutôt l’enrichissement culturel et l’épanouissement personnel, dans l’autre ils sont de nature plus professionnelle, la valeur du diplôme obtenu étant d’autant plus forte que ce diplôme est rare dans le pays d’origine (Terrier, 2009). Dans un ordre d’idée un peu différent, le rapport au diplôme et plus globalement la relation école - emploi peuvent, selon les pays, influer diversement sur les représentations de la mobilité. L’étude de Matti Lindberg (2009) montre ainsi comment en Allemagne et en Finlande, la mobilité dans les études correspond à un schéma de parcours dominant, couplée à une mobilité professionnelle faible dans les premières années suivant l’entrée sur le marché du travail. À l’inverse, au Royaume-Uni, les étudiants achèvent plus rapidement leurs études, mais la transition vers l’emploi est marquée par une plus grande mobilité professionnelle (Lindberg, 2009). L’enquête du LEST (Laboratoire d’économie et de sociologie du travail) montre que les motivations varient également dans le cadre d’une mobilité organisée. L’étudiant Erasmus français cherche plutôt à se distinguer dans une université massifiée, l’étudiant anglais envisage la mobilité davantage comme une expérience initiatique et l’étudiant italien souhaite échapper à une insertion professionnelle difficile. Si ces idéaux-types traduisent la diversité culturelle des usages du dispositif Erasmus, les ingrédients à l’origine de la décision sont souvent les mêmes : l’apprentissage d’une langue étrangère, d’abord, puis l’idée que le séjour augmente les chances de poursuivre dans une filière sélective, enfin des stratégies distinctives et promotionnelles (Ballatore et al., 2008). Dans l’espace européen de Bologne, ces projets, explicites ou non, se heurtent à différentes difficultés. Pour les candidats potentiels, les freins sont d’ordre économique, social, psychologique, mais aussi académique : la nécessité de terminer ses études rapidement, le fait d’occuper un emploi et de ne pas savoir comment gagner sa vie à l’étranger, les incertitudes liés au logement, le manque de compétences linguistiques et interculturelles, une réticence plus générale à entreprendre hors du milieu habituel de vie, etc. Si l’on exclut temporairement la question financière, développée dans la partie suivante, les freins relatifs aux conditions d’étude portent sur le manque de flexibilité des programmes, le manque de visibilité sur la valeur ajoutée du séjour et le déficit d’accompagnement linguistique (BFUG, 2009).

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4.2 Une décision individuelle motivée par une certaine rationalité 4.2.1 Le poids des contraintes économiques Si les programmes internationaux de coopération et accords bilatéraux entre établissements préfigurent en partie les migrations estudiantines, ils ne garantissent en rien une certaine égalité des chances. Les dispositions juridiques relatives au droit d’accès dans le cadre d’Erasmus n’incluent pas, par exemple, les conditions financières (allocations, prêts, etc.). De fait, la mobilité devient une activité essentiellement financée par les individus, ce qui rend la question du coût immédiat et du retour sur investissement cruciale (Varghese, 2008). Des frais de scolarité à géométrie très variable La question du coût des études s’apprécie dans un paysage classiquement composé d’une part des grands pays anglophones, avec des charges particulièrement élevées pour les étudiants, et d’autre part des pays d’Asie et d’Europe, avec des charges plus faibles, voire sans aucun frais de scolarité pour certains pays du nord de l’Europe. L’analyse de l’OBHE montre que, pour un même programme d’études, les frais de scolarité peuvent être jusqu’à douze fois plus élevés en Australie et au Royaume-Uni que dans des pays émergents tels que la Malaisie, la Chine et Singapour, et jusqu’à dix-huit fois plus aux États-Unis (Verbik et al., 2007). La plupart des pays membres de l’Union européenne pratiquent des droits de scolarité, subventionnés ou non, équivalents pour les ressortissants d’un autre pays membre et les ressortissants nationaux. En Finlande et en Italie, ce principe d’équivalence vaut également pour les étudiants en provenance de pays tiers de l’Union européenne, mais c’est exceptionnel : ces étudiants doivent généralement s’acquitter de la totalité des droits de scolarité (non subventionnés) et représentent donc pour les établissements une source significative de revenus (OCDE, 2009). La gratuité des études demeure marginale et tend, quoi qu’il en soit, à reculer. C’est pourquoi le Danemark, dont les droits de scolarité étaient intégralement subventionnés jusqu’en 2006, a introduit des droits payants pour les étudiants hors Union européenne et EEE. Depuis 2006-07, les seize länder allemands peuvent aussi prélever des droits d’inscription auprès de ces mêmes étudiants, sept d’entre eux l’ont déjà fait (OCDE, 2009). Le Royaume-Uni a radicalement modifié son système à la même période, pour offrir aux étudiants britanniques des facilités de paiement, dont les étudiants de l’Union européenne ne bénéficient pas. Les frais imposés aux étudiants hors Union européenne ne sont en revanche soumis à aucun plafond et peuvent s’avérer élevés dans certains établissements (Eurydice, 2009). Viable ou non, la gratuité, associée à l’existence de formations en anglais a très certainement contribué à la forte croissance du nombre d’étudiants étrangers enregistrée entre 2000 et 2007 en Finlande, en Islande, en Norvège et en Suède. Même si les droits de scolarité ne découragent pas forcément les candidats, la concurrence entre pays anglophones et entre formations anglophones joue très certainement à la défaveur des ÉtatsUnis et du Royaume-Uni (OCDE, 2009). Portabilité des aides financières et restrictions d’octroi L’impact des frais de scolarité est largement conditionné par les systèmes d’aide financière. Deux approches distinctes sont observées en Europe, d’après Eurydice : dans certains pays, nordiques notamment, les étudiants sont considérés comme des adultes indépendants et bénéficient d’un droit universel à une aide financière. Tous les autres pays pratiquent des aides différenciées, vers certaines catégories de la population étudiante, selon un critère de ressources financières, en Europe occidentale, ou selon un critère de performance académique, en Europe centrale et orientale. La plupart des pays disposent d’un système d’aide à la mobilité, qui consiste soit à garantir la portabilité des bourses et des prêts attribués, soit à développer des aides spécifiques, soit à combiner les deux approches. S’il n’est pas possible d’établir un lien de causalité directe entre les aides proposées et la mobilité effective des étudiants, il semble que l’absence d’aides financières et la faiblesse de la mobilité puissent être corrélées. La portabilité des aides financières s’accompagne en revanche de conditions d’octroi extrêmement variables, de nature à restreindre effectivement la mobilité plutôt qu’à la stimuler. Même si ces conditions semblent légères de prime abord, le cumul de plusieurs types de restrictions dans un nombre important de pays pose problème ; c’est par exemple le cas au Danemark, en Finlande, en France, au Portugal, en Roumanie et en Suède. Les restrictions les plus courantes sont liées au programme d’études en vigueur dans 21 pays, au temps passé à l’étranger (19 pays), à la progression dans les études (18 pays), au pays d’accueil (15 pays) et à l’établissement d’accueil (14 pays). Si l’on se place dans la perspective d’un EEES ouvert et inclusif en 2010, l’importance de ces restrictions, en particulier celles d’origine géographique, fait question. Implicitement, ne suggèrent-elles pas que suivre un cursus dans un autre pays n’apporte pas en soi une valeur ajoutée suffisante pour justifier une aide publique ? (Eurydice, 2009).

4.2.2 Le poids des contraintes administratives La libre circulation des personnes entre les pays d’Europe exerce à l’évidence une influence significative sur les flux migratoires alors que la mobilité intra-européenne constitue un phénomène unique à l’échelle mondiale. En comparaison, l’Accord de libre échange nord américain (ALENA), qui ne prévoit pas la libre circulation des personnes, ne semble pas influer sur le taux de mobilité interne en Amérique du Nord (OCDE, 2009). Dossier d’actualité de la VST, n° 51 – février 2010 – Version intégrale 13

D’après les experts du BFUG, deux types d’obstacles administratifs sont identifiés : d’une part, les difficultés à obtenir un visa et à effectuer une demande de permis de travail ; et d’autre part, celles liées à la diversité des systèmes de sécurité sociale et des statuts accessibles : pour les doctorants notamment, qui peuvent selon le cas être considérés comme étudiants, boursiers ou salariés (BFUG, 2009). En termes de politique d’immigration, les mesures prises par certains pays pour favoriser l’installation temporaire ou permanente d’étudiants en mobilité internationale influent sur leur attractivité. L’Australie, par exemple, permet aux étudiants diplômés dans ses universités de bénéficier d’un visa de séjour d’une durée de 18 mois après la diplômation, et offre des « points » de bonus pour l’obtention d’un nouveau visa aux étudiants effectuant des stages qualifiés ou suivant des cours d’anglais. Le Royaume-Uni, pour sa part, sélectionne en amont, notamment via des coûts particulièrement élevés en matière de visas, mais facilite l’accès à l’emploi des étudiants diplômés, en particulier dans les disciplines scientifiques et les sciences de l’ingénieur. Les permis joints, séjour + travail, délivrés en Allemagne et en France, facilitent la migration d’étudiants travailleurs (Verbik et al., 2007).

4.3 Quels profils d’étudiants pour la mobilité Erasmus ? Si, d’après les études quantitatives consultées, la rationalité économique est un facteur explicatif, un élargissement de la focale sur le profil des « étudiants voyageurs », ainsi qualifiés par E. Murphy-Lejeune dans sa thèse en 1998, permet de relativiser le poids des contraintes financières, du moins dans le cadre d’un programme d’études tel qu’Erasmus. Certaines tendances peuvent ainsi être dégagées, permettant de différencier la mobilité Erasmus d’une mobilité de diplôme ou d’une mobilité spontanée.

4.3.1 Un milieu familial plutôt privilégié Toutes les enquêtes de satisfaction auprès des étudiants européens, qu’elles émanent des structures associatives (ESN ; Eurostudent), des institutions européennes ou des agences nationales (agence 2e2f), s’accordent à souligner que le montant (fixe) des bourses Erasmus est insuffisant, même si les étudiants considèrent paradoxalement leur situation financière comme globalement satisfaisante. La question d’une bourse indexée sur le niveau de vie du pays d’accueil, voire prise partiellement en charge par ce même pays est régulièrement soulevée. D’après une enquête publiée par la Commission européenne, le niveau moyen de dépenses mensuelles en 2004-05 s’élève à 586 euros dans le pays d’origine et à 699 euros dans le pays d’accueil. La bourse Erasmus permet de combler la différence pour les étudiants assumant déjà un loyer dans leur pays d’origine, mais ne couvre que partiellement les dépenses supplémentaires générées par la mobilité quand l’étudiant loge habituellement chez ses parents. Dans un cas comme dans l’autre, le soutien de la famille est important : les revenus de l’étudiant mobile sont en moyenne composés à 37% d’une aide financière de la famille, puis à 30% de la bourse Erasmus (Soulo Otero et al., 2006). L’enquête 2006 du réseau European Student Network montre que 75% des étudiants ont bénéficié d’un appui financier de la part de leur famille, alors que 45% en provenance de Suède ont contracté un prêt avant le départ (Krupnik et al., 2007). D’une façon générale, les études confirment que les étudiants Erasmus proviennent plutôt d’un milieu favorisé, où le niveau d’éducation, la catégorie socio-professionnelle et le niveau de revenus des parents sont supérieurs à la moyenne. Ce sont toutefois les caractéristiques socio-économiques qui semblent les plus discriminantes, avec 60% des répondants qui ont au moins un parent cadre ou de profession intermédiaire, et 47% dont au moins l’un des parents a fait des études supérieures. A contrario, la proportion d’étudiants déclarant le niveau de revenus de ses parents équivalent ou inférieur à la moyenne européenne a augmenté, passant de 53% en 2000 à 62% en 2006, indiquant une baisse des inégalités (Soulo Otero et al., 2006). Pour autant, ce sont les contraintes économiques qui sont mises en avant pour expliquer la non-mobilité, essentiellement par les étudiants issus de milieux familiaux avec un niveau d’éducation plus faible. L’obstacle principal ici n’est pas tant le fait de perdre ou non certains avantages sociaux, liés notamment à la portabilité des aides financières, que de ne pas savoir mesurer le risque financier relatif aux frais supplémentaires à engager. D’une façon générale, indépendamment du milieu social d’origine, le manque d’informations sur les conditions de vie et d’études dans le pays d’accueil est considéré comme particulièrement préjudiciable. La peur d’être « retardé » dans leurs études et les doutes à l’égard de la validité des qualifications étrangères sont parmi les représentations les plus tenaces exprimées par les étudiants interrogés (Eurostudent, 2009). Deux autres traits caractéristiques émergent des analyses : l’étudiant Erasmus a un niveau de compétences élevé en langues vivantes et n’est pas un voyageur novice.

4.3.2 L’importance de la compétence en langues Les principales motivations des étudiants dans le cadre d’une mobilité Erasmus résident dans la valeur d’expérience et dans la pratique d’une langue étrangère. La compétence initiale, caractérisée par la familiarité avec la langue du pays d’accueil ou la langue d’enseignement du programme d’études choisi, n’est donc pas la seule à compter : la compétence à développer, éventuellement dans une perspective professionnelle, influe également sur la décision de mobilité. D’une manière générale, les étudiants Erasmus ont un niveau de compétence élevé en langue vivante et souhaitent faire fructifier ce capital : 75% se déclarent compétents dans trois langues, 32% dans quatre ou plus (Soulo Otero et al., 2006). L’enquête ESN montre que trois étudiants sur quatre ont suivi des cours de langue pendant leur séjour (Krupnik et al., 2007). Ces cours, facultatifs le plus souvent, ne sont pas toujours inclus dans le cursus « négocié » des Dossier d’actualité de la VST, n° 51 – février 2010 – Version intégrale 14

étudiants et ne bénéficient donc pas d’une validation au titre des crédits de transfert ECTS. En outre, certains pays rendent, de façon assez systématique, ces cours de langue payants : c’est par exemple le cas en Allemagne, en Autriche et en Belgique (Carapinha, 2009). Quel que soit leur niveau de langue initial, les étudiants sont en majorité favorables à un accompagnement linguistique intégré, qui permettrait a minima de se familiariser avec le métier d’étudiant dans le pays d’accueil. Car ce métier d’étudiant s’appuie sur des schèmes culturels intériorisés, rarement questionnés, qui génèrent des variations fortes dans la relation au savoir (Soulo Otero et al., 2006). Comme l’ont souligné C. Cavalla et C. Parpette lors d’un colloque organisé par l’université d’Artois et la CCIP, l’usage du français académique dans les écrits universitaires et la compréhension orale des cours magistraux, par exemple, demeurent des chantiers didactiques largement ouverts à l’expérimentation (Goes et al., 2007). S’ajoute à cet apprentissage formel de la langue étrangère un apprentissage plus informel, basé sur les relations interpersonnelles que les étudiants étrangers peuvent nouer sur place avec les autochtones. Dans cette perspective, le rôle joué par les associations étudiantes est fondamental, comme l’a souligné A. Nanaki dans sa thèse, les activités proposées représentant autant d’occasions de pratiquer la langue du pays d’accueil (Nanaki, 2009). L’importance des apprentissages linguistiques extra-scolaires (voyages, réseaux sociaux, autodidaxie, etc.) est également soulignée par R. Ennafaa et S. Paivandi dans l’enquête de l’OVE, une proportion non négligeable de leur échantillon ayant mentionné de telles pratiques de « perfectionnement » (Ennafaa et al., 2008a). D’une manière générale, la plupart des études, qu’elles soient quantitatives ou qualitatives s’accordent à reconnaître le rôle clé joué par la question linguistique dans les mouvements migratoires, en particulier en termes de compétence initiale. Le fait qu’un étudiant sur deux en 2007 menait ses études aux États-Unis, au RoyaumeUni, en Allemagne ou en France est significatif de l’influence de la langue d’enseignement dans le choix du pays d’accueil, démontrant la prédominance des langues les plus répandues telles que l’anglais, le français et l’allemand (OCDE, 2009). Cette influence de la compétence linguistique s’exerce aussi au niveau des logiques migratoires régionales. Le développement de la mobilité entre les pays arabes peut ainsi partiellement s’expliquer par la pratique d’une même langue d’enseignement au niveau de la sous-région. Les préférences des étudiants algériens, marocains et tunisiens pour la France, et des étudiants français pour la Belgique s’inscrivent également dans cette configuration (Varghese, 2008).

4.3.3 Un capital mobilité et un potentiel d’adaptation Les études relatives à la mobilité des étudiants européens mettent en évidence des profils sociaux et biographiques présentant certains points communs, expression d’un engagement social et professionnel plus marqué : ils ont plus souvent suivi des programmes conduisant à des études doctorales, ils se sont plus souvent engagés dans des organisations étudiantes ou bénévoles et ils ont plus fréquemment effectué des stages ou acquis d’autres expériences professionnelles pendant leurs études (Schomburg et al., 2008). Et ces étudiants en mobilité ne sont pas des voyageurs novices, comme l’a montré l’étude du LEST (Ballatore et al., 2008). D’une façon générale, l’existence d’un passé migratoire chez les étudiants mobiles, Erasmus ou non, et le cercle vertueux qui relie mobilités familiale, scolaire, étudiante et professionnelle, ont été mis en évidence par plusieurs études quantitatives (Schomburg et al., 2008 ; Wiers-Jenssen, 2009). La tentative du réseau ESN de mettre en évidence l’existence d’une « génération Erasmus » n’est toutefois guère concluante. Le fait d’être déjà mobiles et de se déplacer en avion, d’être multilingues et de communiquer avec Skype, de posséder un ordinateur portable et une carte Sim internationale, sont des éléments distinctifs peu exclusifs d’une « génération » (Boomans et al., 2008). Existerait-il dès lors des « prédispositions » à la mobilité ? Certains traits de personnalité caractériseraient-ils plus spécialement les étudiants mobiles ? Ce sont les travaux d’E. Murphy-Lejeune qui nous éclairent sur ces questions, avec le concept central de « capital mobilité », caractéristique d’une mobilité à court terme : l’étudiant étranger, en mobilisant certaines compétences socioculturelles, interpersonnelles et personnelles, s’adapte et assouplit sa personnalité ; il devient plus entreprenant et sait faire preuve de plus d’indépendance et de flexibilité. Ce processus d’adaptation suit un parcours chronologique dont les rites de passage sont communs à toutes les mobilités. Mais son statut d’étudiant le distingue du fait que l’expérience, limitée dans le temps, est in fine vécue comme bénéfique, quelles que soient les difficultés rencontrées. Cette adaptation s’enracine dans un processus de socialisation qui permet à l’étudiant voyageur de faire évoluer sa conception de l’espace et en particulier celle du « home », qui n’est plus lié désormais à un environnement géographique donné, mais qui s’inscrit dans un espace de vie sociale mobile et évolutif (Murphy-Lejeune, 2001 ; 2003). En arrière plan, il y a donc l’idée que la prédisposition à la mobilité est en quelque sorte inscrite dans le parcours biographique de l’étudiant. Une telle conception soutient l’hypothèse que le désir de mobilité peut être stimulé via l’expérience. Il s’agirait donc de multiplier les expériences pour remédier à la non-décision de mobilité. C’est la position implicitement défendue dans le récent rapport publié par le Centre d’analyse stratégique, Encourager la mobilité des jeunes en Europe, et dans le livre vert de la Commission européenne, Promouvoir la mobilité des jeunes à des fins d’apprentissage. L’un et l’autre préconisent de développer l’offre avec plus d’opportunités collectives pour les plus jeunes et de favoriser davantage les mobilités courtes et les mobilités associatives (Bertoncini, 2008 ; Commission européenne, 2009).

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D’autres études défendent l’idée que l’expérience est insuffisante et que l’acquisition d’une compétence interculturelle, susceptible de faciliter le travail d’adaptation, requiert un accompagnement, voire une formation spécifique. Les travaux de M. Abdallah-Pretceille sur l’interculturel ont bien montré que les échanges ne suffisent pas à réduire les préjugés et qu’une didactique de la mobilité a toute sa place dans le parcours (AbdallahPretceille in Dervin et al., 2008). Ceux de M. Anquetil en Italie ont mis en évidence le caractère essentiellement expérimental des initiatives de préparation interculturelle déployées dans divers EES en Europe. L’auteur plaide pour la mise en place de modules de formation permettant aux étudiants sortants et entrants d’« apprendre à être un étranger », basés sur l’observation, l’auto-réflexion et le retour sur soi (Anquetil, 2006). F. Dervin explore, à travers l’analyse des discours, les identités « instables, modulables, liquides » qui tendent à se « solidifier », à se figer, au contact de la culture étrangère, et la manière dont ces métamorphoses marquent de façon plus franche un territoire identitaire (Dervin, 2008a). Il montre comment l’usage de l’anglais langue véhiculaire en Finlande participe finalement de cette expression des « identités solides » (Dervin, 2009) et propose de promouvoir le « français lingua franca » comme langue de la communication interculturelle (Dervin, 2008b). E. Sigalas, auteur d’une thèse récente sur la relation entre Erasmus et l’identité européenne, livre une des rares analyses qui évalue empiriquement les bénéfices « culturels » d’une telle expérience, et qui fait singulièrement écho aux réflexions sur la compétence interculturelle. D’après ses résultats, l’efficacité du programme d’échanges à promouvoir une identité européenne commune reste limitée ; l’évolution du « sentiment européen » est faible entre le moment qui précède le départ et celui qui suit le retour, voire s’affaiblit pour les étudiants qui séjournent en Angleterre. Ce sentiment européen ne serait donc pas seulement dépendant de l’attitude même de l’étudiant mobile, mais serait également influencé par son environnement, selon qu’il s’avère plus ou moins eurosceptique ou plus ou moins europhile (Sigalas, 2009).

4.4 Conditions de vie et expérience de mobilité 4.4.1 L’accueil des étudiants étrangers : nouvelle donne ? Selon les experts de l’OBHE, l’image du pays d’accueil véhiculée par les étudiants en mobilité doit être prise au sérieux. L’expérience de la mobilité vécue, telle qu’elle peut être disséminée sur Internet et parfois dans les médias plus traditionnels, fait sens aux yeux des candidats potentiels. Le sentiment qu’il s’agit certes d’une aventure individuelle, mais surtout d’une aventure partagée par un grand nombre d’étudiants, donne un poids inédit à des formes d’expression collective (manifestations, grèves, etc.) potentiellement préjudiciables pour les prestataires et les pays d’accueil (Verbik et al., 2007). Les services d’accueil, et plus globalement d’accompagnement, sont pourtant, avec une certaine constance, estimés insuffisants. Malgré des évolutions sensibles, ils répondent difficilement à la demande croissante d’une population étudiante de plus en plus diverse. Le développement d’une démarche qualité interne dans les établissements, selon les critères définis à Bergen par les ESGs (European Standards and Guidelines for Quality Assurance), est partiellement effectif, avec le plus souvent des mesures limitées, non intégrées à un cadre formel plus général, et peu ou mal évaluées (Crosier et al., 2007). C’est cependant une préoccupation croissante de la part des autorités britanniques : le UK Council for International Student Affairs (UKCISA) collecte désormais de façon plus systématique des données sur la dimension d’expérience. De la même façon, les établissements australiens, dont la réputation de tirer un profit financier substantiel des étudiants étrangers est répandue, cherchent à se mobiliser pour valoriser les contributions académiques et culturelles des étudiants étrangers. La formule des programmes préparatoires à la mobilité, incluant une dimension linguistique, est elle aussi en plein essor, en particulier dans les pays anglo-saxons (hors États-Unis) : partiellement ou totalement externalisés, ces programmes ciblent tous les niveaux d’études, depuis le premier cycle jusqu’au cycle doctoral, plutôt dans des domaines commercial et informatique, et sont parfois obligatoires pour accéder ensuite aux formations universitaires. La création du Baromètre International Student Barometer par un organisme indépendant, i-Graduate, participe de cette même tendance ; l’ISB recueille annuellement plus de 150 000 témoignages d’étudiants, inscrits dans les 270 établissements qui ont adhéré au programme, issus d’une vingtaine de pays dans le monde (Verbik et al., 2007). En France, le recrutement et l’accueil des étudiants étrangers ont connu des évolutions sensibles depuis le rapport alarmant de l’Inspection générale publié sous la direction de C. Szymankiewicz, même si leur impact reste difficile à appréhender (2005). Ce sont désormais les Centres pour les études en France (CEF) au sein des espaces CampusFrance qui sont chargés en amont de la sélection et de l’accompagnement des candidats (« procédure CEF »). La responsabilité globale de l’accueil en France tend de plus en plus à être assumée par les PRES (pôles régionaux d’enseignement supérieur) à l’échelle d’un territoire, plutôt que par les EES individuellement, comme le montre une récente note de CampusFrance : les services proposés visent alors à faciliter à la fois les démarches d’installation (logement notamment) et les procédures vis-à-vis de l’institution d’accueil (2010). L’intégration pédagogique fait également l’objet de nombreuses initiatives, impliquant notamment les Centres universitaires d’études françaises et les cellules TICE, même si une cohérence d’ensemble reste difficile à dégager (ADCUEFE, 2004 ; Goes et al., 2007). Parfois, l’accompagnement intervient en amont, avant le départ. C’est par exemple le cas du dispositif FILIPÉ (filière linguistique préparatoire aux études en France), déployé dans le cadre de l’université thématique UNIT (Université Numérique Ingénierie et Technologie) (Michau in Goes et al., 2007). C’est aussi le cas du projet européen EuroMobil qui offre un ensemble de ressources de formation en langue et d’information culturelle pour des séjours d’études dans neuf pays européens (Allemagne, Finlande, France, Hongrie, Pologne, Portugal, République tchèque, Roumanie et Royaume-Uni) (Gerbault et al., 2009). Dossier d’actualité de la VST, n° 51 – février 2010 – Version intégrale 16

4.4.2 L’expérience étudiante D’après les enquêtes annuelles du réseau ESN, les étudiants sont plutôt satisfaits de leur expérience de mobilité, et ce degré de satisfaction est généralement plus élevé quand il s’agit des conditions de vie sur place que des conditions d’études. De même, les actions menées par les bureaux locaux de l’association, quand ils existent, sont appréciées positivement, plus pour les aspects sociaux du séjour, que pour le soutien administratif (Boomans et al., 2008 ; Krupnik et al., 2007). D’après l’enquête d’Ecotec pour la Commission européenne, les étudiants Erasmus considèrent à près de 90% comme positive, voire très positive, cette expérience de mobilité ; leur degré d’intégration sociale a globalement progressé depuis 1997-98, bien qu’elle se soit avérée plus problématique dans des pays tels que le Royaume-Uni et l’Irlande (Soulo Otero et al., 2006). En France également, la perception des étudiants est globalement positive, malgré l’absence d’une politique cohérente d’information relevée à maintes reprises, contrastant parfois avec le positivisme des discours institutionnels. Les étudiants étrangers les moins socialisés mettent en avant leur isolement pour expliquer les difficultés ressenties, et sont demandeurs de lieux tiers permettant de se faire des amis ou de s’intégrer dans des groupes de travail. Les appréciations relatives aux conditions matérielles d’études et aux aspects pédagogiques sont variables selon les établissements, mais éclairent sur le caractère globalement peu socialisant des universités françaises : sont le plus souvent critiqués les équipements sportifs et les activités culturelles d’une part, les services d’information et d’orientation d’autre part (Ennafaa et al., 2008a). Dans l’enquête réalisée par le CERLIS (Centre de recherche sur les liens sociaux), les étudiants étrangers dénoncent une période d’arrivée particulièrement stressante, avec des exigences administratives le plus souvent obscures, s’agissant de l’inscription, doublées de démarches d’installation peu aisées, notamment en matière de logement. Le fonctionnement pédagogique de l’université génère également des tensions, mais comme pour l’enquête de l’OVE, l’expérience, initiatique, est globalement vécue positivement. Pour autant, les trajectoires individuelles et collectives demeurent ambiguës : certains se paupérisent et se précarisent, d’autres ont le privilège de réussir des parcours sans faute. Le clivage est particulièrement prégnant, entre d’une part les étudiants boursiers et d’autre part ceux, indépendants, qui s’inscrivent dans une démarche de mobilité dite spontanée. Malgré des référents sociaux et culturels variables, ces étudiants, qu’ils viennent d’Amérique du Sud, de Chine ou d’Afrique noire, s’intègrent tant bien que mal et le repli l’emporte souvent sur l’affiliation. Parfois cependant, l’intégration dans la société française n’est pas un objectif poursuivi : c’est le groupe de pairs, par exemple les autres thésards étrangers avec qui l’on partage la culture étudiante et l’expérience de la recherche, qui est visé (Agulhon et al., 2009). Pour autant, souhaitée ou non, la rencontre avec les étudiants locaux ne se fait généralement pas et la motivation linguistique, souvent mise en avant, ne résiste pas toujours à une analyse plus approfondie. 30% des 15 000 répondants de l’enquête ESN rapportent que l’ensemble des cours suivis ont été dispensés en langue anglaise (Krupnik et al., 2007). Dans les pays scandinaves, c’est l’anglais qui sert de langue véhiculaire tant pour la vie quotidienne que pour la vie universitaire (Caudery et al. in Byram et al., 2008). En Suède, les étudiants en mobilité connaissent une période de socialisation intense avec les autres étudiants en mobilité, mais cette cohésion de surface s’effiloche très rapidement dès le retour dans le pays d’origine (Tsoukalas in Byram et al., 2008). L’enquête réalisée par L. Brown dans le Sud de l’Angleterre n’apporte guère de bémol, malgré l’anglais en partage. Au contraire, l’échec de la rencontre a été particulièrement cuisant pour les étudiants en provenance des pays d’Asie, qui se sont présentés au mieux comme sujets d’une indifférence généralisée de la part des étudiants locaux, au pire comme victimes d’injures verbales et d’intimidations. Ce sentiment de menace les a, à leur grande déception, amenés à concentrer leur réseau social sur le groupe national d’appartenance (Brown, 2009). Selon F. Dervin, l’expérience des étudiants étrangers en Finlande est caractérisée par une duplicité dans les relations créées ou imaginées « qui oscille entre la satisfaction d’être entouré par des individus a priori dynamiques et intéressants, issus de pays différents, et le sentiment que les étudiants sont ségrégués et donc trop souvent ensemble », engendrant des commentaires négatifs sur la superficialité et la brièveté des relations. Dans l’observation des communautés nationales imaginées (les Finlandais, les Allemands, les Espagnols, etc.), les Français interrogés prennent conscience de leur altérité et une tension naît du désir ambivalent de se sentir proche de leur groupe d’appartenance et de s’en tenir à distance. Là encore, le souhait de rencontrer des Finlandais ne se concrétise pas. Cette non-rencontre, qui s’accompagne d’un non-apprentissage du finnois, est expliquée par les étudiants français par des caractéristiques solidifiantes (de type « les Finlandais sont timides et froids ») et par une prééminence des communautés-crochets Erasmus dans les sociabilités à l’œuvre (Dervin, 2008a). Ces difficultés ne sont pas nouvelles, la plupart des recherches croisant mobilité et identité mettent en effet en évidence la complexité de l’expérience de l’altérité. V. Papatsiba a bien montré comment les étudiants rhônealpins partis en mobilité Erasmus ont vécu cette expérience selon un mode bi-polaire : une « posture de distanciation », marquée par une intériorité accrue et une conception de l’autre plutôt fermée et universalisante d’une part ; une « posture d’implication », marquée par une plus forte extériorité et une conception de l’autre plutôt ouverte et relativiste d’autre part. Dans ces cheminements, c’est le sentiment d’appartenance au groupe de pairs (les autres étudiants étrangers) qui permet la construction d’une image positive de soi en tant qu’étranger et encourage l’ouverture vers autrui. Là encore, l’immersion seule ne constitue pas une garantie d’ouverture, et la rencontre, pour s’accomplir, demande à être un objectif en soi : dans cet effort, la distance avec l’autre culturellement différent devient une distance interpersonnelle à franchir (Papatsiba, 2003).

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5. La mobilité étudiante ouvre-t-elle des perspectives ? Si la rencontre avec la langue et la culture du pays d’accueil ne sont pas toujours au rendez-vous dans les diverses expériences de mobilité, la question des bénéfices reste posée. Selon M. Byram, la valeur de l’expérience présente de multiples facettes, parfois en tension les unes avec les autres, selon que l’on se place du côté des pouvoirs publics, des établissements d’enseignement ou des étudiants. Et les outils permettant de définir ce qui caractérise cette valeur ajoutée et consécutivement d’en évaluer l’importance restent à construire (Byram et al., 2008). Quelques études offrent néanmoins des réponses partielles quant à l’impact de la mobilité sur le capital scolaire d’une part et sur l’employabilité d’autre part.

5.1 La mobilité augmente-t-elle le capital scolaire ? Le rapport aux études est important pour les étudiants mobiles, qui par leur expérience souhaitent valoriser leur cursus et se distinguer de leurs pairs dans un environnement massifié. Plusieurs études ont par ailleurs souligné la motivation renforcée de ces étudiants à poursuivre leurs études à un niveau avancé de qualification (Bracht et al., 2006 ; Schomburg et al., 2008). Cet engagement joue-t-il également dans les choix préalables au départ ? Autrement dit, dans quelle mesure la destination choisie s’inscrit-elle également dans des stratégies de distinction ?

5.1.1 Le choix de la destination, la supériorité académique de l’établissement Les mouvements migratoires partent généralement de pays où le système d’enseignement supérieur est moins développé vers des pays où les établissements bénéficient d’une meilleure réputation. Le développement croissant de la mobilité intra-régionale abonde cette interprétation. Les étudiants des pays arabes vont en Égypte ou en Jordanie ; ceux des pays africains vont en Afrique du Sud ; certains originaires du Bangladesh ou du Népal vont en Inde, tandis que d’autres voyagent de la Chine continentale à Hong Kong (Varghese, 2008). Il existe en outre une corrélation positive entre le classement des établissements dans les palmarès internationaux et les destinations préférées par les étudiants. Une étude publiée par l’ACA en 2006 montre que malgré une image globalement positive à l’échelle mondiale, l’Europe est perçue par les pays tiers comme moins prestigieuse et moins innovante en matière d’enseignement supérieur que les États-Unis. Pour les étudiants originaires d’Asie en particulier, les principaux facteurs influençant le choix de la destination sont la qualité de l’enseignement, ainsi que la réputation et le prestige de l’établissement et des diplômes (ACA, 2006). Les classements internationaux avantagent les établissements qui ont l’anglais comme langue principale d’enseignement et de recherche, qui proposent des programmes d’études variés et qui disposent de fonds importants pour la recherche. Ces classements posent des problèmes méthodologiques, mais la grande influence qu’ils exercent semble difficile à ébranler tant que des systèmes alternatifs ne voient pas le jour. Un classement européen, qui prendrait en compte les réalités de l’EEES et les avancées de Bologne, serait évidemment le bienvenu (Bourdin, 2008). En tout état de cause, si cette dimension prestigieuse véhiculée par les classements internationaux intervient dans le choix du pays de destination, son influence sur le choix de l’établissement est moins évidente. Au caractère structuré de la mobilité encadrée, s’ajoutent de nombreux facteurs liés aux situations individuelles qui, dans le cas d’une mobilité spontanée, jouent comme autant de contraintes sur la capacité de décision. La manière dont les établissements se choisissent entre eux pour élargir leur offre internationale est significative d’un processus d’« affinités sélectives » reproduisant l’ordre des inégalités de prestige entre établissements. Si ce processus est assez « naturel » dans le cas de contrats bilatéraux, ces affinités sélectives revêtent un caractère plus inattendu dans le cas d’Erasmus. L’étude menée par le LEST montre ainsi comment les universités britanniques, sommées de restreindre l’accueil d’étudiants Erasmus, ont maintenu des contrats avec les universités étrangères qui leur ressemblent. Autrement dit, l’université de Bristol contracte plutôt avec les écoles d’ingénieurs en France, plutôt avec les universités de Bologne et de Sienne en Italie, mais pas avec celles du Mezzogiorno ; inversement, les universités nées avec la démocratisation scolaire, telle celle du Sussex, contractent avec les universités françaises créées dans les années 60 (Ballatore et al., 2008). Les établissements se choisissent donc, mais choisissent également les étudiants qui sont envoyés à l’étranger, selon un protocole plus ou moins transparent. Avec une offre qui se fonde sur des contrats bilatéraux signés par des enseignants-chercheurs de deux départements, les choix de mobilité Erasmus s’avèrent donc largement dépendants de facteurs structurels. La dimension proprement individuelle du choix est d’autant plus restreinte que l’extrême variabilité des procédures de recrutement, d’un pays à l’autre, d’un établissement à l’autre, voire d’un département à l’autre, ajoute nécessairement à cette dépendance. En France par exemple, la décision finale ne relève pas d’une commission transversale, mais du responsable Erasmus de chaque département. En Angleterre, le système de recrutement est plus structuré et plus transparent : les niveaux d’exigence par département sont connus à l’avance (Ballatore et al., 2008).

5.1.2 La question de la reconnaissance des diplômes et des périodes d’études Les bénéfices que peuvent procurer les études à l’étranger dépendent dans une grande mesure des politiques adoptées à l’égard des étudiants internationaux, à la fois dans les pays d’origine et dans les pays d’accueil. À moyen terme, la question de la reconnaissance des diplômes sanctionnant les études à l’étranger est fondamentale, ainsi que la valeur de ces mêmes diplômes sur le marché du travail local (OCDE, 2009). Dossier d’actualité de la VST, n° 51 – février 2010 – Version intégrale 18

Mais dans l’Europe de Bologne, la reconnaissance des diplômes est loin d’être une réalité. Seules certaines professions réglementées, comme les architectes, les médecins et autres professions médicales en bénéficient. Le Cadre européen des certifications CEC (European Qualifications Framework), jouant le rôle d’outil de transposition des qualifications, est largement incompris et la mise en œuvre des cadres nationaux compatibles n’en est qu’à ses débuts (Crosier et al., 2007). La vocation première du système européen de transfert de crédits ECTS est de soutenir la reconnaissance académique des périodes d’études effectuées à l’étranger, via des expériences de mobilité décrites en termes d’acquis d’apprentissage. Créé en 1988 dans le cadre du programme Erasmus, il ne permet pas (encore ?) de commencer un diplôme dans un établissement pour le finir dans un autre, mais tend à évoluer vers un système d’accumulation de crédits, pour faciliter également les transactions en termes de qualifications. Toutefois, la diversité des pratiques à la fois dans la définition et dans l’usage du système de crédits ECTS rend son opérationnalité critique (Crosier et al., 2007). Même si le système de crédits ECTS bénéficie d’un cadre juridique dans une grande majorité de pays, six sur les 46 signataires de Bologne n’ont pas avancé dans sa mise en œuvre (Carapinha, 2009). Dans les autres pays, les notions sur lesquelles il s’appuie, « acquis de l’apprentissage » d’une part et « charge de travail » de l’étudiant d’autre part, sont souvent mal comprises et mal utilisées (Eurydice, 2009). Dans des pays comme la Belgique (communauté flamande), le Danemark, la Finlande et les Pays-Bas, le calcul de la charge de travail a été généralisé, et son estimation est actualisée sur la base d’enquêtes réalisées auprès des étudiants. Mais cette démarche reste largement dépendante de la politique de l’établissement, et il n’est pas rare que les crédits soient basés uniquement sur l’appréciation des enseignants (Carapinha, 2009). De même, le déploiement des acquis d’apprentissage, essentiel pour donner aux étudiants le pouvoir de s’engager personnellement dans leur parcours, révèle des pratiques extrêmement diverses, peu susceptibles de promouvoir la flexibilité recherchée (Crosier et al., 2007). Plusieurs initiatives soutiennent cependant cette démarche. Lancé en 2001, le projet Tuning Educational Structures in Europe se présente comme une tentative des EES impliqués pour rendre leur curriculum comparable, via une réelle convergence des standards, au-delà d’une simple déclaration d’équivalences. Concrètement, des enseignants de toute l’Europe identifient des points de référence en termes de compétences génériques et spécifiques dans neuf domaines disciplinaires, aux niveaux licence et master. L’approche développée dans ce projet a d’ores et déjà fait des émules en Amérique latine, avec le projet conjoint Tuning América Latina ; elle servira également d’appui dans le cadre du projet AHELO (Assessment of Higher Education Learning Outcomes), initié très récemment par l’OCDE (Vossensteyn, 2008). Les ECTS, mal définis, sont également mal utilisés. La mise en place de procédures claires et transparentes pour la reconnaissance de la mobilité, dans le respect de la Convention de reconnaissance de Lisbonne (1997), reste un objectif à atteindre (BFUG, 2009). D’après le rapport de tendance V de l’EUA, presque la moitié des universités consultées admettent que les étudiants rencontrent des difficultés pour faire valider les crédits cumulés à l’étranger (Crosier et al., 2007). Les répondants aux enquêtes 2006 et 2007 de l’ESN ont été nombreux à ne pas bénéficier d’une reconnaissance intégrale pour les cours suivis à l’étranger, certains, dans une proportion non négligeable (30%), ayant même perdu un semestre en réintégrant leur université. Souhaitant approfondir cette question, l’ESN a lancé le projet PRIME (Problem of Recognition In Making Erasmus), dont les premiers résultats confirment les inégalités : seuls deux tiers des 2 400 étudiants interrogés ont obtenu une reconnaissance intégrale de leurs cours, 30% une reconnaissance partielle et 4% aucune reconnaissance. Les principaux obstacles portent sur des difficultés rencontrées par l’étudiant (défaut d’assiduité, résultats insuffisants), l’incompatibilité des programmes d’études, les difficultés relatives au calcul des crédits, la non-reconnaissance de certains cours (cours de langue, cours obligatoires dans le pays d’origine), une organisation déficiente, les réticences de l’université d’origine, voire des enseignants, à reconnaître la période d’études. Globalement, ce sont le plus souvent les parties impliquées dans le processus de reconnaissance qui, quand elles diffèrent de celles qui ont signé le Learning Agreement, posent problème (Fiedrich et al., 2009). Ces difficultés tiennent donc à la fois aux pratiques de l’université d’accueil et à celles de l’université d’origine, qui en tout état de cause garde les pleins pouvoirs sur la transférabilité. Certains pays, tels la Suisse, utilisent les crédits ECTS pour reconnaître effectivement la période d’études à l’étranger, mais ne la valident pas : elle est alors ajoutée à la description du Supplément au diplôme, comme une sorte d’annexe (Carapinha, 2009). D’une manière générale, la mise en œuvre du Supplément au diplôme, effective dans de nombreux pays signataires de Bologne, reste marquée par des différences sensibles d’un pays à l’autre, et ses usages en lien avec les crédits ECTS d’une part et le CV de compétences Europass d’autre part demeurent largement méconnus (Eurydice, 2009). Selon l’analyse de M. Paunescu, le bémol relatif aux bénéfices académiques ne porte pas uniquement sur la question de la reconnaissance, mais sur l’ensemble de l’expérience académique : les étudiants roumains, polonais et hongrois interrogés, s’ils reconnaissent volontiers un enrichissement personnel, culturel et linguistique, expriment une déception forte quant à leurs apprentissages disciplinaires, en raison d’un ensemble de problèmes pratiques mal pris en charge par les EES (Paunescu in Byram et al., 2008).

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5.2 La mobilité augmente-t-elle à moyen terme l’employabilité ? 5.2.1 Une mise à moyen terme : les opportunités professionnelles ? Une expérience de mobilité offre-t-elle réellement des opportunités pour accéder à de meilleurs emplois ? Permet-elle d’évoluer ensuite plus facilement dans des réseaux professionnels transnationaux ? Trois études européennes apportent des éléments de réponse à ces questions. D’après les résultats du projet européen VALERA (Value of Erasmus Mobility), effectuer une période d’études à l’étranger mène à des activités professionnelles qui sollicitent davantage les compétences internationales : travail ponctuel ou permanent à l’étranger, travail dans un organisme d’envergure internationale, usage des langues étrangères, communication avec des personnes au profil très différent, etc. Mais selon les étudiants bénéficiaires, une expérience internationale via Erasmus semble faciliter l’accès à l’emploi mais ne constitue pas un levier pour avancer plus vite dans la carrière. Autrement dit, l’impact d’Erasmus est considéré comme limité en termes de mobilité verticale, quelles que soient les filières observées. Cette valeur professionnelle s’avère nettement plus élevée chez les anciens étudiants originaires de pays en développement (Europe Centrale et Europe de l’Est), que parmi ceux originaires d’Europe occidentale. Et de façon générale, indépendamment de l’origine géographique, cet impact perçu sur la carrière tend à s’amenuiser au fur et à mesure que la mobilité est plus ancienne (Bracht et al., 2006). D’après l’enquête Nordic Graduate Survey 2007, les jeunes possédant un diplôme étranger rencontrent plus de difficulté pour trouver un emploi que ceux ayant fait l’expérience d’une mobilité d’études, et sont plus fréquemment sur-diplômés par rapport aux emplois occupés. Trois ans après leur diplômation, les deux groupes d’étudiants mobiles ont un niveau de revenus supérieur à ceux des étudiants non mobiles et occupent plus souvent des postes à vocation internationale. La mobilité augmente également la probabilité de travailler à l’étranger, dans des proportions variées selon les pays, mais plus significatives dans le cas d’une mobilité de diplôme : dans l’échantillon norvégien, 18% de ceux qui ont obtenu leur diplôme à l’étranger sont expatriés, alors qu’ils sont 43% en Finlande (Wiers-Jenssen, 2009). L’enquête REFLEX, réalisée auprès de 40 000 diplômés provenant de douze pays européens et du Japon, cinq ans après l’obtention de leur diplôme, apporte un éclairage complémentaire en traitant la mobilité internationale à différents stades de la vie des diplômés. Elle confirme le faible impact de la mobilité sur les salaires, quelle que soit sa forme, et met en évidence une relation forte entre l’expérience, les études à l’international et le travail à l’international, souvent qualifiée de « mobilité horizontale ». D’une façon générale, effectuer une période d’études à l’étranger ou bien y préparer un diplôme va de pair avec une mobilité ultérieure, professionnelle ou non, internationale ou non, mais il ne s’agit pas à proprement parler d’une relation de causalité (Schomburg et al., 2008). Dans leur étude sur les diplômés allemands, Parey et Waldinger montrent que la probabilité pour qu’un étudiant Erasmus se trouve dans une configuration qui le conduise à s’expatrier est de 15 à 20 fois supérieure à celle d’un étudiant non mobile. Bien que les causes restent à déterminer, la probabilité pour que cette mobilité professionnelle se situe dans la région où il a étudié précédemment est particulièrement élevée (Parey et al., 2008). Mais cette « mobilité des cerveaux » peut présenter une configuration tout à fait différente dès lors qu’elle s’inscrit dans un phénomène de non-retour au pays d’origine, pouvant dans certains cas s’apparenter à ce que l’on appelle communément la « fuite des cerveaux ».

5.2.2 Mobilité étudiante et migration : la question du non-retour Fuite ou circulation des cerveaux ? Comme le rappellent Ennafaa et Paivandi dans leur étude sur le non-retour des étudiants étrangers, le paradigme de la fuite des cerveaux (brain drain), qui a dominé les analyses dans les années 1960, n’a rien d’évident. Et l’existence d’un marché international des compétences, symbolisé par le brain gain, popularisé dans les années 1980, semble se vérifier plutôt dans des secteurs très spécialisés, globalement peu représentatifs des migrations professionnelles. Si la mobilité étudiante s’inscrit potentiellement dans des logiques migratoires de type brain drain, le mouvement dépasse désormais les traditionnelles migrations nord-sud, dans un contexte mondialisé de désaffection des études scientifiques (Ennafaa et al., 2008b). Les analyses de l’OCDE montrent bien comment certains pays, industrialisés, mettent en place des mesures pour faciliter l’accès à l’emploi des étrangers diplômés sur leur territoire, tandis que d’autres, plus vulnérables, misent sur des dispositifs visant à réduire les départs ou favoriser la réintégration. Dans ces jeux de pouvoirs, la migration qualifiée est bel et bien une réalité, même si elle reste difficile à mesurer. Dans des pays tels que l’Australie, le Canada et la Nouvelle-Zélande, une proportion importante des candidats à l’immigration possèdent un diplôme obtenu dans le pays d’accueil. En Norvège, 18% des étudiants hors EEE ayant séjourné entre 1991 et 2005, sont restés. Aux États-Unis, le taux de séjour moyen des doctorants étrangers quatre à cinq ans après l’obtention du diplôme a connu une forte progression entre 1992 et 2001, en particulier dans le cas des doctorants chinois (de 65% à 96%) et indiens (de 72% à 86%) (CERI, 2008). Mais les liens entre l’internationalisation de l’enseignement supérieur, la mobilité étudiante et la migration qualifiée sont infiniment plus complexes que ne pourrait le laisser croire un simple décompte des étudiants qui ne sont pas retournés dans leur pays après leur diplômation. La mobilité doctorale par ailleurs sou-

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lève de nombreuses questions sur les enjeux éthiques liés aux différentes cultures académiques, et sur le potentiel essor d’un « doctorat global » (global PhD), comme le souligne une récente note de CampusFrance (2009). En tout état de cause, les analyses ne permettent pas de conclure à un lien de causalité entre le degré de mobilité des étudiants et le taux d’expatriation. Les données relatives à la prolongation du séjour après l’obtention du diplôme sont quasiment inexistantes ; seuls les États-Unis disposent d’assez bonnes données sur les diplômés étrangers qui s’installent sur leur territoire. Quoi qu’il en soit, cette « rétention » des étudiants diplômés ne peut constituer qu’un indicateur partiel d’une fuite potentielle des cerveaux. Parallèlement, la notion de « diplôme étranger » devient plus difficile à appréhender : s’agit-il d’un diplôme obtenu physiquement à l’étranger, virtuellement à distance, ou bien à l’issue d’une formation dans un campus délocalisé ? (Vincent-Lancrin, 2008). Le cas de la France Depuis l’ouvrage de S. Slama en 1999, la question de « l’étudiant international » qui remplacerait « l’étudiant étranger », liée à l’avènement d’une nouvelle « élite migratoire », est dans les esprits en France. L’étudiant étranger, originaire d’un pays en voie de développement, souvent francophone, mû par une démarche individuelle et venant en France pour faire toutes ses études, a-t-il laissé la place à un étudiant européen, asiatique ou américain, bénéficiant de programmes gouvernementaux et fréquentant plutôt le cycle doctoral ? (Slama, 1999). D’après l’étude de V. Erlich, la reconfiguration des rapports nord-sud depuis une dizaine d’années œuvre à la conciliation d’ambitions gouvernementales contradictoires : limiter l’immigration en provenance des pays pauvres d’Afrique et d’Asie, et attirer des étudiants de valeur, originaires de ces mêmes pays. Les nouvelles procédures opèrent ainsi une sélection accrue des étudiants mobiles en provenance du Maghreb, via le recrutement d’étudiants plus compétitifs, au détriment de l’accueil d’étudiants moins privilégiés. Par là même, elles participent au renforcement de plusieurs logiques migratoires : logique d’excellence, logique de contournement et logique d’intégration (Erlich in Mazzella, 2009). La thèse de géographie soutenue récemment par E. Terrier va dans le même sens, montrant comment les intérêts économiques et les critères de l’immigration choisie justifient des politiques restrictives à l’égard des étudiants des pays du Sud, en particulier d’origine africaine, faisant de la mobilité un moteur de reproduction des élites (Terrier, 2009). Peuvent être rapprochés également les travaux de S. Garneau sur l’égalité d’accès des étudiants à l’espace international qui, à partir d’une enquête menée auprès d’étudiants français au Québec, ont mis en évidence la manière dont les opportunités institutionnelles et les ressources personnelles et familiales initiales de l’étudiant se combinent et sont diversement rentabilisées dans les expériences professionnelles ultérieures (Garneau, 2007). Dans la continuité des travaux initiés par Coulon et Paivandi au début des années 2000 (2003), l’enquête récente de l’OVE révèle également une situation singulière qui ne peut être interprétée qu’à la lumière de ses relations historiques avec les pays francophones. Les projets d’avenir des étudiants étrangers en France sont en effet marqués par des incertitudes multiples, liées à une combinaison de facteurs structurels et de situations individuelles. Plusieurs logiques co-existent quand le non-retour au pays d’origine est envisagé : (1) une logique professionnelle, inhérente à toute démarche de formation, (2) une logique migratoire quand la stratégie d’installation est conçue dès le départ, (3) une logique intégratrice, avec ses dimensions affectives, sociales et culturelles, et (4) une logique existentielle pour celles et ceux en provenance de pays où ils sont moins libres, qui cherchent à se reconstruire. La situation de transition dans laquelle ces étudiants se trouvent offre un degré de complexité qu’une théorie de la fuite (ou de la circulation) des cerveaux ne peut que partiellement expliquer : l’existence d’une véritable filière d’immigration par le biais des études concerne en effet des étudiants de niveaux et de compétences très variés, pas toujours en adéquation avec le marché du travail dans le pays d’accueil (Ennafaa et al., 2008b). L’absence de débouchés dans le pays d’origine, dominé par des pratiques de corruption et un fort taux de chômage, n’est pas non plus à négliger (Gérard, 2008). Le projet Saraswati sous la conduite de Mohamed Harfi s’est penché sur la question de la mobilité académique, concluant en 2005 que le contexte français, bien qu’attractif, ne semblait pas s’appuyer sur une politique stratégique objectivée (Harfi et al., 2005). Depuis 2005, les contours de cette stratégie française en matière de coopération universitaire et scientifique se sont cependant affirmés. Mais appréhender la mobilité étudiante sous l’angle de la fuite des cerveaux en France nécessiterait de porter une attention particulière à la mobilité dans le cadre des Grandes écoles qui recrutent un étudiant étranger sur cinq (plus 50 000 inscrits étrangers en 2008-09 d’après les chiffres de la DEPP). La dernière enquête bi-annuelle publiée par la Conférence des grandes écoles (CGE) offre à cet égard un point de départ incontournable (Codron, 2007). Il conviendrait également d’effectuer un zoom sur la mobilité des doctorants et des jeunes chercheurs, ainsi qu’une analyse des politiques nationales d’émigration et d’immigration scientifiques, qui excèdent largement le cadre de ce dossier. Le livre vert publié en 2007 par la Commission européenne sur les perspectives de l’espace européen de la recherche (EER) (2007) et les initiatives prises dans le cadre du réseau Euraxess peuvent servir de fils conducteurs à une telle analyse.

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6. Bibliographie La plupart des liens figurant dans ce Dossier renvoient vers les fiches correspondantes de notre bibliographie collaborative, qui comprennent les références complètes et, le cas échéant, des accès aux articles cités (en accès libre ou en accès payant, selon les cas et selon les abonnements électroniques souscrits par votre institution). • « Erasmus en chiffres ». Agence Europe-éducation-formation France : Bordeaux. En ligne : (consulté le 9 février 2010). • « Erasmus Statistics : Student and Teacher Mobility ». Commission européenne : Bruxelles. En ligne : (consulté le 9 février 2010). • (2006). Perceptions of European Higher Education in Third Countries : Final Report. n° Project 2004 – 3924/001 – 001 MUN-MUNA31. Bruxelles : Academic Cooperation Association (ACA). • (2007). Livre vert : L’espace européen de la recherche – nouvelles perspectives. Bruxelles : Commission européenne. • (2009). 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7. Compléments bibliographiques À propos du contexte international • les travaux de l’ASIE (Association for Studies in International Education) : consortium de 10 organismes reconnus en matière d’internationalisation de l’éducation. Le consortium publie la revue phare Journal of Studies in International Education (JSIE). • les travaux de l’IIE (Institute of International Education) dont : – les rapports annuels Open Doors sur la mobilité aux États-Unis – INSTITUTE OF INTERNATIONAL EDUCATION (2009). Higher Education on the Move: New Developments in Global Mobility : Global Education Research Reports : Report two. New York : Institute of International Education (IIE). • les travaux de l’OBHE (Observatory on Borderless Higher Education) dont : – BECKER Rosa (2009). International Branch Campuses: Markets and Strategies. London : Observatory on Borderless Higher Education (OBHE). – LASANOWSKI Veronica (2009). International Student Mobility: Status Report 2009. London : Observatory on Borderless Higher Education (OBHE). • les travaux du CERI / OCDE sur l’internationalisation de l’enseignement supérieur, http://www.oecd.org/edu/internationalisation, dont : – MARGINSON Simon & VAN DER WENDE Marijk (2007). Globalisation and Higher Education. OECD Education Working Papers, n° 8. Paris : OCDE. – La collection « L’enseignement supérieur à l’horizon 2030 », avec le volume 1 : Démographie : MARMOLEJO Francisco, MANLEY-CASIMIR Sean & VINCENT-LANCRIN Stéphan (2008). « Immigration et accès à l’enseignement supérieur - intégration ou marginalisation ? ». In L’enseignement supérieur à l’horizon 2030 (Vol. 1) : Démographie. Paris : OCDE, p. 326–360. – et surtout le volume 2 : Globalisation (en cours de traduction). CENTRE POUR LA RECHERCHE ET L’INNOVATION DANS L’ENSEIGNEMENT (CERI) (2009). Higher Education to 2030, Volume 2 : Globalisation. Paris : OCDE. • les travaux du programme IMHE / OCDE sur la gestion de l’enseignement supérieur, http://www.oecd.org/edu/imhe, dont : – la dernière revue thématique sur l’enseignement supérieur dans la société de la connaissance : OCDE (2008). Tertiary Education for the Knowledge Society. Paris : OCDE. – WIT Hans & KNIGHT Jane (dir.) (1999). Qualité et internationalisation de l’enseignement supérieur. Paris : OCDE. • 2009 IAU Global Survey on Internationalization of Higher Education : résultats à paraître sur le site de l’Association internationale des universités : http://www.iau-aiu.net/internationalization/fre/index.html • la base de données d’IDP Education Australia Database of Research in International Education : plus de 7 600 documents référencés.

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À propos du contexte européen • le site de la communauté d’experts du Processus de Bologne : http://portal.bolognaexperts.net/ • les activités de la Commission européenne en lien avec la construction d’un espace européen de la recherche (EER) : http://ec.europa.eu/research/era/index_fr.html • les travaux de l’EAIE (European Association for International Education). L’EAIE est membre de l’ASIE ; la 22e édition de sa conférence annuelle se tiendra à Nantes en septembre 2010. • (2005). Références et lignes directrices pour le management de la qualité dans l’espace européen de l’enseignement supérieur. Helsinki : European Association for Quality Assurance in Higher Education (ENQA). • JANSON Kerstin, SCHOMBURG Harald & TEICHLER Ulrich (2009). The Professional Value of ERASMUS Mobility : The Impact of International Experience on Former Students’ and on Teachers’ Careers. Bonn : Lemmens. • BRANDENBURG Uwe & FEDERKEIL Gero (dir.) (2007). How to measure internationality and internationalisation of higher education institutions : Indicators and key figures. n° 92. Gütersloh : Centrum für Hochschulentwicklung (CHE). • GÉRARD Marcel (2008). Financing Bologna, the Internationally Mobile Students in European Higher Education. CESifo Working Paper, n° 2391. Munich : CESifo. À propos du contexte français • les Repères et références statistiques produites par la DEPP sur la population étudiante ; • les programmes de coopération universitaire et scientifique du Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche et les actions du Ministère des affaires étrangères et européennes ; • les enquêtes bi-annuelles publiées par la Conférence des grandes écoles (CGE) ; • les Notes de l’agence nationale CampusFrance ; • (2008). La mobilité des étudiants en Europe et dans le monde. Dossiers de la Documentation française. En ligne : ; • GIRET Jean-François & STOEFFLER-KERN Françoise (dir.) (2009). Approches de la mobilité étudiante. Net.Doc, n° 48. Marseille : Centre d'études et de recherches sur les qualifications (CEREQ). À propos de mobilité dans l’enseignement primaire, secondaire ou professionnel • Les travaux réalisés entre 2006 et 2008 dans le cadre d’une douzaine de projets européens pilotes focalisés sur la mobilité dans l’enseignement initial à vocation professionnelle. • Le site du projet finlandais EVOC / FINECVET : http://evoc.fi/ • (2008). Livre vert : Migration et mobilité: enjeux et opportunités pour les systèmes éducatifs européens. Bruxelles : Commission européenne. • KRISTENSEN Søren (dir.) (2008). Rapport consolidé EAC/44/06. Soutien et encouragement à la mobilité. Institut danois pour la formation des enseignants de l’enseignement professionnel.

Rédactrice : Laure Endrizzi Ce Dossier d’actualité est une publication mensuelle de la Veille scientifique et technologique. © INRP. •

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Pour citer ce document : ENDRIZZI Laure (2010). « La mobilité étudiante, entre mythe et réalité ». Dossier d’actualité de la VST, n° 51, février. En ligne : . Vous pouvez faire part de vos réactions à ce Dossier en laissant un commentaire sous l’article correspondant dans notre blog : « Écrans de veille en éducation ». Vous abonner ou vous désabonner http://www.inrp.fr/vst/LettreVST/Abonnement.htm Consulter les nouveautés http://www.inrp.fr/vst/Dernieres_MAJ.php Nous contacter [email protected] Institut national de recherche pédagogique Veille scientifique et technologique 19, allée de Fontenay – BP 17424 69347 Lyon cedex 07 Tél. : +33 (0)4 72 76 61 00 Fax. : +33 (0)4 72 76 61 93 membre associé de

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