Lyon - WK Transport Logistique

Un portage politique qui encourage les initiatives sur le terrain. ... dans l'autre sens : du fait du portage poli- tique existant, les techniciens ..... l'informatique et les.
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MÉTROPOLE

Lyon UNE POLITIQUE EN FAVEUR DES MOBILITÉS DURABLES

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la démarche fait figure d’exemple. Philippe Bossin, président fondateur du cabinet d’étude interface transport, implanté à lyon et reconnu pour son expertise dans ce domaine, explique les raisons de cette singularité : « Gérard Collomb a parfaitement compris deux dimensions de la logistique urbaine : l’aspect environnemental d’un côté, et service aux populations de l’autre. Il est tout à fait conscient par exemple que, demain, entre le local à poubelle et le local à vélo, il faudra prévoir un local e-business pour les livraisons des particuliers. Et qu’au même titre qu’un parent cherchera à situer son domicile proche d’une école ou qu’il fera attention aux équipements en matière de communication, les n n n

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are. En novembre 2010, Gérard Collomb tient une conférence de presse au cours de laquelle il présente les grandes lignes de sa politique en matière de distribution de marchandises. face à l’assistance, il détaille sa feuille de route, insistant notamment sur sa volonté de réintroduire des espaces logistiques en milieu urbain. Une annonce au demeurant banale mais qui, avec le recul, n’a pourtant rien de telle compte tenu du manque d’intérêt que suscite habituellement cette question économique auprès des élus locaux. Dès lors, venant de la part du président de la communauté urbaine la plus peuplée de france,

L’agglomération lyonnaise concentre une somme de savoir-faire uniques en matière de mobilité et de logistique urbaine. Gérard Collomb, maire de la ville et président du Grand Lyon, fait preuve d’une réelle volonté d’action dans ce domaine. Un portage politique qui encourage les initiatives sur le terrain. fotolia

PAR SÉBASTIEN MÉRIENNE

CONTRASTE. Du Vieux Lyon au quartier d’affaires de La Part-Dieu, la ville offre un bel exemple de mariage entre histoire et modernité. 52

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58 communes constituent la communauté d’agglomération du Grand Lyon depuis l’adhésion des villes de Givors et Grigny en 2007, puis de Lissieu en 2011.

527 km2 de superficie pour le Grand Lyon. C’est cinq fois plus que Paris intra-muros (105 km2).

1 288 262 m2 de surface logistique cumulée en 2009 au sein du Grand Lyon.

15 %

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1983 Ouverture de la gare Lyon Part-Dieu

Baptisée COURLY en 1971, elle ne prendra officiellement le nom de Grand Lyon qu’en 1991. Depuis son origine, le nombre de communes qui la composent est passé de 55 à 58 aujourd’hui.

Elle est aujourd’hui la première gare européenne en nombre de passagers en correspondance.

de Dardilly et vice-présidente du Grand lyon en charge du pôle politique «déplacements et mobilité». Une base à laquelle s’ajoute la présence de transporteurs et de messagers d’envergure nationale et internationale comme tnt Express à lyon, alloin à Villefranchesur-Saône ou BMVirolle à Saint-Priest. Enfin, le Grand lyon accueille également des centres de recherche spécialisés sur les questions de mobilité comme le CErtU (Centre d’études sur les réseaux, les transports, l’urbanisme et les constructions publiques), le lEt (laboratoire d’économie des transports), ’inrEtS (institut national de recherche sur les transports et leur sécurité) ou le

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1998 Classement au patrimoine mondial de l’humanité

2030 Achèvement des grands chantiers urbains Les projets Lyon-Confluence et Lyon Part-Dieu offrent un nouveau visage à la ville millénaire.

L’ensemble classé couvre 427 hectares, incluant notamment les collines de Fourvière et de la Croix-Rousse, le Vieux Lyon et une partie de la Presqu’île.

1971 Inauguration du Tunnel de Fourvière Long de 1 853 m, il traverse la colline du même nom et offre une liaison directe la vallée du Rhône et Marseille.

pôle de compétitivité lUtB (lyon Urban truck & Bus). Cette conjonction d’ingénieurs, de chercheurs et de professionnels constitue, sans nul doute, un terreau unique en france. avec le recul, Philippe Bossin souligne l’importance de cette interaction entre pouvoirs publics et acteurs privés au sein de l’agglomération : «Parce que les questions de logistique ont été portées aux élus, ici peut-être plus qu’ailleurs, ce regroupement de compétences explique aussi l’implication des pouvoirs publics dans ce domaine. Ensuite, cela fonctionne dans l’autre sens : du fait du portage politique existant, les techniciens se sentent légitimes à avancer sur ces questions».

Cadre de référence Signe de cet intérêt politique, dès 1997, la région urbaine de lyon (rUl), une association regroupant les collectivités territoriales des départements de l’ain, de l’isère, de la loire et du rhône, réalise un schéma de cohérence de la logistique à l’échelle de la métropole. objectif : créer un cadre de référence sur lequel les travaux des différentes municipalités, des SCot (schéma de cohérence territoriale) et des PlU (plan local d’urbanisme) notamment, puissent se baser. «Au demeurant, l’idée visait à cartographier le territoire pour indiquer les endroits de développement privilégiés de la logistique et ceux où il était préférable qu’elle ne n n n

LA VILLE BÉNÉFICIE, DEPUIS L'ANTIQUITÉ, D'UNE SITUATION STRATÉGIQUE AU CARREFOUR DES ROUTES COMMERCIALES FRANÇAISES ET EUROPÉENNES.

LIVRAISONS NOCTURNES À LA CROIX-ROUSSE

Depuis décembre 2011, une grue procède au démontage des étages de la tour UAP. Les travaux de démolition doivent se terminer en juillet 2012 (photo de gauche). À sa place, une nouvelle tour baptisée Incity devrait voir le jour d’ici 2015. Culminant à 200 m, elle deviendra l’édifice le plus grand de la ville (photo de droite).

La logistique urbaine constitue un des axes de travail prioritaire du Cluster Logistique Rhône Alpes. À son initiative, une réunion s’est tenue, début janvier, à la mairie du 4e arrondissement. Objectif : entériner la mise en œuvre d’un programme expérimental de livraisons nocturnes silencieuses. Après la réalisation d’une étude préliminaire sur les flux du plateau de la CroixRousse, il testera, au cours du second semestre 2012 une nouvelle organisation au niveau du quartier.

Dr

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1969 Création de la communauté d’agglomération lyonnaise

Lyon Part-Dieu Chantier en cours

S. MEriEnnE

des investissements immobiliers au sein de la métropole lyonnaise concernaient la logistique en 2010. Un total de 57,6 millions d’euros.

Carrefour Historiquement, la région lyonnaise dispose de nombreux atouts pour expliquer, au moins en partie, cette détermination politique. Située au nord du couloir de la vallée du rhône, la ville bénéficie depuis l’antiquité d’une situation stratégique au carrefour des routes commerciales françaises et européen nes. Une position privilégiée grâce à laquelle elle a pu jouir d’une prospérité économique et industrielle presque aussi ancienne. aussi les questions de transport et de logistique ont toujours été cruciales pour la région et un grand nombre d’acteurs incontournables du secteur y ont développé leurs activités. À commencer par les constructeurs de véhicules comme Berliet hier, Volvo et renault trucks aujourd’hui. « Lyon est une ville industrieuse, une ville de production. On y construit des bus et des camions depuis très longtemps. Ce savoirfaire et cette matière grise ont continué à se développer avec le temps. Aujourd’hui, nous possédons plus de 100 entreprises au sein de l’agglomération dont l’activité est liée à la construction de véhicules. Automatiquement, cela constitue un socle », précise Michèle Vullien, maire

PATRIMOINE ET MOBILITE

SPla lYon ConférEnCE

d’habitants. L’aire urbaine de Lyon est la plus peuplée de France après celle de Paris. La ville elle-même n’en compte que 480 000 et le Grand Lyon, 1,2 million.

GRAND LYON, ENTRE

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2,15 millions

n n n futurs habitants d’un quartier seront également attentifs à la manière dont ils pourront être livrés à domicile. Cela fera partie des critères d’accessibilité et de confort de centre-ville, voire de qualité de vie, auxquels ils seront sensibles. Et le maire de Lyon est tout à fait convaincu de ces enjeux ».

Dr

GRAND LYON EN CHIFFRES

«Nous nous appuierons sur les volumes générés par un chargeur, en l’occurrence Intermarché, pour tenter de les mutualiser avec les autres générateurs de flux que sont les petits commerçants de proximité », explique Denis Heitz, dirigeant des transports Axcès et porteur du projet. Le but étant d’impliquer l’ensemble des acteurs de logistique urbaine pour que l’expérimentation porte ses fruits. «Ce projet ne peut être mené que s’il y a une adhésion de tout le monde. Et pour avoir

rencontré le maire de la Croix-Rousse David Kimelfeld ainsi que Jacques Descours, président de l’association des commerçants et artisans de la CroixRousse, nous avons constaté qu’il existe une véritable volonté commune d’envisager l’avenir des flux urbains,» précise Noël Comte, président du Cluster et vice-président de la CCIR. Avec l’ambition que ce test, s’il s’avère concluant, puisse être reproduit ailleurs dans l’agglomération lyonnaise, et pourquoi pas au-delà.

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Lyon-Confluence.

Couvrant un territoire de 150 ha, le projet prévoit dans sa globalité la construction de 820 000 m2 d’équipement immobilier dont près de 40 % sont dédiés au secteur tertiaire. Alors que la première des deux phases est en cours d’achèvement, les investissements se chiffrent aujourd’hui à 1,15 milliard d’euros, dont 64 % ont été portés par le secteur privé.

tivités ainsi que des organismes de formation et de recherche. Pierre-luc Jacquot, son délégué général, affirme sans ambiguïté : « Pour la logistique urbaine, la capacité à fonctionner entre public et privé est fondamentale. Nous sommes convaincus qu’une initiative totalement privée ou totalement publique connaîtra des difficultés par manque de concertations. Notre action consiste vraiment à travailler avec les pouvoirs publics et notamment le Grand Lyon ».

Innovations multiples Sur le terrain, la métropole lyonnaise brille par son dynamisme en matière de prospective et d’innovation. «Aujourd’hui, la dimension logistique est intégrée dans les cahiers des charges de tous nos projets de développement urbain. Nous sommes en recherche, attentifs à tout. Nous faisons du benchmarking à l’égard des autres agglomérations françaises ou étrangères pour s’en inspirer, mais également éviter les fausses bonnes idées qui ont pu créer un engouement au départ mais qui fonctionnent mal dans le temps», annonce Michèle Vullien. Conséquence : la ville apparaît comme un territoire pré-

Cœur de ville Zones juxtaposées En 2005, la mairie a créé en plein centre-ville une vaste zone où la vitesse des véhicules est limitée à 30 km/h. Avec 87 km de voiries, elle constitue la plus grande « Zone 30 » de France. En 2008, un second périmètre réglementé a été institué sur la Presqu’île : une « zone de basses émissions » au sein de laquelle les véhicules polluants sont interdits d’accès.

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Confluence Mixité urbaine Lancée sous le mandat de Raymond Barre en 1996, la mission Confluence a pour ambition de doubler la superficie du centreville de Lyon, en urbanisant le Sud de la Presqu’île. Le projet vise à créer un quartier mixte de centre-ville, alliant bureaux, logements, commerces et équipements de proximité. Ces aménagements devraient permettre d’accueillir en plus 18 000 salariés et 9 000 résidents.

curseur en matière de logistique urbaine. En 2008, elle met en œuvre, pour la première fois en france, une «zone de basses émissions» en plein cœur de la ville. l’accès à la Presqu’île est interdit aux véhicules répertoriés «Euro 2», c’està-dire antérieurs à 1996. le système prévoyant un durcissement des critères dans le temps comme, par exemple, l’interdiction des véhicules «Euro 3» à partir de 2010. En toute discrétion, lyon venait d’instituer la première ZaPa (Zone d’action prioritaire pour l’air), reconnue depuis comme telle par le ministère de l’Ecologie, du Développement durable, des transports et du logement. autre particularité notable : lyon est la seule ville d’Europe à avoir participé aux trois programmes internationaux «fideus», «freilot» et «Citylog» ayant pour objet le développement de systèmes innovants en vue d’améliorer la distribution de marchandises en ville (lire encadré p. 61). intra-muros, les initiatives se multiplient le plus souvent à l’initiative des pouvoirs publics. À Perrache, la construction d’un nouveau dépôt de la Sytral (Syndicat Mixte des transports pour le rhône et l’agglomération lyonnaise) procède d’une démarche originale en proposant différentes fonctionnalités au site : au sous-sol le dépôt de bus proprement dit, au rez-de-chaussée un centre de maintenance, des stations de vélos et de voitures en libre-service ainsi qu’une plateforme logistique destinée à desservir les commerces de la Confluence, et aux étages supérieurs des bureaux et des logements. le coût de l’aménagement, lancé en juillet 2011, est estimé à 62 M€. autres exemples : l’expérimentation de livraisons nocturnes silencieuses dans le quartier de la n n n

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Part-Dieu. Principal quartier d’affaires de la métropole, il regroupe 2 200 entreprises et administrations et environ 40 000 salariés. L’évolution du quartier sur les vingt prochaines années, prévoit de faire passer les 900 000 m2 de tertiaire actuels à 1,5 million. Dans ce but, pas moins de cinq projets de gratte-ciel sont en cours d’étude ou de réalisation sur le site parmi lesquels deux (Silex 2 et Incity) devraient être achevés d’ici trois ans.

SUR LE TERRAIN, LA MÉTROPOLE LYONNAISE BRILLE PAR SON DYNAMISME EN MATIÈRE DE PROSPECTIVE ET D’INNOVATION.

SPla lYon ConflEUnCE

Lyon

s’implante pas», précise Clarice Garin-Hameline, chargée d’études à l’agence d’urbanisme de l’agglomération lyonnaise. Si cette démarche s’intéresse à la logistique au sens large, et non spécifiquement à la distribution en ville, elle démontre la volonté des acteurs professionnels et institutionnels d’organiser à long terme une activité jugée comme essentielle à l’économie urbaine. le document est révisé en 2005-2006, puis en 2011-2012 pour s’adapter aux évolutions économiques du secteur. autre avancée procédant de la même volonté de partenariat public-privé : en décembre 2004, le Grand lyon se dote d’une instance de concertation «marchandises en ville», regroupant à la fois l’état, les chambres consulaires et les organismes professionnels de transporteurs. Cette fois encore, le travail en commun est privilégié afin de trouver des solutions concrètes aux différents problèmes que pose la logistique urbaine. Une démarche collective à laquelle souscrit pleinement le Cluster logistique rhône alpes, acteur incontournable du secteur dans la région. Créé en octobre 2009, il regroupe une soixantaine de membres parmi lesquels des entreprises de transport, des industriels, des collec-

nnn

SPla lYon ConflEUnCE

IMMOBILIER D’ENTREPRISE

NOUVEL ESPACE LOGISTIQUE AUX CORDELIERS La municipalité va inaugurer un nouvel Espace Logistique Urbain (ELU) au cœur du 2e arrondissement. À l’origine, le site appartient à Lyon Parc Auto (LPA), la société d’économie mixte qui gère une partie du parc de stationnement de la ville, et fait partie d’une aire expérimentale dédiée à la mobilité regroupant des bureaux, un parking, un pôle de vélos et d’automobiles en libre-service ainsi qu’une surface vacante de 300 m2. Un appel d’offres est lancé en juin 2011 pour trouver un opérateur susceptible de transformer cette ancienne réserve d’un supermarché en zone logistique de proximité. Avec un critère essentiel : que les livraisons soient effectuées en mode doux.

Six mois plus tard, le verdict tombe : le groupe Deret est retenu par LPA et signe une convention d’occupation temporaire pour deux ans. Après quelques travaux d’aménagement pour l’informatique et les bornes de chargement des véhicules électriques, les premières livraisons ont été effectuées au début mars. Outre l’opportunité de raccourcir ses circuits de livraisons, cet emplacement permet au transporteur d’envisager de nouvelles potentialités. «Pour certains de nos clients, nous envisageons la possibilité de faire du stock déporté de produits non sensibles, PLU ou emballages notamment. Nous réaliserons très prochainement un premier test avec

Sephora dans ce sens,» précise Jean-Luc Fournier, responsable communication du groupe Deret. Au-delà des aspects organisationnels, l’opération vise surtout à montrer qu’il est possible de développer des ELU sans générer de nuisances pour les riverains. Une conviction partagée par les pouvoirs publics lyonnais, à l’origine du projet. «C’est à la demande de la ville et du Grand Lyon que LPA a agi pour favoriser la création de cet espace logistique urbain. Nous sommes en train d’étudier d’autres sites possibles qui pourraient s’inscrire dans la même démarche », précise, à cet égard, Marie-Claude NicolasBauer, chargé de mission «marchandises déplacement» au Grand Lyon.

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MÉTROPOLE

FACE À LA RARETÉ DU FONCIER DISPONIBLE, LES REGARDS SE TOURNENT AUJOURD’HUI VERS LE PORT ÉDOUARD HERRIOT

GÉRARD COLLOMB

« Lyon se positionne comme un territoire d’innovations »

Croix-rousse à l’initiative du Cluster logistique rhône alpes et l’ouverture d’un nouvel espace de logistique urbaine (ElU) en plein cœur du 2e arrondissement (lire encadrés p. 55 et 57). nnn

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tHiErrY ValliEr

Chantiers urbains face à la rareté du foncier disponible, les regards se tournent aujourd’hui vers le port édouard Herriot (PEH). implanté au sud du 7e arrondissement, ce site multimodal dispose d’une vaste emprise foncière, à quelques kilomètres à vol d’oiseau du centre urbain dense. Une position rêvée pour accueillir des aménagements dédiés à la distribution urbaine. Deux projets sont actuellement en cours d’étude. le premier prévoit la construction d’un hôtel logistique urbain de nouvelle génération destiné aux acteurs de la messagerie et du transport de fret. l’autre, plus ambitieux, envisage la mise en place d’un centre de consolidation des chantiers afin de pouvoir gérer de manière coordonnée et cadencée leurs approvisionnements. le mode fluvial permettant l’acheminement de matériaux lourds, le PEH servirait de base arrière pour les ouvrages de construction qui se situent en hyper-centre, à la Part-Dieu ou Confluence par exemple. «Aujourd’hui, lorsque l’on réalise plusieurs chantiers simultanés dans un tissu urbain dense, on est incapable de trouver les m2 nécessaires pour accueillir physiquement les matériaux et les véhicules qui viennent alimenter l’édification des bâtiments. Il est donc nécessaire d’inventer de nouveaux systèmes. D’autres que les Lyonnais y ont déjà pensé : à Londres, à Berlin, à Stockholm. Malgré tout, il existe très peu d’exemples de ce type dans le monde », explique Philippe Bossin d’interface transport. l’étude de faisabilité du projet devrait être lancée d’ici à juillet 2012. là encore, lyon se montre pionnier en proposant à la filière BtP un mode d’organisation pour le moins innovant. ❚

Élu maire depuis 2001, Gérard Collomb préside également la communauté urbaine du Grand Lyon. Proche des acteurs économiques de la ville et fortement impliqué sur les enjeux environnementaux, il mène une politique d’aménagements urbains au sein desquels les questions de mobilités figurent à l’honneur. Acteurs Urbains : À quels défis majeurs une ville comme Lyon doit-elle faire face aujourd’hui ? Gérard Collomb : l’agglomération lyonnaise s’efforce de prendre la mesure de tous les défis qui s’imposent aux métropoles et territoires urbains aujourd’hui pour demain. Défi environnemental d’abord. il faut inventer une ville dense, multipolaire, ménageant des espaces naturels et agricoles. organiser un réseau de transports en commun performant, dans la ville et entre les centres urbains. Mettre en place un réseau intelligent d’énergie. Construire des logements peu énergivores. respecter la biodiversité. indéniablement, l’enjeu écologique se gagnera en ville ! Défi social également, puisqu’il faut éviter la ghettoïsation, le repli sur soi et organiser la mixité sociale partout dans l’agglomération. Ceci en faisant jouer les leviers du logement, des transports et du dynamisme économique. C’est une façon concrète d’œuvrer au rassemblement. Défi économique enfin. notre territoire s’inscrit dans une compétition mondiale entre les métropoles pour capter les investissements et renforcer leurs compétences respectives. il nous faut aujourd’hui un cadre institutionnel en cohérence avec la réalité socio-économique des territoires. Car l’innovation provient de tous les éléments de la métropole et il faut faciliter et inciter les initiatives. Pour moi, les villes sont la marge de croissance de l’Europe. À ce titre, grâce au pôle métropolitain que nous construisons avec les agglomérations de Saint-Etienne, du nord-isère et de Vienne, nous serons en mesure de conduire de grandes politiques transversales dans les domaines du transport, de l’agriculture périurbaine ou de pôles d’excellence universitaire et économique. Et donc construire de manière concertée une métropole véritablement multipolaire, attractive, créative et durable. Concrètement, comment cette ville durable se construit-elle à Lyon ?

G. C. : les enjeux de développement durable sont omniprésents dans nos grands

projets d’aménagement urbain. nous avons choisi de mener ces chantiers sur des sites déqualifiés, fortement marqués par un passé industriel, comme la Confluence, le Carré de Soie et Gerland. nous refaisons ainsi la ville sur la ville, nous créons de la densité, et parce que cela limite l’étalement urbain, l’emprise spatiale et les déplacements, c’est le premier acte de préservation de l’environnement. Pour le quartier Confluence, nous nous sommes fixé des objectifs très ambitieux de constructions de haute qualité environnementale et à énergie positive. le WWf a labellisé la Confluence « quartier durable » et le nEDo, agence de l’énergie japonaise, nous fournit des techniciens et des moyens pour faire émerger un projet innovant de communauté énergétique intelligente ou «smart city». Bref, ce quartier est devenu l’un des laboratoires mondiaux de la ville durable. L’activité économique d’une ville induit de nombreux flux de biens à destination des entreprises, des commerces mais aussi des particuliers avec le développement du ecommerce. Comment l’aggloméra tion lyonnaise appréhende-t-elle cette question ?

G. C. : En matière de transports de marchandises en ville, lyon se positionne comme un territoire d’innovations. Cette problématique est importante, car avec l’explosion des ventes sur internet, le nombre de livraisons en ville ou «de dernier kilomètre» est devenu très conséquent, ce qui est potentiellement source de congestion. nos avancées dans

« LE QUARTIER CONFLUENCE EST DEVENU L’UN DES LABORATOIRES MONDIAUX DE LA VILLE DURABLE. »

« SUR LE TERRITOIRE DU GRAND LYON, LES DÉPLACEMENTS SONT À L’ORIGINE DE 29 % DES ÉMISSIONS DE CO2. »

ce domaine font partie intégrante de notre stratégie globale de développement durable. le Grand lyon concentre de nombreux acteurs déterminés à innover sur ces questions, et porte de nom breuses démarches partenariales dans le cadre de programmes de recherche ambitieux, notamment le pôle lyon Urban truck and Bus (lUtB), le laboratoire d’économie des transports (lEt), le CnrS ou encore l’école nationale des travaux Publics de l’état, l’inSa et l’école Centrale de lyon. nous sommes en train d’expérimenter des innovations, notamment des espaces de logistique urbains, des systèmes de livraisons à deux roues ou encore une nouvelle réglementation concernant les aires de livraison en centre-ville. En octobre 2011, vous avez lancé le projet Optimod’Lyon. En quoi consiste-t-il ?

G. C. : Dans le cadre d’un appel à manifestation d’intérêt sur la mobilité de l’aDEME, le Grand lyon et la Ville de lyon, en partenariat avec huit entreprises et 3 organismes de recherche s’associent pour porter ce projet destiné à optimiser la mobilité durable en ville. il s’inscrit dans un contexte de congestion du trafic de marchandises et des personnes au sein des grandes métropoles, au moment où elles doivent répondre aux enjeux du développement durable. l’objectif est d’amplifier et d’accélérer le report modal de la voiture particulière vers les autres modes, et d’optimiser les opérations de fret urbain via une plateforme d’informations tous modes intégrant des données multisources relatives à la mobilité urbaine (topologie des réseaux, qualité de l’air, temps de transport). Sa mise en œuvre sera la pierre angulaire d’expérimentations de services innovants pour les voyageurs et les professionnels du fret. Comment concilier le développement de la mobilité et de l’économie n n n ACTEURS URBAINS /// AVRIL 2012

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MÉTROPOLE

G. C. : aujourd’hui, sur le territoire du Grand lyon, les déplacements sont à l’origine de 29 % des émissions de Co2. Ce sont plus de 150 000 véhicules qui traversent le Grand lyon chaque jour, lesquels sont en moyenne très peu occupés. Dans ce cadre, le plan climat adopté par l’agglomération fixe des objectifs clairs de réductions des déplacements polluants. il s’agit d’inciter le changement des pratiques et des modes de mobilité en ville. nous développons tout d’abord des infrastructures de transport en commun de plus en plus performantes, qui assurent 15 % de la part modale. le plan modes doux, soutenu par le système Vélov et l’aménagement de centaines de km de pistes cyclables, nous permettra de doubler la part modale du vélo d’ici 2014. Et puis, grâce au covoiturage et à l’autopartage, nous souhaitons offrir une alternative réaliste et crédible à la voiture particulière. Quelles sont vos priorités futures en matière de transport urbain ?

G. C. : notre métropole est aujourd’hui reconnue pour la qualité de son réseau

de transports en commun. nous allons continuer à renforcer ce maillage afin de relier tous les bassins de vie et d’activité de l’agglomération entre eux, notamment en prolongeant nos lignes de tramway et la ligne B du métro. nous entendons par ailleurs rester en pointe quant à l’évolution des pratiques de mobilité. après avoir développé le système Vélov en 2005, nous avons récemment lancé le système d’autopartage innovant Car2Go. l’objectif est de permettre à chacun de choisir le mode de transport le plus adapté à son trajet. la multimodalité, c’est plus de flexibilité, plus de liberté pour tous, mais aussi une meilleure qualité de l’air et de la vie en centre-ville.

pas un hasard ! les investisseurs voient bien qu’à lyon nous possédons une offre de formation complète et de haut niveau, un capital humain qualifié et performant, un coût de la vie avantageux. Et un cadre agréable. ils constatent aisément, lorsqu’ils viennent, l’attention portée à la qualité de vie, le dynamisme généré par nos grands projets urbains — Confluence, Carré de Soie, Gerland, Part-Dieu–, notre vie culturelle riche et la qualité de notre réseau de transports. nous sommes une métropole connectée, grâce à un aéroport reliant 120 destinations et à un hub ferroviaire au cœur de l’Europe de la grande vitesse. En outre, ils apprécient également le fait que, depuis 2001, nous avons fait croître de 30 % la taille du parc de bureaux de notre métropole, et ce pour accompagner le mouvement de tertiarisation de notre économie.

Quels atouts la métropole lyonnaise peut-elle mettre en avant pour inciter les entreprises à s’installer sur son territoire ?

G. C. : En 2010, environ 15 800 entreprises ont été créées sur notre territoire, soit trois fois plus qu’il y a 10 ans. De grands groupes nous font confiance en renforçant leur présence sur le territoire du Grand lyon : la SnCf, GDf Suez, EDf, rhodia, lafarge, renault trucks. D’autres grands comptes internationaux — toshiba, olympus et Baxter — nous ont rejoints depuis quelques mois. Cela n’est

Lyon ambitionne également de devenir une référence européenne en matière de recherche et développement. De quelle manière ?

G. C. : Effectivement, lyon a une réputation d’innovation industrielle dans de nombreux domaines, notamment les biosciences et les écotechnologies. nous sommes la capitale de la région, rhônealpes, qui se classe 6e au plan européen en termes de PiB et 4e en termes d’effectifs travaillant dans la r & D. le Grand lyon s’implique pour générer de véritables filières d’excellence dans l’agglomération, autour des pôles de compétitivité qui associent entreprises et monde de la recherche. En 2011, les 5 pôles de compétitivité lyonnais ont développé plus de 80 projets et investi plus de 400 millions d’euros, afin de produire des innovations génératrices de valeur ajoutée et d’emplois à long terme. les classements internationaux reflètent bien cette perception d’une ville dynamique où investir : l’European Cities Monitor 2011 de Cushman & Wakefield, classement de référence, place lyon en 19e position des métropoles européennes où investir. Et nous comptons bien améliorer encore ce résultat ! reste que nous devons mieux faire connaître ces atouts. C’est pour cela que le Grand lyon et l’aderly (1) ont créé la bannière onlYlYon, qui rassemble sous une même dénomination tous les acteurs économiques de l’agglomération, ambassadeurs de lyon en france et à l’international. Je rencontre d’ailleurs régulièrement des investisseurs à l’étranger, car l’attractivité ne se décrète pas : elle se gagne ! (1) Agence pour le développement de

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« LA MULTIMODALITÉ, C’EST UNE MEILLEURE QUALITÉ DE L’AIR ET DE LA VIE EN CENTRE-VILLE. »

«LA RÉGION RHÔNE-ALPES SE CLASSE 6E AU PLAN EUROPÉEN EN TERMES DE PIB»

la région lyonnaise

Continuité Mobilité en ville

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En matière de transport et d’aménagement urbain, il existe une réelle continuité entre les mandatures de Gérard Collomb et celle de Raymond Barre, maire de Lyon de 1995 à 2001. Ce dernier s’était notamment impliqué dans le développement du tramway qui structure aujourd’hui fortement la ville.

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rUl

n n n urbaine, émetteur de pollution, avec une politique de protection de l’environnement ?

TESTER DES SOLUTIONS INNOVANTES Depuis plusieurs années, le Grand Lyon participe activement à des expérimentations en matière de logistique urbaine, financées en partie par l’Union Européenne. Premier en date, le projet FIDEUS s’est déroulé de 2006 à 2008 à Barcelone, Hanovre et Lyon. Soutenu par le Lyon Urban Truck & Bus (LUTB) et le Grand Lyon, il était destiné à développer des véhicules de distribution urbaine adaptés aux exigences modernes en termes d’émissions sonores, d’ergonomie et de traçabilité des opérations. Trois prototypes ont été mis au point et tester sur le terrain : un triporteur électrique, un véhicule utilitaire léger et un camion urbain de distribution. « Ce projet emblématique a permis de tester la manière dont nous pouvions travailler en commun entre constructeurs, transporteurs, logisticiens et pouvoir publics. Et cela nous a donné envie de poursuivre ce mode de travail coopératif multiacteur », explique Bernard Favre, directeur de recherche chez Volvo Renault Trucks et directeur du programme « système de transport » au LUTB. D’où la participation au projet «FREILOT». Prévu de 2009 à 2012, il rassemble les villes d’Helmond (PaysBas), de Bilbao (Espagne), de Cracovie (Pologne) et de Lyon. Objectif : proposer des solutions innovantes en termes de véhicules et d’infrastructures urbaines pour réduire la consommation de carburant et les émissions polluantes. Concrètement, plusieurs actions sont envisagées. Les poids lourds sont équipés de modules permettant de brider leur vitesse lorsqu’ils entrent dans une zone identifiée. Parallèlement, deux corridors sont pourvus d’équipements complémentaires permettant aux feux de signalisation de prioriser les camions qui les abordent. Enfin, les conducteurs sont formés à la conduite douce et ont la possibilité de réserver à l’avance

une des cinq aires de livraison prévue à cet effet. « Nous estimons que la combinaison de ses différentes actions permet de réduire de 25 % la consommation de carburant et donc du CO2 émis. Et ceci avec des infrastructures et des véhicules courants, dont on a essayé de tirer le meilleur parti », poursuit Bernard Favre. Commencée en juin 2011, l’expérience, qui regroupe au total une quarantaine de véhicules, devrait s’achever au cours du second semestre 2012. Dernier projet en cours, «CITYLOG» a débuté en 2010 pour une durée de 3 ans également. Il vise à augmenter l’efficacité des livraisons urbaines de marchandises via la mise en œuvre de véhicules innovants et de nouvelles solutions de transport. Coordonné par le centre de recherche de FIAT, il implique 18 partenaires parmi lesquels des industriels, des logisticiens, des instituts de recherches et des collectivités locales. Techniquement, le projet prévoit la mise en service d’un camion lourd et de deux véhicules utilitaires. Le premier officiant comme «bus de fret» pour acheminer plusieurs unités de charge en centre-ville pour qu’ensuite les deux autres réalisent les livraisons finales. Originalité : les trois prototypes sont équipés de nouvelles unités de charge, sorte de conteneurs compacts, qui améliorent leur interopérabilité et leur polyvalence. Réduisant ainsi le nombre de véhicules en circulation. En bout de chaîne, le système prévoit l’utilisation de stations modulaires, baptisée «BentoBox», disposant de chariots amovibles pour recevoir les colis. Les expérimentations de terrain se dérouleront à Turin, Berlin et Lyon. Pour cette dernière, elles ont débuté depuis le 21 février et devraient se poursuivre jusqu’en juin 2012. ACTEURS URBAINS /// AVRIL 2012

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